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Sans dépenses publiques, pas de croissance : Djoudi prône la prudence

par Salem Ferdi

L'Algérie aura en 2013 un budget de «prudence» et non pas un budget d'austérité. Le ministre algérien des Finances, M. Karim Djoudi, joue un peu sur les mots mais il n'a pas tort de faire la différence entre la «rigueur» et la «prudence».

Le terme de «rigueur» que les gouvernements occidentaux répugnent à utiliser renvoie le plus souvent des mesures de réduction drastiques des dépenses publiques. Dans le cas de l'Algérie, il est surtout question de réduire la voilure et de contenir l'accroissement des dépenses. «Il n'y aura pas de programme de rigueur au sens économique du terme. Il y aura plutôt une gestion beaucoup plus prudente», a déclaré M. Djoudi à la presse lors d'un symposium des banques centrales africaines qui se tient à Alger. Sans entrer dans le détail, le ministre des Finances a tenu à souligner qu'il existe des dépenses incompressibles qui seront maintenues. Il n'y aura pas de coupes dans les transferts sociaux et le soutien des prix des matières premières sera maintenu. Sans surprise, dans une Algérie à la croissance molle portée quasi exclusivement par la dépense publique, il n'est pas question d'y renoncer. C'est l'état même de l'économie algérienne qui l'impose. Trop réduire les dépenses porterait un coup à une croissance qui n'a rien de bien réjouissant.

LE POIDS DE L'INVESTISSEMENT PUBLIC

L'investissement public est le seul qui crée de la croissance et de l'emploi et il sera maintenu dans le budget 2013. «L'économie ne tire sa croissance, ne crée de l'emploi, ne distribue les revenus que s'il y a une demande publique forte. Si on devait la réduire, elle aura un impact immédiat sur la vie des entreprises et l'emploi». Certes, la Banque d'Algérie a mis en garde récemment contre l'expansion de la dépense publique en relevant qu'il faudra un baril à 110 dollars pour préserver l'équilibre budgétaire. Le ministre de l'Energie, Youcef Yousfi, avait contribué à l'alarmisme en estimant à 20 milliards de dollars le manque à gagner du fait de la chute des prix du pétrole. Karim Djoudi a déjà répondu sur le même registre : pas d'alarmisme, ni d'austérité, mais prudence.» La tendance baissière du prix du pétrole nous inquiète et nous impose d'être prudents mais nous ne devons pas perdre de vue deux éléments importants: nos dépenses effectives constatées en fin de l'exercice sont basées sur un baril à 75 dollars et nos capacités de financement cumulées, grâce au FRR, aux réserves de change et au remboursement de la dette, sont considérables», avait-il déclaré. Il avait également insisté sur le fait que la dépense publique est le «moteur de la croissance» en Algérie. «Si nous avions attendu que la croissance soit générée par le secteur privé, on aurait jamais eu le nombre d'entreprises qui sont créées, ni le nombre d'emplois, ni de revenus distribués», a-t-il indiqué. Ce qu'il faut, a estimé, hier, Karim Djoudi, c'est «trouver le point d'équilibre d'une politique prudente en matière budgétaire et la nécessité de conserver la croissance économique, de l'emploi et de l'activité économique». En clair, le programme d'investissement en cours doit être achevé et il sera complété par des «projets nécessaires au développement du pays».

LA FAIBLESSE DU PRIVE

Le ministre a nié, par ailleurs, des informations parues dans la presse sur les restrictions à la création d'emplois dans le secteur public. Tous les nouveaux investissements publics réceptionnés vont bénéficier de postes budgétaires et de ressources de fonctionnement. Pour le ministre, le budget de fonctionnement de 2013 devrait aller vers la baisse par rapport à celui de 2012 qui a été gonflé par les rappels de salaires. 2.850 milliards de DA (environ 39 milliards de dollars) ont été consacrés aux augmentations de salaires pour certaines catégories de personnels. Le gouvernement a fortement puisé dans le Fonds de régulation des recettes (FRR) pour financer le déficit budgétaire. Les prélèvements sur le FRR ont été de 1.761,4 milliards (mds) de DA contre 791,9 mds de DA en 2010. Le déficit budgétaire a atteint l'équivalent de 15% du PIB, soit 2.255,8 milliards de dinars. La «prudence» plutôt que la «rigueur» est de mise. L'importance démesurée de la dépense publique pour la croissance est le reflet d'une économie où les opérateurs économiques privés sont absents, où les investissements privés sont faibles voire inexistants.