Les événements
s'accélèrent en Europe. Renfort militaire à la France, appel du Parlement
européen à une solidarité avec la France et Conseil des ministres des Affaires
étrangères, ce jeudi à Bruxelles. La question malienne s'internationalise.
Moins d'une
semaine après l'entrée en guerre de la France contre les islamistes armés au
Nord Mali, l'Union européenne est à son tour entraînée dans la bataille sans
aucune perspective politique pour le Mali, du moins pour le moment. Ainsi après
l'Angleterre, le Danemark, l'Allemagne et la Belgique qui se sont engagés, dès
le lendemain de l'offensive française, à fournir armes, munitions, pilotes de
chasse et matériel médical aux troupes françaises, c'est au tour de l'Union européenne
de soutenir l'action de la France au Mali. On s'en doutait bien que dès les
premiers bombardements de l'aviation française de vendredi dernier, les
coulisses diplomatiques de l'Union vivaient une effervescence politique en
continu pour déboucher, mardi dernier, sur une première «manifestation
publique» au sein du Parlement européen (PE). La représentante de la diplomatie
européenne, Mme Catherine Ashton, a été «bousculée» et interpellée par des
députés sur la nécessité d'un engagement concret de l'Union aux côtés de la
France au Mali. Arrivée au PE, mardi en fin de séance à Strasbourg, Mme Ashton
a essuyé les critiques des parlementaires encore présents dans l'hémicycle (à
moitié plein, notons-le). «Vous dites nous sommes engagés avec la France, mais
ce ?nous' ne représente que la France, seule sur le terrain», a résumé
l'eurodéputé français Daniel Cohn-Bendit. Il y va de la crédibilité de l'Union
européenne en rajoutaient d'autres eurodéputés. Désemparée, Mme Ashton a
répliqué qu'elle va nommer, dès ce soir, un représentant spécial pour la crise
malienne et d'ajouter «l'UE a versé plus de 58 millions d'euros d'aide aux pays
du Sahel en 2012». Cet échange au sein du PE traduit clairement l'effet de
surprise au sein de l'Union provoqué par l'entrée en guerre de la France au
Mali. Mais la France dispose d'un argument de taille: «l'urgence» de la
situation au Nord Mali et l'offensive des terroristes d'Aqmi et ses affiliés du
Mujao et d'Ansar Eddine en direction de la capitale Bamako. Du coup, la crise politique
malienne à l'origine de l'occupation du nord du pays par les insurgés
islamistes est reléguée au second plan au profit de la lutte, désormais
«antiterroriste». Le nord et le nord-ouest du Mali se transforment en un nouvel
«Afghanistan» pour la France et l'Europe. Il s'agit de faire barrage aux
terroristes islamistes. On verra plus tard la question politique malienne ainsi
que celle des touaregs. Dans ce sens, les propos du président français,
François Hollande, en déplacement dans les pays des Emirats arabes sont sans
équivoque: «Les terroristes ? Nous les détruirons? et si possible nous les
ferons prisonniers», a-t-il déclaré lors d'une conférence de presse. Le «Nous
les détruirons» traduit la volonté de la France d'aller jusqu'au bout de la
guerre et le temps qu'il faudra. Cependant, s'il faut croire en la volonté de
l'UE d'apporter son soutien logistique et, probablement, humain (troupes au
sol) si la situation se complique sur le terrain des combats, le passage à
l'acte n'est pas aussi simple. Les lourdeurs administratives ajoutées à
l'absence de structures opérationnelles adaptées à ce genre de situation
hypothéqueront, dans l'immédiat, un appui conséquent aux forces françaises
engagées sur le terrain. On verra plus clair lors du Conseil des ministres des
affaires étrangères de l'UE prévu à Bruxelles, ce jeudi, et qui sera consacré
entièrement à la crise malienne. Ainsi, le nouveau président français, François
Hollande, sera comme son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, face à une crise
internationale d'ampleur avec cependant un avantage, celui de la lutte
antiterroriste qui concerne tant l'Europe que le reste du monde. Par ailleurs,
l'Algérie, pays directement concerné par la mise en place d'une stratégie
d'encerclement des groupes terroristes, sera consultée, voire impliquée tant au
niveau du renseignement militaire que sur celui de la tactique militaire au
sol. La connaissance du terrain du Sahel et les habitudes nomades de ses
habitants par l'armée algérienne, son expérience dans la lutte antiterroriste
sont reconnues par les stratèges européens et grandement appréciés. Au final,
l'offensive des islamistes armés de la semaine dernière a fini par pousser à un
consensus international pour affronter l'hydre terroriste gonflée par les
conséquences de la guerre en Libye, guerre initiée au départ par un certain
président français, Nicolas Sarkozy.