Coup de théâtre, lundi, en Syrie avec l'annonce officielle du limogeage
du Premier ministre, Riad Hidjab, alors que pour l'opposition, il s'agit plutôt
d'une défection. «Riad Hidjab a été démis de ses fonctions de Premier
ministre», a indiqué dans un bandeau la télévision syrienne. Pour l'opposition,
cependant, il s'agit en fait d'une défection de Hidjab, qui aurait rejoint les
rangs de la rébellion. Un coup dur pour le régime. L'opposition syrienne
annonce depuis plusieurs jours plusieurs défections qui touchent
particulièrement les hauts gradés de l'armée syrienne. Pour la première fois,
un ?'politique'', proche d'entre les proches de Assad, se retourne contre le
régime. «Il a fait défection», a affirmé Rami Abdel Rahmane, chef de
l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), après l'annonce de la
télévision sur la démission de l'ex-Premier ministre syrien. Dans un communiqué
lu en son nom, à Amman, par son porte-parole, M. Otri, le Premier ministre
syrien a déclaré: «J'annonce aujourd'hui que j'abandonne ce régime terroriste
et criminel et que je rejoins les rangs de l'opposition pour la liberté et la
dignité. J'annonce aujourd'hui que je suis un soldat de la sainte révolution''.
Dans son préambule, il a affirmé que la Syrie passait par des «circonstances
terribles marquées par les pires crimes de guerre, de génocide contre un peuple
sans armes». Originaire de la province de Dar Ezzour, ancien ministre de
l'agriculture, il a été nommé en mai dernier chef de gouvernement à l'issue des
élections législatives, boycottées par l'opposition. Selon des agences de
presse, M. Hidjab aurait fui la Syrie en compagnie de plusieurs membres de sa
famille, ainsi qu'avec deux ministres et des officiers de l'armée. L'identité
de ces ministres n'a pas été donnée, ni le lieu en Jordanie où se serait réfugié
l'ex-Premier ministre syrien. La défection du Premier ministre syrien, Riad
Hidjab, pour rejoindre l'opposition, montre «à quel point l'érosion du régime
de Bachar Al-Assad est avancée», a estimé hier le ministre allemand des
Affaires étrangères, Guido Westerwelle. «Ces évènements confirment aussi à quel
point sont nécessaires une cessation immédiate des violences et la formation
d'un gouvernement de transition sans Assad», a-t-il déclaré dans un communiqué.
A Damas, aucune autre précision sur le limogeage de Hidjab, annoncé par la
télévision, n'a été fait sur les raisons d'une telle décision. Mais pour
l'opinion internationale, il s'agit bien d'un des plus importants coups portés
au régime de Bachar Al-Assad. Pour l'opposition, c'est bien le signe que le
régime ?'se désagrège''. «Cette défection signifie que le régime se désagrège.
C'est le début de la fin», estime un responsable de l'opposition. De leur côté,
les Etats-Unis cherchent «à confirmer ces informations. Si cela est vrai, ces
défections constitueraient une preuve supplémentaire que le régime d'Assad
s'effondre», estime un responsable américain en Afrique du Sud, où la
secrétaire d'Etat Hillary Clinton est en déplacement. Selon son porte-parole,
Riad Hidjab devrait se rendre à Doha, au Qatar, dans les prochains jours.
L'annonce du départ de Hidjab et son remplacement par Omar Ghalawandji ont
coïncidé avec un attentat à la bombe qui a visé le siège de la radiotélévision
syrienne, selon le ministre syrien de l'Information, Omrane Al-Zohbi. «Une bombe
a explosé au troisième étage du bâtiment de la radiotélévision syrienne faisant
des blessés», a précisé le ministre. Les programmes n'ont pas été interrompus.
Le bâtiment se trouve sur la place des Omeyyades, dans un quartier
ultra-protégé de la capitale. Pour pénétrer dans l'immeuble, il faut passer
plusieurs contrôles des services de sécurité. Cet attentat intervient avec une
reprise des combats à Damas, alors qu'à Alep, les deux camps se préparent à une
bataille décisive pour la prise de la ville. Sur le front politique, l'Iran,
qui prône une solution négociée à la crise syrienne, et appelle les deux
parties à discuter une sortie rapide et éviter les violences, a convié dix pays
à une réunion urgente sur la Syrie. Selon le vice-ministre iranien des Affaires
étrangères, Téhéran va organiser jeudi une «rencontre consultative» des pays
ayant une «position réaliste» sur la Syrie. Une rencontre consultative sur la
Syrie en présence d'un certain nombre de pays ayant des positions réalistes
sera organisée jeudi à Téhéran», a déclaré M. Hossein Amir-Abdollahian,
ajoutant que dix pays ont donné leur accord pour participer à cette rencontre
«à des niveaux différents», sans nommer ces pays. «La République islamique
d'Iran estime que l'arrêt total de la violence et un dialogue national sont la
solution pour mettre un terme à la crise en Syrie et à cette fin, l'Iran
organise cette rencontre», a-t-il ajouté. L'Iran, la Russie et la Chine sont
les plus importants soutiens de Damas, qui compte également d'autres soutiens
au sein de la Ligue arabe.