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Carlos Ghosn en clair et net : L'usine Renault en Algérie se fera

par Salem Ferdi

« On n'a pas le choix, on le fera». En peu de mots, dans un entretien au journal le Figaro, très largement centré sur les difficultés de son groupe et la déprime du marché automobile en Europe, le PDG du groupe Renault, Carlos Ghosn, a expliqué pourquoi l'usine automobile en Algérie devra bien se faire. Et au passage, il apporte une réponse positive au souhait des autorités algériennes de voir une partie de la production être exportée.

Dans cet entretien, Carlos Ghosn s'adresse principalement au nouveau gouvernement socialiste, en place en France, pour dresser un constat déprimant de l'état du marché automobile en Europe. Même s'il n'y a pas de plan social prêt, ni de projet en ce sens, le PDG du groupe Renault avertit le gouvernement que des réductions d'effectifs pourraient s'imposer au constructeur. Le gouvernement socialiste qui a reçu, comme un choc, le plan social de Peugeot, est averti que Renault pourrait disparaître du «moins». Les pouvoirs publics français sont invités à améliorer l'environnement économique. Non seulement le marché européen est «vraiment très mauvais» et devrait chuter de 8% en 2012, mais il n'y a pas d'amélioration à attendre en 2013. Selon Ghosn, le principal problème de Renault est sa «compétitivité» en France. «Aucun constructeur n'échappera au renforcement de sa compétitivité dans son pays d'origine», a-t-il déclaré.

DEPRIME EUROPEENNE

«Nous avons un problème de coût du travail et nous avons besoin de flexibiliser le travail, notamment dans l'industrie, nous ne pouvons plus continuer comme cela». «La décroissance des marchés va automatiquement induire une baisse de l'emploi dans les entreprises», a-t-il dit, tout en précisant qu'il n'y a pas de plan de réduction d'effectifs en projet. «Mais nous regardons la situation de manière très prudente». Même s'il souligne que la situation financière de Renault «n'est pas préoccupante», Carlos Ghosn n'en dresse pas moins un constat déprimant sur un marché européen de l'automobile qui pourrait ne retrouver la situation d'avant-crise que dans trois à cinq ans. Cette situation a-t-elle une incidence sur les projets de Renault à l'extérieur, dont celui de l'usine prévue à Oued Tlélat, près d'Oran ? La réponse est non. Carlos Ghosn «espère pouvoir bientôt annoncer l'implantation de Renault en Chine. Ce marché va être un formidable accélérateur de croissance». Sur l'Algérie, le propos est moins enthousiaste -ce qui est normal vu la taille du marché chinois-, mais sans équivoque. Le projet se fera par nécessité de conserver une position importante dans un marché qui n'est pas négligeable. «Nous sommes numéro un des ventes en Algérie. Nous ne pouvons pas ignorer le souhait du gouvernement algérien de se doter d'une usine qui alimenterait le marché local et éventuellement des marchés hors d'Europe. On n'a pas le choix, on le fera. S'il y a une usine en Algérie, nous ferons tout pour qu'elle soit Renault». Carlos Ghosn confirme que son groupe ira vers la construction d'une usine en Algérie en sous-entendant que si Renault n'y va pas, un autre constructeur finira par venir.

ALIMENTER LE MARCHE LOCAL ET EVENTUELLEMENT DES MARCHES HORS D'EUROPE

Aucune allusion n'a été faite sur l'exigence d'une «exclusivité» de cinq ans qu'aurait introduite le constructeur français pour éviter l'installation d'un autre groupe. Certains analystes notent qu'en général, les projets en Algérie ne se font pas rapidement -c'est le cas de celui de Renault-, et que l'exigence d'une exclusivité paraît inappropriée. En revanche, la réponse, presque laconique, de Carlos Ghosn laisse entendre que le contentieux potentiel sur la destination de la production de la future usine a été réglé. Des responsables français avaient laissé entendre que la production de l'usine algérienne était destinée «exclusivement» au marché local. Laurent Fabius, lors de son dernier passage à Alger, avait insisté sur le fait que le projet est «tourné vers le marché algérien. Il ne vient pas concurrencer l'industrie automobile en France.

Si c'était le cas, je pense que l'Etat français dirait non». Mohamed Benmeradi qui était en charge du dossier avait répété que «si le gros de la production est destiné au marché local, une partie des produits devra être, à terme, destinée à l'exportation». Le PDG de Renault va clairement dans ce sens en parlant d'usine «qui alimenterait le marché local et éventuellement des marchés hors d'Europe».