|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Rien de nouveau dans la position française à propos du dossier nord
malien si ce n'est sa réitération d'apporter « un soutien logistique » à une
éventuelle intervention militaire dans la région. Officiellement, le discours
de Paris reste inchangé même si la menace d'Aqmi de tuer des otages français
pèse lourdement dans la balance. Paris, tout en affichant son refus de voir se
former un «Etat terroriste ou islamique» au Sahel, avait clairement appelé,
dans un premier temps, les pays frontaliers du Mali, à l'image de l'Algérie, la
Mauritanie ou encore du Niger ainsi qu'aux Etats de la Communauté des Etats
d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), de sous-traiter une opération militaire dans
cette région, avec son aide logistique. «Je ne pense pas que ce soit à la
France d'intervenir militairement» mais qu'elle « est prête à aider mais elle
ne peut pas être leader pour un certain nombre de raisons qui appartiennent
d'ailleurs à l'histoire coloniale de la France», avait déclaré Nicolas Sarkozy
à l'Elysée, à l'époque. Cette question malienne s'était invitée à la
présidentielle française puisque le socialiste François Hollande, dans un
entretien au journal ?Libération', tout comme Sarkozy, a exclu toute
intervention militaire française au Mali, appelant les Africains à le faire.
Devenu chef de l'Etat, le socialiste annonçait fin-août, que la France
appuierait «logistiquement cette intervention » si elle était organisée «dans
le cadre de la légalité internationale ». Le ministre français de la Défense,
Jean-Yves Le Drian, interrogé sur une possible intervention armée, a estimé
qu'«il y a un processus qui a déjà été initié puisque le président du Mali a
fait appel à ses voisins regroupés dans la Cédéao pour qu'ils l'aident à
reconquérir le nord ». Il évoquera l'intervention de François Hollande à propos
de cette initiative, à New York, la semaine prochaine, lors de l'Assemblée
générale de l'ONU. Pourtant, cette unité de vision reste tributaire du
fléchissement du Mali dans sa démarche en direction de la Cédéao. En effet, la
Communauté a demandé à Bamako de revoir sa copie pour permettre une
intervention armée ouest-africaine dans le nord du Mali. Deux des conditions
exigées par le président par intérim du Mali, Dioncounda Traoré, semblent poser
problème, à Abidjan, pour une entrée en guerre effective dans cette région du
Sahel. Si le Mali cherche un appui logistique et une présence «policière » des
troupes de la Communauté, la Cédéao veut, par contre, un engagement total sur
le terrain des opérations militaires. Bamako s'oppose donc à une présence
d'unités combattantes à Bamako, sur son sol allant contre les propositions de
la Cédéao qui veulent, à travers une présence militaire dans la capitale
malienne, sécuriser les institutions de transition.
La Communauté des Etats de l'Afrique de l'Ouest après avoir condamné fermement le coup d'Etat qui a renversé le président malien Amadou Toumané Touré, attend toujours de Bamako l'organisation d'élections. Dioncounda Traoré a aussi souligné qu'il ne veut pas que des troupes ouest-africaines s'engagent dans les combats mais qu'elles se confinent à un soutien logistique et aérien, ainsi qu'une participation au maintien de l'ordre, une fois les villes du Nord reconquises. La Cédéao, qui a mobilisé 3.300 soldats pour la circonstance, estime qu'une aide à la formation de l'armée malienne et un appui logistique et aérien ne sont pas suffisants et que ses troupes ne doivent pas être confinées dans une position passive. Mais gageons que la pression de capitales occidentales va faire fléchir la position de Bamako et que la prochaine étape devra être l'examen d'un projet de loi par le Conseil de sécurité des Nations unies. Pour rappel, un premier projet de la Cédéao a été jugé beaucoup trop imprécis au Conseil de sécurité de l'ONU. Ce scénario est rendu d'autant plus crédible que le poids de Washington devra plus jouer cette fois-ci. En effet, en juin dernier, lors d'une audition au Congrès, le secrétaire d'Etat adjoint, chargé des questions africaines, Johnnie Carson, avait apporté son appui à la Communauté en estimant, toutefois, que ce contingent devrait plutôt sécuriser le sud du pays et ne pas s'aventurer dans le nord. La position des Etats-Unis s'appuie alors sur l'affaiblissement de l'armée régulière malienne qui a perdu la moitié de son équipement après avoir été défaite militairement, fin mars, par la rébellion touareg. Par ailleurs, M. Carson met en doute les capacités militaires de la CEDEAO, soulignant qu'une éventuelle mission, dans cette partie du pays, devrait être préparée très soigneusement et disposer de ressources en conséquence. Les observateurs estiment que la Communauté aura besoin d'un appui notamment logistique des Etats-Unis et de la France. Devant les parlementaires américains, M. Carson a encouragé les Maliens à régler leurs problèmes, plaidant pour une solution politique et appelant à un gouvernement légitime. Qualifiant AQMI et Ançar Eddine de «dangereux» et «mortels», le responsable de la diplomatie américaine estime qu'il ne faut pas fermer les portes du dialogue aux forces en présence, faisant sans doute allusion au Mouvement national de libération de l'Azawad, le MNLA, pourtant affaibli par la coalition islamiste. Pour lui, même s'ils ne représentent pas directement une menace sur les USA, ces groupes terroristes restent nourris par l'apport d'étrangers venus de pays de la région. Cette rhétorique risque de changer après l'assassinat de l'ambassadeur américain à Benghazi et le Département d'Etat d'évoquer l'implication d'Aqmi dans l'attaque. |
|