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L'Irak a connu dimanche une nouvelle plongée dans la
violence avec une série d'attentats qui ont fait une centaine de morts et plus
de 400 blessés. Le pays qui est demeuré en état de guerre civile larvée après
la montée en cadence des violences qui ont suivi le démantèlement de l'Etat
irakien par les occupants américains connaît un regain de tensions. Une partie
politique dangereuse se joue dans le pays sur la base d'un clivage
confessionnel chiite-sunnite qui tend à se généraliser dans l'ensemble de la
région.
Les attentats sont survenus le jour même où un tribunal condamnait à mort «par pendaison» le vice-président irakien (sunnite) Tarek Al-Hachemi qui se trouve en Turquie. Il avait été jugé sous l'accusation d'avoir commandité le meurtre d'un général, d'une avocate et de dizaines d'autres meurtres. L'affaire est purement politique, affirme Al-Hachemi qui accuse le Premier ministre (chiite) Nouri Al-Maliki de dérive despotique et de menacer l'avenir de l'Irak. Il est difficile de se prononcer sur les accusations et contre-accusations, certains faisant remarquer que presque tous les dirigeants politiques de ce pays ont du sang sur les mains. Mais il reste à constater factuellement que le fait que le Premier ministre en place a fait soudainement bouger cette affaire après l'avoir gelée pendant trois ans le rend suspect de se livrer à une manipulation de la justice. Ses adversaires ne se privent pas de le relever. Ce règlement de compte politique est un mauvais service rendu à l'Irak. Tous les efforts d'apaisement des tensions confessionnelles sont remis en cause. Alors que les institutions mises en place tant bien que mal ne fonctionnent pas, en tout cas pas sur la base de règles claires, et que le Nord kurde est en quasi-indépendance, les jeux de basse politique qui se déroulent à Baghdad mettent du kérosène sur des feux pas éteints. Les partisans d'Al-Maliki se sont empressés de faire un lien entre les attentats et le jugement de Tarek Al-Hachemi. Certains n'hésitent pas à sauter le pas en l'accusant de les avoir commandités. En réalité, à force de jouer constamment avec le feu, on finit par allumer des incendies sans fin. Le président irakien Jalal Talabani en convalescence en Allemagne n'a pas tort de souligner que la condamnation à mort «par pendaison» de Tarek Al-Hachemi n'apportera rien de bon. Elle pourrait «s'avérer être un facteur susceptible de déstabiliser les efforts fournis pour parvenir à la réconciliation nationale», a-t-il indiqué dans un communiqué. En réalité, la création et l'entretien du clivage «chiite-sunnite» en œuvre depuis plusieurs années à travers les redoutables et très nombreux médias satellitaires qui arrosent - et polluent - la région est en train de fragiliser les sociétés. Il suffit que l'irresponsabilité des politiciens y apporte son obole pour que les choses s'enflamment. Al-Qaïda qui semblait affaiblie en Irak connaît une résurgence remarquable se nourrissant du processus de destruction en cours de l'Etat syrien voisin via le même type de polarisation confessionnelle. Le poison sectaire qui est en œuvre est clairement alimenté par les Etats du Golfe, alliés des Américains, qui veulent affaiblir l'Iran et casser un présumé «arc chiite» qu'ils jugent plus menaçant qu'Israël. C'est un trou noir où des hommes politiques sans conscience sont en train d'enfoncer leurs pays. |
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