Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Au moins 26 morts dans des manifestations à Port-Saïd : L'Egypte au bord de l'implosion

par Yazid Alilat

C'est dans un climat particulièrement sulfureux, pouvant dégénérer à tout moment en une seconde guerre civile en Egypte que le président Mohamed Morsi, de la confrérie des Frères musulmans égyptiens, avait appelé vendredi les Egyptiens à «rejeter la violence» après de violents affrontements entre manifestants proches de l'opposition et forces de l'ordre qui ont fait sept morts et plus de 450 blessés, selon un dernier bilan officiel établi vendredi.

L'appel du président Morsi intervenait alors que l'armée égyptienne a déployé le même jour de vendredi soir des forces dans la ville de Suez après des manifestations qui ont fait six morts dans cette ville portuaire, selon des sources de sécurité. Des soldats et des blindés légers ont été déployés autour de bâtiments sensibles comme le siège de la police de la ville et celui du gouvernorat local, selon ces sources. De violents affrontements sont également survenus vendredi dans plusieurs villes d'Egypte entre manifestants hostiles au président islamiste Mohamed Morsi et forces de l'ordre, qui ont fait au total sept morts - six dans cette ville et un dans une ville proche, Ismaïlia.

Dans journée d'hier samedi, la tension n'est pas tombée pour autant dans plusieurs villes du pays, alors qu'à Port Saïd de violents affrontements ont fait 26 morts. Une situation extrêmement grave qui pourrait évoluer dans les prochains jours. A Port Saïd, de violents affrontements ont eu lieu après l'annonce de la condamnation à mort de 21 jeunes pour leur implication dans les bagarres qui ont fait 74 morts au stade de la ville en février 2012 entre le club local et Al-Ahly du Caire. Selon un bilan établi par des sources médicales, les affrontements de samedi ont fait 26 morts et 277 blessés. Les proches des personnes condamnées ont tenté d'envahir la prison dans laquelle se trouvaient leurs parents. D'après des témoins, des assaillants inconnus ont ouvert le feu en direction de la police qui a riposté avec du gaz lacrymogène, alors que deux postes de police ont été pris d'assaut et des tirs nourris se faisaient entendre à travers la ville, devenue un champ de bataille. Si le ministère de l'Intérieur a parlé «d'affrontements violents et sanglants», un haut gradé de l'armée a annoncé le déploiement des militaires pour «rétablir le calme» et protéger les installations publiques.

Par contre, au Caire, dans la salle d'audience où étaient jugés les présumés auteurs des bagarres du stade de Port Saïd, le verdict a été accueilli par les cris de joie et les youyous des membres des familles des victimes. Le président du tribunal a fixé au 9 mars le verdict pour le reste des accusés, dont 9 policiers. Le drame du stade du club d'Al-Masry, qui affrontait en février 2012 le populaire club cairote d'Al-Ahly, a fait 74 morts et des dizaines de blessés lorsque des centaines de supporteurs avaient envahi le terrain et lancé des projectiles vers ceux d'Al-Ahly.

UNE SOLUTION GLOBALE, RECLAME L'OPPOSITION

Pour autant, l'opposition, regroupée au sein du Front du salut national (FSN), a réclamé une «solution globale» à la crise politique actuelle, avec une proposition pour la formation d'un «gouvernement de salut national». Sinon, l'opposition boycotterait les législatives prévues en principe en mars ou avril, à une date encore à définir, et réclamerait une présidentielle anticipée alors que M. Morsi n'est en fonction que depuis sept mois. Depuis novembre dernier, le président Morsi fait face à une vive opposition des partis laïcs, qui lui demandent d'ouvrir un peu plus le champ politique, une année après la chute de Moubarak, et de limiter ses pouvoirs exceptionnels. Des manifestations ont été organisées dans plusieurs villes du pays, à l'occasion de la «Journée de la Révolution», notamment Le Caire, Alexandrie et Suez. En gros, les manifestants accusent le pouvoir et le président M. Morsi d'avoir trahi la «révolution» qui leur a permis d'accéder au pouvoir grâce à une élection présidentielle pour la première fois démocratique. Hier samedi, les autorités égyptiennes avaient organisé, face à une situation chaotique sur le plan sécuritaire, à une réunion du Conseil national de défense, consacrée à la sécurité publique.