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Déçu, Abbas défie Washington

par Kharroubi Habib

S'ils divergent sur la nature des solutions à apporter aux problèmes économiques et sociétaux qui se posent à l'Amérique rongée par la crise et sur la façon dont leur pays doit agir pour conserver son statut de puissance hégémonique au plan de la gouvernance mondiale, les démocrates et les républicains américains se rejoignent s'agissant de l'appui inconditionnel à la cause de l'Etat d'Israël. Sur ce point, ils sont en totale convergence.

Qu'il y ait donc alternance ou pas à la Maison Blanche en novembre prochain, les Palestiniens se feraient illusion en espérant que le locataire du bureau oral imprimera un sens plus équilibré à la politique américaine concernant le conflit palestino-israélien. Ce que le candidat démocrate Barack Obama et celui des républicains Mitt Romney ont exprimé et promis sur le sujet devant les conventions d'investiture de leurs partis respectifs, le leur a clairement fait comprendre. Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne, ne s'est pas quant à lui trompé de lecture sur le fond du message délivré à son peuple par les deux aspirants à la prochaine présidence de l'Amérique. Il a compris que les Palestiniens ont été invités à renoncer à la création de leur Etat national et y a réagi en réaffirmant la détermination de l'Autorité qu'il préside à repartir devant l'Assemblée générale de l'ONU pour réclamer l'adhésion de la Palestine en tant qu'Etat membre.

Initiative à laquelle, on le sait, s'opposent Américains et Israéliens au motif que seules des négociations directes entre Palestiniens et Israéliens pourraient déboucher sur la création et la reconnaissance internationale de cet Etat palestinien. Or l'horizon est bouché pour de telles négociations, leur reprise étant bloquée par le refus d'Israël d'arrêter le processus de colonisation des territoires palestiniens occupés. Ni Barack Obama ni Mitt Romney n'ont soufflé mot sur la responsabilité de l'Etat d'Israël dans cette situation d'impasse dans laquelle se trouve le processus de paix au Proche-Orient. Au contraire, ils ont pris des engagements et fait des promesses qui confortent le gouvernement israélien à poursuivre sa politique visant à rendre impossible la solution des deux Etats prônée par l'écrasante majorité de la communauté internationale et acceptée par les Palestiniens.

Il était naïf d'attendre du président américain sortant Barack Obama qu'il s'éloigne dans l'exercice de son mandat de la politique d'alignement inconditionnel de son pays sur celle de l'Etat sioniste. Il a eu quelque velléité d'opposition à l'égard de Benyamin Netanyahu sur des points de détail, jamais sur le but final de l'objectif visé par ce dernier à savoir réduire à néant la possibilité de création aux côtés d'Israël d'un Etat palestinien viable souverain et aux frontières internationalement reconnues. Il s'est néanmoins très vite aplati et lui a prodigué un soutien multiforme qui a transformé la médiation américaine dans le dossier palestino-israélien en une opération de pression unilatérale sur l'Autorité palestinienne. Aux yeux des lobbys sionistes en Amérique, l'adhésion d'Obama au dessein d'Israël est restée malgré cela sujette à caution. Ce qui l'a obligé à faire dans la surenchère en terme de mesures et promesses favorables à Israël pour tenter de lever leur prévention à son égard. Son rival Mitt Romney ne lui a pas laissé un grand espace pour cet exercice. Lui a tout promis à l'Etat d'Israël en subordonnant les intérêts nationaux de l'Amérique à ceux de ce dernier.

Il doit être clair pour les Palestiniens qu'ils n'ont plus rien à attendre de cette Amérique qui va voter en novembre prochain. Ce que Mahmoud Abbas a fait savoir en la défiant par la remise à l'ordre du jour du recours palestinien auprès des Nations unies.