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Le parti salafiste «Al-Nour», élément-clé du jeu post-coup d'Etat : L'Egypte bloquée dans un dangereux face-à-face

par Salem Ferdi

Partisans et opposants du Président Morsi étaient, hier, dans la rue, dans un climat tendu. Le «nouveau pouvoir» découvre que le ralliement des salafistes du parti ?Al-Nour' a un prix. Ils ont émis un veto à la désignation d'El-Baradei.

Alors que l'Egypte s'engageait dans de nouvelles démonstrations dans la rue entre adversaires et partisans du Président Mohamed Morsi, des tractations se poursuivaient pour la désignation d'un nouveau Premier ministre. Le nom de Mohamed El-Baradei avait été annoncé par l'agence ?Mena' mais la présidence est intervenue pour dire que la désignation ne s'est pas faite même si l'ancien président de l'AIEA restait une option. Ce sont les objections du parti salafiste, ?Al-Nour', qui est la couverture islamiste de la destitution de Mohamed Morsi, qui ont retardé la décision. Revenant en arrière, le président intérimaire désigné, Adly Mansour, a indiqué qu'aucune décision n'avait été prise, même si l'option de M. El-Baradei restait, à ses yeux, «la plus logique». L'option d'El-Baradei paraît appropriée pour les militaires qui doivent convaincre, au niveau international, qu'ils ne comptent pas s'éterniser au pouvoir. L'ancien président de l'AIEA est une personnalité connue et «agréée» chez les Occidentaux. Mais l'importance des islamistes du parti ?Al-Nour' devient cruciale pour montrer que ce courant reste présent dans la transition, malgré le coup d'Etat contre Mohamed Morsi et la défiance des Frères Musulmans.

LE VETO SALAFISTE

Un responsable du parti Al-Nour, Nader Baqqar a souligné qu'El-Baradei était «une personnalité technocratique, qui n'est pas en mesure de faire cesser le clivage qui prévaut dans la rue». Alors que le «nouveau pouvoir» multiplie les appels à la «réconciliation nationale» et les assurances qu'aucun «courant n'est exclu», le choix d'El Baradei qui était à la tête de l'opposition à Morsi aurait l'apparence d'une «victoire», qu'une option d'apaisement. Il est, en tout cas, peu «consensuel» à l'intérieur du pays, même s'il a appelé, dans un entretien à un journal allemand, «à l'intégration des Frères dans le processus de démocratisation». A moins de convaincre des salafistes, devenus plus importants que jamais? pour éviter un retour d'unité chez les islamistes, l'homme crée plus de problèmes à l'intérieur, qu'il n'en résout à l'extérieur. Ces tentatives de mettre en place un gouvernement chargé d'appliquer la «feuille de route» de l'armée se déroulent dans un contexte très tendu avec une mobilisation dans la rue. En début d'après-midi, les partisans de Morsi, appelés à un rassemblement «millionième de la légitimité populaire» affluaient en masse vers les espaces, occupés depuis plusieurs jours, aux abords de l'Université du Caire, dans le quartier de Guizeh et une grande place devant la mosquée ?Rabea Al Adawiya', à Nasr City, un faubourg de la capitale.

Les Frères Musulmans qui se disent ciblés par une campagne du nouveau pouvoir ont appelé à protester « par millions » contre « l'Etat policier » mis en place après « le coup d'Etat militaire ».

LA NUIT DES DERAPAGES

Les partisans des Frères Musulmans, rassemblés autour de la mosquée ?Rabea al Adawiya', l'université du Caire et à proximité du siège de la Garde républicaine au Caire ainsi qu'à Assiout et Alexandrie, entendent demeurer sur place et refuser de se disperser avant le retour du « président élu ». Ils ont reçu l'appui d'Al Qaradhaoui qui a émis une «fatwa» pour le respect de la légitimité du président élu. Il a déclaré la destitution de Morsi «nulle et non avenue». A l'opposé, les adversaires de Morsi et notamment le mouvement ?Tamarod' ont appelé au rassemblement à la place ?Tahrir' pour soutenir la destitution du président au nom de la « légitimité populaire». Des jeunes armés de gourdins contrôlaient les accès à la place.

Les forces de sécurité étaient fortement déployées pour assurer la «sécurité des manifestations» alors que dans le nord Sinaï, un mouvement djihadiste a menacé de «répondre fermement» à l'armée qui a, selon lui, tiré sur les fidèles. Un gazoduc alimentant la Jordanie, a été la cible d'un attentat à la bombe, pour la première fois depuis près d'un an. Les troubles en Egypte ont fait jusqu'à présent plus de 80 morts et plus de 1.000 blessés.

Hier, alors que les deux camps mobilisaient en force et que les marches commençaient, de nombreux Egyptiens appréhendaient la nuit. Les pires débordements ont commencé, vendredi dernier, au début de la nuit. L'Egypte était toujours bloquée dans un dangereux face-à-face.