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Syrie : Les conditions de Damas

par Yazid Alilat

La mission du médiateur de l'ONU et de la Ligue arabe dans le conflit syrien, le diplomate algérien Lakhdar Brahimi, s'est compliquée un peu plus dimanche, au lendemain d'un sanglant assaut de l'armée syrienne contre une localité proche de Damas où le nombre de morts serait de plus de 300 personnes. Dimanche, après avoir reçu un émissaire iranien, le ministre syrien des Affaires étrangères Walid Mouellem, a affirmé que son pays n'entamerait pas de négociations avec l'opposition tant qu'il n'aura pas été «purgé» des rebelles. Dans des propos rapportés par l'agence iranienne ?'IRNA'', il a souligné que ?'le projet de négociations entre le gouvernement syrien et l'opposition ne commencera qu'après que la Syrie sera purgée des groupes armés». Pour le régime de Bachar Al Assad, qui n'a plus, en fait, sa destinée en main, le conflit s'étant internationalisé avec de dangereuses ramifications sur le Liban voisin, la condition pour que débutent des négociations avec l'opposition ?'est que cessent les violences des groupes armés et qu'une déclaration soit faite pour exprimer l'opposition à toute intervention militaire étrangère en Syrie». Cette affirmation de Mouellem complique, dès le départ, la mission de Lakhdar Brahimi, car cette condition de la cessation des combats, imposée à l'opposition, peut être également la même que posera sur la table l'opposition, avant toute discussion pour un règlement politique de la crise syrienne qui a déjà fait plus de 25.000 morts et plus de 200.000 réfugiés, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).

Pour le moment, le nouveau médiateur de l'ONU n'a pas encore fait de commentaire sur sa manière d'entamer sa mission, mais est en train de discuter avec les responsables des pays occidentaux sur leur manière de concevoir l'avenir politique de la Syrie et l'ouverture d'une solution à cette crise qui risque d'embraser tout le Moyen-Orient. Et, le danger que redoutent les observateurs, est que le pays ne plonge dans une sanglante guerre sans fin, alimentée par des clivages ethnico-religieux avec des effets immédiats sur la sécurité des pays voisins, dont le Liban tout proche.

La mission de M. Brahimi prend, ainsi, toute sa profondeur pour éviter que la crise syrienne ne fasse tache d'huile dans la région, même si pour le moment les membres du Conseil de sécurité restent divisés sur les mécanismes à mettre en place pour ramener le conflit syrien dans une trajectoire plus gérable. Lakhdar Brahimi devra ainsi trouver des appuis dans le camp occidental et russo-chinois, au sein du Conseil de sécurité pour poursuivre son travail.

Les combats à Damas et surtout à Alep n'ont pas baissé d'intensité, au moment où des informations relayées par des agences de presse, citant l'OSDH, font état de la mort de plus de 300 personnes à Daraya, un village situé à quelque 7 km de la capitale syrienne. Au moins 320 corps ont été retrouvés, selon l'OSDH, qui a indiqué que la majorité des victimes ont été tuées dans l'opération militaire lancée il y a cinq jours. Des vidéos montrent des dizaines de corps ensanglantés gisant au sol, dans un complexe proche d'une mosquée, affirment des militants anti-régime, dénonçant un «massacre odieux commis par les gangs du régime d'Assad». «Le régime criminel a imposé un blocus et coupé les approvisionnements vers Daraya, puis a bombardé, sans discernement, avec des avions et des armes lourdes. Des bandes criminelles ont mené, par la suite, des exécutions sommaires, des victimes ont été démembrées et brûlées», indiquent des militants syriens. Et puis «les chabbibas (milices pro-régime) se sont transformés en machines à tuer en série», dénoncent, pour leur part, les comités locaux de coordination (LCC), un large réseau de militants sur le terrain. Une vidéo a été ensuite diffusée dimanche, montrant des fosses communes où sont ensevelis des dizaines de corps, dont au moins ceux de deux petits enfants.

L'agence «Sana» rapporte de son côté que les forces armées ont «purifié» Daraya des «terroristes mercenaires qui ont commis des crimes contre les habitants de la localité, les ont terrorisés et ont détruit les propriétés publiques et privées». Des ONG locales des droits de l'Homme et l'opposition ont déjà fait état de massacres commis par les forces du régime en place, notamment à Houla (Centre) en mai (108 personnes dont une cinquantaine d'enfants) et Al-Koubeir (Centre) en juin (55 personnes dont des femmes et des enfants). A chaque fois, Damas a démenti toute implication, accusant des «gangs terroristes armés». A Alep, les combats restent toujours très intenses, alors que la ville, qui se vide inéluctablement de ses habitants, commence à devenir un amas de ferraille et de béton sous la violence des bombardements des positions de la rébellion par l'aviation du régime.