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La sanglante impasse perdure et contamine le Liban : Assad parle d'une «guerre menée de l'étranger»contre la Syrie

par Salem Ferdi

Le président syrien, Bachar Al-Assad, soumis à d'intenses pressions occidentales et arabes, mais toujours soutenu par Moscou et Pékin, a fait, hier, dans un discours devant le parlement, un constat d'échec de «tous les moyens politiques» en raison d'un «plan de destruction» de la Syrie mené de l'étranger.

La situation d'impasse en Syrie avec une escalade des violences n'est pas prête d'être débloquée 15 mois après le début d'un mouvement de contestation politique qui a fait, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), 13400 morts. La répression et la militarisation de la contestation politique ferment de plus en plus le terrain à toute approche politique. Aucune perspective politique ne se dégageant, le président Bachar Al Assad, est intervenu, hier, devant le parlement issu des dernières élections, pour afficher sa détermination à lutter contre le terrorisme. Selon lui, la Syrie ne connait pas de «crise politique» mais fait face à un projet de sédition (fitna) visant à détruire le pays avec «usage de l'arme du terrorisme». «Nous sommes face à une vraie guerre», a-t-il déclaré en affirmant que le processus de réformes politiques progressait conformément au calendrier mais qu'en parallèle le terrorisme se développait avec force. «Tous les moyens politiques» ont été essayés a-t-il indiqué mais ont échoué du fait «d'une véritable guerre menée de l'étranger». Pour Bachar Al-Assad, les moyens d'affronter cette guerre imposée de l'étranger sont «différents» du traitement des divergences politiques internes. Il est revenu sur le massacre de Houla, dans lequel 108 personnes, dont 49 enfants ont été liquidés, en qualifiant ses auteurs de «monstres». Le massacre de Houla, pour rappel, fait l'objet d'accusations croisées entre le gouvernement et l'opposition.

DES «CHARGES DE MISSION?»

Pour le président syrien, le Conseil national syrien et l'armée syrienne libre (ASL) ne sont pas des interlocuteurs. «Les responsables du terrorisme ne sont pas intéressés par le dialogue ou les réformes. Ils sont chargés d'une mission et ne s'arrêteront que s'ils accomplissent cette mission ou si nous arrivons à les arrêter». La Syrie est «ouverte» à tous les Syriens «quelles que soient leurs opinions», mais «il n'y aura pas de compromis dans la lutte contre le terrorisme et ceux qui le soutiennent? La sécurité de la nation est une ligne rouge». Un discours de fermeté qui intervient alors que le plan de sortie de crise de Kofi Annan peine à être appliqué alors que le médiateur de l'Onu souligne que le «spectre d'une guerre généralisée, avec une dimension confessionnelle alarmante, grandit de jour en jour». Kofi Annan a dit avoir «senti intensément les inquiétudes des voisins immédiats de la Syrie lors de mes consultations au cours des derniers jours». Les violences qui ont fait 14 morts à Tripoli, au Liban entre «sunnites» et «alaouites» illustrent parfaitement les effets collatéraux particulièrement redoutables de la crise syrienne. La propagation de la crise syrienne au Liban n'est plus une hypothèse et dans ce pays où les armes circulent et ne sont pas l'apanage du Hezbollah, cela risque d'être particulièrement détonant. Le ministre des Affaires étrangères saoudien, le prince Saoud Al-Fayçal, a accusé le président syrien Bachar al-Assad de «manœuvrer» pour «gagner de temps», en ignorant le plan de sortie de crise de l'émissaire international Kofi Annan.

RESERVES ALGERIENNES AU RECOURS AU CHAPITRE VII

Face à la situation syrienne, les pays arabes ne sont pas vraiment sur la même ligne. Ainsi l'Algérie, l'Irak et le Liban ont émis des «réserves » au sujet d'une résolution de la Ligue demandant à l'ONU de fixer un calendrier pour l'application du plan de Kofi Annan et à recourir au Chapitre VII de sa charte pour imposer à Damas des sanctions et la rupture des relations diplomatiques. Cette référence au chapitre VII qui permet de prendre des mesures contraignantes y compris une intervention armée a suscité les réserves de l'Irak, l'Algérie et le Liban.

Selon le communiqué de la ligue arabe, il doit permette «la suspension partielle ou totale des relations économiques, des liaisons ferroviaires, maritimes, aériennes, postales, télégraphiques et de télécommunications et la rupture des relations diplomatiques». Le recours au chapitre VII de la charte de l'Onu reste, purement, théorique. Pour qu'il puisse être mis en œuvre, il faudrait l'aval de la Russie et de Pékin qui ont réaffirmé qu'il n'était pas question de permettre une intervention militaire en Syrie sous couverture de l'Onu. Le président russe Vladimir Poutine a maintenu cette position lors de sa visite à Paris et a refusé de suivre le président français, François Hollande, qui a estimé qu'il n'y avait pas de «solution possible» en Syrie sans «le départ» de Bachar el Assad. La Russie s'est dite cependant prête à examiner plusieurs possibilités de coordination ultérieure des activités internationales menées dans le cadre du plan Annan sur la Syrie. Le bouclier russo-syrien contre l'idée d'une intervention militaire validée par l'Onu n'est pas prêt d'être levé malgré les critiques. A Doha, Bourhan Ghalioun, président démissionnaire du Conseil national syrien (CNS) a dénoncé une Russie «devenue une partie du problème plutôt qu'une partie de la solution».