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Le ministre syrien
de la Défense et le beau-frère du président Bachar Al-Assad ont été tués, hier,
dans un attentat kamikaze qui a ciblé un bâtiment de la Sécurité nationale dans
le quartier de Rawda. C'est le signe d'une aggravation du conflit. Une escalade
vers la guerre totale.
Le régime, touché au plus haut niveau, ne laissera probablement pas sans riposte cette attaque qui soulève des questions sur la porosité du dispositif de sécurité entourant une réunion qui a rassemblé des hauts responsables de la sécurité. La mort du ministre syrien de la Défense, Daoud Rajha, a été rapidement confirmée de source officielle. Militaire et chrétien, chef adjoint de l'armée et vice-président du Conseil des ministres, le profil du ministre de la Défense est tout un symbole dans une Syrie déchirée, incapable sous le double effet de l'indisponibilité des acteurs syriens et du grand parasitage extérieur à ébaucher une solution à la crise. Le beau-frère du président, Assef Chaoukat, l'un des principaux responsables de la sécurité dans le pays, a été aussi tué dans l'attentat. Le poste de ministre de la Défense a été immédiatement pourvu et Fahd Al-Freij désigné. L'attaque-suicide, probablement menée par un djihadiste sunnite, ne peut qu'aggraver la dérive communautaire et confessionnelle du conflit. D'autres ministres et responsables de la sécurité présents dans l'immeuble ciblé par l'attentat ont été blessés, certainement grièvement. Parmi eux, le ministre de l'Intérieur, Mohammad Ibrahim Al-Chaar, le chef de la Sécurité nationale, Hicham Ikhtiar, et Hassan Turkméni, adjoint au vice-président. «NETTOYER LE PAYS DES TERRORISTES» En désignant le nouveau ministre de la Défense, Fahd Al-Freij, le pouvoir syrien a annoncé son programme avec une concision guerrière : «nettoyer le pays des terroristes». Un communiqué lu par la télévision d'Etat indique que l'attentat «à la bombe terroriste» était l'œuvre de «mercenaires» et a promis d'en finir avec les «bandes criminelles». L'état-major de l'armée syrienne, directement ciblée par l'attentat, a affirmé que les troupes de l'armée étaient «plus déterminées que jamais» à mettre en échec «toutes les formes de terrorismes» et à «amputer ceux qui nuisent à la sécurité nationale». «Quiconque pense pouvoir tordre le bras de la Syrie en ciblant certains commandants se fait des illusions», indique le communiqué de l'armée. L'attentat a fait l'objet de deux revendications. La première émane de l'ASL (Armée syrienne libre) qui a affirmé qu'il s'agissait du «volcan» qu'elle annonçait après le début des attaques à Damas. «Voici le volcan que nous évoquions, ce n'est que le début», a déclaré le colonel Kassim Saadedine, porte-parole de l'ASL. L'autre revendication émane d'un groupe islamiste, le Lioua Al-Islam, «La brigade de l'islam», qui affirme «avoir ciblé la cellule nommée à la salle de contrôle de crise dans la capitale damascène». Une autre version, invérifiable et à prendre avec prudence, affirme que le kamikaze auteur de l'attentat serait un garde du corps appartenant au cercle proche du pouvoir qui a actionné sa charge explosive en pleine réunion de ministres et de responsables militaires et de sécurité. FINANCEMENT «PRIVE» SAOUDIEN ET QATARI L'ASL, composée en bonne partie de déserteurs de l'armée régulière et d'autres groupes armés sont fortement financés et armés par les Saoudiens et Qataris. Officieusement, on suggère qu'il s'agit de donateurs «privés», ce qui suscite des haussements d'épaules chez les observateurs. Les Occidentaux prétendent se contenter de fournir du matériel de communication aux insurgés mais ces assertions sont plus que douteuses. Ce qui est certain est que la rébellion améliore son armement qualitativement et quantitativement et a réussi à porter les combats dans certains quartiers de Damas. Il y aurait eu au cours de 48 dernières heures plus d'une soixantaine de soldats de l'armée régulière tués dans les combats qui ont eu dans la capitale. UN TOURNANT QUI RESTE A DEMONTRER L'opposition les qualifie de «tournant» et laisse entendre qu'elle serait capable de l'emporter par les armes. Les observateurs sont dubitatifs et attendent la suite des événements. Au niveau international, les Occidentaux ont condamné avec beaucoup de mollesse - c'est un euphémisme - l'attentat y voyant surtout une raison de plus d'accélérer l'adoption d'une résolution du Conseil de sécurité par l'Onu. «L'attentat que nous condamnons, confirme le besoin urgent d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies», a déclaré William Hague, le chef de la diplomatie britannique. Même tonalité à Paris où Laurent Fabius a déclaré que le «gouvernement français, sans connaître les circonstances de cet attentat, a toujours porté condamnation du terrorisme. Mais compte tenu (du) degré de violence, cela rend d'autant plus nécessaire et urgent le fait de trouver une transition politique qui permette au peuple syrien d'avoir un gouvernement qui exprime ses aspirations profondes». La Russie et la Chine opposeront leur veto à un projet de résolution occidental menaçant Damas de sanctions qui devait être mis au vote mercredi. Le ministre des Affaires étrangères russe Sergueï Lavrov a relevé que des «combats décisifs sont en cours en Syrie. Et l'adoption de la résolution serait un soutien direct à un mouvement révolutionnaire. S'il est question d'une révolution, l'Onu n'a aucun rapport avec ça». |
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