Hier, aujourd'hui,
le début du Ramadhan en France fait déjà polémique. Entre la date fixée par le
Conseil français du culte musulman (CFCM) et celle de la Grande Mosquée de
Paris (GMP), jamais les rangs des musulmans de France n'ont paru aussi
fragilisés.
Le Ramadhan
commencera aujourd'hui, a annoncé la commission théologique de la GMP,
désavouant ainsi le CFCM qui, lui, le fixait à hier mardi. «La vision de la
nouvelle lune s'étant avérée impossible à établir ni en France ni dans les pays
musulmans dans la nuit de lundi à mardi», a expliqué la commission théologique
dans un communiqué. Un échange de communiqués s'ensuit entre les deux instances
représentatives du culte musulman en Hexagone, le CFCM a maintenu sa position
lundi soir, en réaffirmant dans un communiqué que le premier jour du jeûne est
bel et bien le mardi, malgré le fait que plusieurs pays arabes et musulmans
dont l'Algérie, le Maroc, mais aussi l'Arabie Saoudite ne commenceront à jeûner
qu'à partir d'aujourd'hui mercredi. Cette discordance dans les dates trouve son
origine dans la première annonce faite, ce lundi par Dalil Boubakeur, recteur
de la GMP et nouveau président du CFCM, maintenant la date du 9 juillet comme
celle du premier jour du Ramadhan. Un SMS diffusé le lendemain annonçait aux
journalistes que ses imams en avaient décidé autrement. Cet épisode consacre
amplement les divisions dans les rangs des musulmans de France allant même jusqu'à
contester le rôle du Conseil et appelant à s'émanciper des courants «gérés» par
les ambassades. Le 9 mai dernier, le CFCM décide d'adopter le calcul
scientifique et non plus l'observation du croissant lunaire pour établir le
calendrier musulman, et par conséquent les dates de début et de fin du mois
sacré. Toutes les fédérations qui siègent au Conseil avaient signé cet accord:?
l'Union des organisations islamiques de France (UOIF, proche des Frères
musulmans), la GMP (proche de l'Algérie) et le Rassemblement des musulmans de
France (RMF, proche du Maroc), et c'est ainsi que la date du 9 juillet avait
été fixée grâce aux calculs du Conseil européen de la fatwa et de la recherche
que l'on dit proche des Frères musulmans, basé à Dublin en Irlande, et des autorités
turques. Pourtant, des voix sorties de quelques mosquées se sont élevées pour
contester la légitimité théologique au CFCM, lui déniant le droit de prendre
une telle décision. Jusqu'à lundi, le Conseil a essayé de maintenir sa décision
initiale argumentant que le monde musulman a opté à la visibilité du croissant
à l'échelle mondiale et non à une visibilité régionale, comme le souligne
Mohammed Moussaoui, l'ancien président du CFCM, qui déclare que «le croissant
lunaire n'a pas été vu en France lundi soir. Selon les données astronomiques,
il n'est visible qu'en Amérique du Sud. Mais dès qu'il est observable dans un
endroit donné, il nous engage tous au Ramadhan. On n'a pas à se restreindre à
la frontière française». Pourtant, Dalil Boubakeur décide de se rallier à la
date communautaire. «L'islam accorde plus d'importance à la dimension
communautaire que scientifique», dira-t-il pour s'expliquer, avouant, au
passage, que le CFCM n'est pas en mesure «d'imposer un avis». Cette guerre
larvée au sein du Conseil, dominé, depuis les dernières élections, par le RMF,
a connu son apogée avec le bras de fer qui a opposé ces derniers au GMP pour
l'élection de son président. Ainsi, et malgré les déclarations de Dalil
Boubakeur, le CFCM confirme que le carême a débuté hier en France. L'UOIF,
grande partisane du calcul scientifique affirme pour sa part, concernant le
Ramadhan 1434 /2013, que les données astronomiques indiquent que le premier
jour du jeûne pour cette année sera le mardi 9 juillet 2013 alors que l'Aïd sera
célébré le jeudi 8 août 2013.