La visite qu'effectue depuis hier en Tunisie le ministre de l'Intérieur,
Daho Ould Kablia, a pris la tournure d'une rencontre de haut niveau entre les
responsables sécuritaires algériens et tunisiens, après le démantèlement, en
fin de semaine dernière près des frontières algériennes, d'un groupe terroriste
tunisien. Accompagné d'une forte délégation de son département, le ministre de
l'Intérieur et des Collectivités locales, M. Daho Ould Kablia, a rencontré son
homologue tunisien, M. Ali Larayedh.
Selon une source du ministère de l'Intérieur, cette rencontre porte sur
les moyens de renforcer la coopération entre les deux pays dans les domaines
sécuritaire, de la Protection civile ainsi que la coopération décentralisée.
«Les discussions entre les deux délégations porteront également sur le
renforcement des échanges et le développement des zones frontalières», ajoute
la même source. Pour autant, ce sont surtout la lutte antiterroriste et la
brusque détérioration de la situation sécuritaire en Tunisie avec les derniers
événements de Kasserine, près des frontières algériennes, qui sont au menu de
cette visite de M. Ould Kablia dans une Tunisie menacée par le fléau
terroriste. Avec les événements de Libye d'où sont entrées en Algérie et en
Tunisie des quantités importantes d'armes et de munitions de guerre, les deux pays
sont dorénavant en plein dans une nouvelle menace, la formation de cellules
djihadistes en Tunisie. C'est à peu près dans cette atmosphère préoccupante que
les deux ministres, tunisien et algérien, ont convenu de se rencontrer à Tunis,
à l'invitation, selon le département de M. Ould Kablia, de Ali Larayedh. En
fait, les nouvelles ne sont pas bonnes en Tunisie. Vendredi dernier, Ali
Larayedh avait annoncé le démantèlement d'une «cellule terroriste en cours de
formation» liée à Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). Baptisée «brigade Okba
Ibnou Nafaâ», ce groupe serait dirigé par trois Algériens proches de l'émir
d'Aqmi, Abdelmossab Abdelwadoud, a précisé M. Larayedh lors d'une conférence de
presse. Ce groupe avait pour objectif de perpétrer des attentats en territoire
tunisien contre des institutions publiques notamment sécuritaires, a-t-il
précisé. Des produits explosifs de type TNT, des pistolets et des munitions
ainsi que des cartes géographiques, des tenues de combat, des armes blanches et
des documents codés ont été saisis. Lors de ce coup de filet, le ministre
tunisien a parlé d'«une excellente coordination» entre les autorités
tunisiennes et leurs homologues algériennes ainsi qu'avec les autorités
libyennes pour maîtriser la situation. Une autre cellule djihadiste aurait été,
par ailleurs, démantelée près d'Aïn Draham, un massif forestier à une dizaine
de kilomètres de la frontière algérienne et du poste frontalier d'Al Ayoune.
Déjà, lors de sa visite début décembre à Alger, le chef du gouvernement tunisien,
Hamadi Jebali, avait évoqué la nécessaire coopération entre l'Algérie et la
Tunisie pour lutter contre les réseaux terroristes apparus au grand jour dans
ce pays voisin. Dans une interview à la veille de son départ vers Alger, Jebali
avait souligné que «l'autre dossier d'une importance primordiale est la
question sécuritaire, d'autant que notre région est exposée aux risques du
terrorisme, de l'extrémisme et du trafic d'armes», a-t-il estimé, soulignant
que «grâce à la volonté commune, nous aboutirons à une entente et une
interaction très positive pour les deux pays». Pour lui, la question
sécuritaire se posait de façon «très incessante» dans la région, en raison de
la «montée du terrorisme et du trafic d'armes», avant de préciser que «la
rigueur est de mise» pour «la préservation des frontières» communes. Il a
également relevé la nécessité de la coopération entre les pays voisins dans le
cadre d'«une unité sécuritaire intégrée». Signe évident que les autorités
tunisiennes sont préoccupées par l'apparition du djihadisme et l'installation
de cellules affiliées à Aqmi dans le pays, cette déclaration de M. Jebali: «Il
faut coopérer les uns avec les autres pour dissuader tous ceux qui croient que
cette région est perméable à l'idéologie terroriste ou au trafic d'armes».