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La bataille du Parlement en Egypte

par Kharroubi Habib

Des partisans du président élu égyptien Mohamed Morsi dont l'investiture se déroulera ces jours-ci, continuent d'occuper la place Tahrir en exigeant que les militaires rétablissent leur héros dans les pouvoirs présidentiels que le Conseil suprême des forces armées s'est attribués en promulguant des lois en ce sens après avoir dissous le Parlement où les islamistes Frères musulmans et salafistes détenaient la majorité. De son côté, Morsi a, dit-on, engagé avec le CSFA des négociations en vue de parvenir à un compromis acceptable pour les deux parties.

Le point crucial qu'il veut régler avec les militaires c'est le sort du Parlement dissous. Il veut en effet obtenir sa réhabilitation sans que cela donne lieu à de nouvelles élections législatives. De telles élections seraient en effet à risque pour le président élu et le mouvement des Frères musulmans dont il est issu. Et c'est bien ainsi que l'ont voulu les militaires. Car ils ont pris la mesure de l'érosion de la popularité des islamistes conséquemment aux comportements de leurs élus dans la commission parlementaire qui avait été en charge de la rédaction de la nouvelle Constitution égyptienne.

Par ailleurs, le président élu doit certainement redouter qu'arrivé au pouvoir, le temps qu'il faudra pour organiser de nouvelles élections législatives va être révélateur aux yeux des Egyptiens de son impuissance à maîtriser les problèmes dans lesquels se débat le pays. De quoi appréhender effectivement et à juste titre que les Frères musulmans qui sont ses partisans ne puissent renouveler la performance électorale qu'ils ont réalisée aux législatives précédentes. Il en a eu l'indice avec le score qu'il a réalisé lui-même à l'élection présidentielle. Candidat des Frères musulmans mais soutenu aussi par les salafistes et même par une frange de la nébuleuse que constituent des artisans de la révolution de janvier, laïcs, libéraux et antimilitaristes, il n'a battu son rival Ahmed Chafik que d'une courte tête. Ce conglomérat qui a contribué à sa victoire, il sera impossible aux Frères musulmans de le maintenir à leur avantage pour de nouvelles élections législatives.

Les militaires vont très certainement lui concéder quelques satisfactions en terme de pouvoir, mais pas celle du retour de l'assemblée dissoute. Et sur ce point, ils ne seront pas en « délicatesse » avec les véritables artisans de la révolution de janvier et des forces politiques qui ont eu à jauger des intentions des islamistes durant le bref laps de temps où ils ont occupé le Parlement égyptien. Ils n'ont pas non plus à craindre de pressions sur ce sujet de la part des alliés occidentaux de l'Egypte. Lesquels ne verraient pas d'un mauvais œil l'organisation de nouvelles législatives susceptibles d'amener un nouveau rééquilibrage des rapports de force au sein du Parlement égyptien moins marqué en faveur des islamistes

Apparemment Mohamed Morsi a opté pour prouver qu'il veut être le président élu de tous les Egyptiens. Il ne peut convaincre que s'il démontre qu'il peut emmener les Frères musulmans à reconsidérer dans un sens plus acceptable pour l'ensemble de la société égyptienne du projet de société qui est celui de leur confrérie et passent sur cette base des alliances politiques avec des forces et formations qui ne sont pas islamistes. L'on aura un indice qu'une recomposition politique dans ce sens est possible en Egypte quand le président élu annoncera qui il va nommer comme Premier ministre et quelles sont les forces et personnalités qui auront accepté de faire partie du nouveau gouvernement.