Du bout des lèvres, la glorieuse République de France reconnait
comme tragédie, ce que qualifiait jadis l'histoire officielle tricolore de «
ratonnade », et rend hommage à la mémoire des victimes du 17 octobre 1961.
C'est par un communiqué long de trois phrases que François Hollande tient sa
promesse, même par procuration, de reconnaitre des faits longtemps tus par la
propagande socialiste française. La police de Papon, celui-là même qui s'est vu
juger et condamner à dix ans de prison par un tribunal, tout ce qu'il y a de
plus Français, pour avoir joué un rôle dans la déportation des Juifs de
Bordeaux, qui avait pourchassé et massacré des centaines d'Algériens dans les
rues de Paris avant de les jeter dans la Seine. Cet épisode a été tout
simplement zappé de la mémoire collective française avant que Hollande, alors
en campagne présidentielle, ne promette de le réhabiliter. Pour autant
sommes-nous supposés applaudir et pousser des youyous stridents sur les
hauteurs d'Alger dans une réaction folklorique qui sied à notre statut
d'ancienne colonie ? Si cette reconnaissance officielle a déchainé les
passions, exacerbées et exécrables de la droite et de son pendant idéologique
l'extrême droite, nourries par les anciens de l'Algérie française, elle n'en
demeure pas moins qu'un petit pas vers la repentance exigée par les Algériens.
Pas tous les Algériens s'entend, les autres, ceux des vendus, des fils de
harkis, des faux patriotes et de vrais mercenaires, des intellos de second rang
et des comptes en banque ne sont pas concernés. Cinquante et un ans après, la
France vient de murmurer des excuses pas pour 132 ans de colonisation et de ses
bienfaits mais pour une journée seulement. Pour le 17 octobre 1961. Pas un jour
de plus. Ni avant, ni après. C'est à prendre ou à laisser. Voilà. L'Algérie
officielle a tièdement accueillie « les bonnes intentions » de la France,
histoire de lui rappeler qu'il reste un bon bout de chemin à accomplir ensemble
et qu'il faut plus qu'une date pour s'inscrire dans ses bonnes grâces
énergétiques. Pour Paris, la socialiste, ces excuses publiques ne valent que
par leurs portées symboliques et n'engagent en rien la responsabilité du Grand
empire dans ce qu'à vécu l'Algérie depuis le débarquement de Sidi Fredj. Et
pour justement concilier le choux et la chèvre, le choux étant les Algériens
parce qu'ils se font à chaque fois bouffer, les conseillers de Hollande ont
trouvé cette parade de saucissonner ces 132 ans en épisodes reconnus et
célébrés solennellement. Une formule qui devra accompagner le redéploiement
français en Algérie en attendant que De Gaulle, heu? Hollande, s'y rende et
nous gratifie d'un de ces « je vous ai compris » qui ne s'adressait même pas à
nous.