Finalement, l'Algérie va recourir à l'importation de la pomme de terre.
Moins d'une année après le grand stress du manque de ce tubercule et une crise
de l'offre de la pomme de terre qui a fait exploser ses prix à plus de 120 DA
le kilo au plus fort de l'hiver dernier, le ministère de l'Agriculture laisse
entendre qu'il a décidé d'autoriser cette fois encore un programme
d'importation pour pallier l'arrivée tardive de la production d'arrière-saison,
prévue entre fin octobre et fin novembre. Officiellement, ce programme
d'importation de pomme de terre, pompeusement baptisé «d'appoint», ne devrait
pas compromettre la production nationale, et ne s'étalera que dans une courte
période pour répondre au manque de l'offre entre octobre - novembre - décembre,
induite, selon les explications du ministère, par un démarrage tardif des
cultures, vers la mi-août, dans les principales régions de production. Et, pour
ne pas susciter le courroux des producteurs de pomme de terre avec une telle
mesure, le comité interprofessionnel de la filière a été associé à cette
décision du ministère, qui ne fait pas pour autant l'unanimité au sein des gens
de la corporation. «Cette décision a été prise après un long débat et des
concertations entre les différents acteurs de la filière et après s'être assuré
que l'agriculteur ne sera pas atteint», indique le président du conseil
interprofessionnel de la filière, M. Bachir Seraoui.
Pour cette opération, une quinzaine d'importateurs se sont manifestés
pour retirer le cahier des charges qui définit les conditions techniques,
sanitaires et phytosanitaires exigées pour l'entrée sur le marché algérien de
pomme de terre importée. Il y a notamment le fait que le tubercule qui sera
importé doit être issu de la production de l'année 2012, d'un calibre entre 45 et
75 mm et muni d'un certificat phytosanitaire contre les maladies de quarantaine
en plus d'un certificat anti-OGM, et les premières quantités de pomme de terre
arriveront durant la première semaine d'octobre. Dans une intervention
radiodiffusée la semaine dernière, M. Rachid Benaïssa, en charge du département
de l'agriculture, avait confirmé que ces importations d'appoint ne doivent pas
dépasser les 2% de la production actuelle, qui avoisine les 4 millions de
tonnes par an et seront confiées à des importateurs reconnus. En 2007, des
importateurs, sollicités par le ministère, avaient inondé le marché national de
pomme de terre de très mauvaise qualité, achetée à bas prix. Plus précis, le
ministre de l'Agriculture ajoute que ces importations devraient également
servir à casser les prix au moment de «soudure» pour éviter la spéculation. M.
Benaïssa ajoutait que»nous devons être vigilants, nous devons protéger la
production nationale et ne pas la remettre en cause mais nous devons également
éviter toute spéculation». Pour lui, le début de flambée des prix de la pomme
de terre constatée ces derniers jours sur les marchés est dû à un retard de la
production et non pas à la baisse de production, avant d'affirmer que son
département allait agir pour les préserver dans une fourchette de 35 - 55 DA le
kg. Sauf que l'annonce de ces importations, qui ne devraient pas dépasser les
2% de la productionnationale, estimée à 4 millions de tonnes, intervient au
moment où les prix de la pomme de terre commencent à décoller sur l'ensemble
des marchés de détails et de gros, avec une moyenne de 50 DA le kilo au détail
dans les grandes villes. Les autres produits du panier de la ménagère restent
également hauts, avec des poivrons à plus de 120 DA/kg, des aubergines à plus
de 60 DA/kg, l'oignon entre 25 et 30 DA/kg ou la tomate à plus de 50 DA/kg. En
fait, tous les produits agricoles frais enregistrent une reprise de la hausse
des prix, une tendance que le ministère de l'agriculture ne parvient pas à
maîtriser, quand il n'invoque pas le manque de produits agricoles sur le
marché, et, à ce rythme il faut aller également importer des aubergines, des
lentilles, des haricots... etc. Beaucoup ne sont pas loin de penser, cependant,
que toute cette opération d'importation de pomme de terre n'est qu'une manière
comme une autre d'assurer une «paix sociale» pendant les prochaines élections
locales, prévues fin novembre, période durant laquelle est attendue la
production d'arrière-saison.