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UNE IMAGE A RESTAURER

par M. Saadoune



En prenant la direction du MSP à une très confortable majorité, Abderrezak Makri comptait, non sans raison, sur son image d'opposant qui osait dire «son mot» malgré l'aplatissement de la direction de Soltani dans «l'Alliance présidentielle». Son discours a conforté depuis son arrivée une volonté d'ancrage dans l'opposition. Et s'il n'a pas abondé dans le sens de ceux qui ont appelé à la mise en œuvre de l'article 88 de la Constitution, il n'en a pas été très vif dans la dénonciation de l'absence de transparence sur la santé du président.

La vie politique algérienne étant durablement gelée, il est difficile de mesurer l'impact au sein de l'opinion algérienne. Par contre, ce qui est certain est que la «participation» au pouvoir du MSP au cours de la dernière décennie a, très négativement, affecté l'image du mouvement. Le mouvement a imputé sa dernière débâcle électorale aux législatives à la fraude mais ses mauvais résultats reflètent bien une réelle désaffection à l'égard d'un mouvement que ses dirigeants ont perdu dans des jeux politiciens. Ce qui est accepté comme «allant de soi» dans le comportement des partis du pouvoir comme le FLN et le RND ne passe pas s'agissant d'un mouvement censé être une alternative politique. La référence religieuse du mouvement agit même comme une circonstance aggravante.

Il n'était donc pas fortuit que le MSP paye les pots cassés d'une fausse participation qui a donné quelques ministres et gelé le parti. Car la fonction de «l'Alliance présidentielle» était bien de geler la vie politique. Cela a été une «réussite» à laquelle le MSP a apporté sa contribution. L'une de ses conséquences a été une dilution de l'identité du mouvement et ce ne sont pas les «réalisations» de certains ministres qui pouvaient le compenser, bien au contraire. Le fait que le MSP n'ait pas profité de la «vague verte» qui a touché l'Afrique du Nord n'a rien d'accidentel. La première tâche de ce parti est de rétablir son image et de confirmer que son entrée en opposition n'est pas un simple simulacre dans une scène algérienne qui n'en manque pas.

Makri a peut-être l'ambition de fédérer un camp islamiste en lambeaux mais il devra d'abord restaurer son propre mouvement. Car le gel du mouvement sous la direction, plus cabotine, de Boudjerra Soltani n'a pas seulement suscité des dissidences. Il a plus gravement convaincu de nombreux cadres du mouvement de la vanité de l'action politique. Ce sont ces cadres et militants que Makri devra d'abord convaincre pour redonner au MSP une autre vie que celle d'un simple appareil. L'exercice est rendu compliqué par le fait que Makri ne veut pas trop remuer le passé et faire l'inventaire politique d'une participation calamiteuse. Comment convaincre ces militants qui étaient révulsés par le niveau d'obséquiosité politique atteint par le mouvement sous les auspices du «ministre d'Etat, président du MSP» de revenir à la politique ?

IL VA DE SOI QUE LE CREDIT POLITIQUE DEPENDRA DE L'AUTONOMIE REELLE DU MOUVEMENT VIS-A-VIS DU POUVOIR. ET, AU-DELA DE CET ASPECT DOMESTIQUE, L'ENJEU POUR LE MSP, COMME POUR SES HOMOLOGUES DANS LE MONDE ARABE, EST D'APPORTER LA DEMONSTRATION QU'ILS NE SONT PAS DES PARTIS DE PROTESTATION INCAPABLES DE GERER. LE CAS EGYPTIEN, MEME SI LES FRERES S'INSTALLENT DANS LA POSTURE DE VICTIMES, A ETE REVELATEUR DE LEUR NAÏVETE POLITIQUE ET DE LEUR INCAPACITE A DIALOGUER AVEC LES AUTRES COURANTS. SUCCEDER A BOUDJERRA ET A SA POLITIQUE N'A RIEN D'UNE SINECURE.