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Contrairement au
calme plat constaté dans les bureaux de vote, une très grande ébullition était
perceptible sur la toile algérienne en ce jeudi 10 mai 2012. Le WebDZ était
squatté par les boycotteurs, laissant peu de place aux partisans de la
participation, sans doute occupé à voter, ajouté à l'absence d'un site
spécialement dédié aux législatives, comme c'était le cas durant de précédents
rendez-vous. Chronique d'une journée électorale sur le Web.
Facebook, qui compte près de 3,4 millions d'Algériens, était la plateforme privilégiée des «activistes» anti-législatives. Ces derniers ont animé la journée sur ce réseau social mais également sur des sites spécialement dédiés à l'événement. A peine deux heures après le début du scrutin que les informations fusaient de partout pour annoncer une faible affluence à cette heure de la journée. Des informations confirmées plus tard à la télévision par le ministre de l'Intérieur qui a fait état d'un taux de participation de 4,11% à 10h00. Contrairement aux scrutins précédents, le département de Daho Ould Kablia n'a pas prévu de site Web dédié aux législatives. A peine quelques lucarnes sur le site officiel du ministère indiquant le «dispositif réglementaire», des «statistiques», des «infos élections», et une autre pour les «résultats» qui est restée inanimée jusqu'à 18h30 avec la publication du «Taux national de participations arrêté à 16h00 par wilaya» puis, plus tard, par les taux de 18h00 et à la clôture. Ce n'est qu'en mi-journée que la page Facebook d'Algérie Presse Service (APS) entame la publication de liens en relation avec le déroulement du scrutin. Si certains articles étaient ouverts au grand public, la plupart, y compris ceux relatifs aux taux de participation, n'étaient que des ébauches de dépêches (des «leads» dans le jargon des agences de presse) dont l'intégralité n'était accessible qu'aux abonnés. Les sites web des partis politiques étaient tout aussi statiques que celui du ministère de l'Intérieur. Tout au long de la journée de jeudi, ceux du FLN et du RND, comme ceux de Jil Jadid, de Sofiane Djilali, et Al Adala, de Djaballah, sont restés figés sur la campagne électorale (programmes, vidéo?). A un degré moindre, ceux du FFS et MSP étaient chichement mis à jour. Le FFS signalait des entraves (absences de noms d'électeurs dans des bureaux de vote), dénonçait la «désorganisation» observée dans plusieurs wilayas, et mettait en garde contre «l'intox qui visait» le parti, sans en préciser la nature. Hormis une vidéo montrant Soltani et son épouse voter, le site MSP est resté aussi peu alimenté. Ce n'est que vers 16h qu'a été mise en ligne une déclaration de ses chefs à propos de la «hausse anormale du taux de participation» et le «nombre excessif de procurations», sans autres détails. Pendant ce temps, les activistes, y compris des sites et des blogs, opposés aux élections, inondaient Facebook de liens, d'articles, de brèves et d'images de l'événement. Parmi les plus diffusées, des images montrant des bulletins de vote éparpillés (à Bouira) ou encore celle d'un électeur qui a pris en photo, dans l'isoloir, l'enveloppe qu'il allait mettre dans l'urne et qui contenait? l'effigie de Chuck Norris (l'acteur américain spécialiste en arts martiaux) allusion au candidat d'un parti politique, l'UFDS, à Aïn Témouchent, dont une fausse affiche électorale, le présentant en position de combat de karaté, avait fait le buzz sur le net. Un «réseau» pour dénoncer la fraude Facebook était aussi le lieu de diffusion, mais aussi de démenti de rumeurs infondées. La vidéo prétendant des «émeutes à Belcourt» le jour du scrutin, alors qu'il s'agissait d'images remontant à janvier 2011, a été vite dénoncée par des partisans du boycott, obligeant ceux et celles qui l'avait répercutée à la supprimer de leurs pages FB. Plusieurs pages sur FB (Ouled Assima, IciDz, ainsi que des pages individuelles) et des sites algériens se sont employés à «dénoncer la fraude électorale» et mettre en évidence «l'ampleur du boycott». Mais il était difficile de faire le tri entre les rumeurs et les faits avérés. Sur une dizaine d'informations publiées, une seule, tout au plus, était appuyée par des documents et des témoignages identifiés. Le Réseau de Défense des Libertés et de la Dignité (RDLD), qui édite le site (www.nahrag.tk) et la page «Réseau Rassed» sur FB, et qui est également présent sur Twitter et Youtube, s'était distingué par un suivi du déroulement du scrutin ; mais également par la publication de vidéos aux origines douteuses et invérifiables, et où la manipulation prend largement le pas sur l'information. L'unique document publié par le site concerne le témoignage, signé, du président de la Commission communale de surveillance des élections à Kouba qui a fait un descriptif détaillé de l'ampleur du vote par procuration par des «jeunes militaires». D'ailleurs, la plupart des «informations» publiées par ce site étaient estampillées «non vérifié». A des degrés différents, les journaux électroniques, comme Maghreb Emergent (avec pas moins de 5 articles publiés jeudi et 5 autres le vendredi, sans compter les brèves), DNA et TSA, Algérie Express et NessNews, étaient au rendez-vous de la «veille électorale», mais la palme d'or du suivi heure par heure revient, sans contexte, au site Web du quotidien Liberté qui diffusait les envois signés de ses correspondants pendant toute la journée du jeudi 10 mai 2012. Sa couverture s'est étalée jusqu'à vendredi. Globalement, le rythme des publications a commencé à baisser à partir de 19h. Certains sites ont décroché dès 20h. La page FB de l'APS a continué jusqu'à 22h30 par la publication du lien d'une dépêche relative au taux de participation final? accessible uniquement aux abonnés ! Au lendemain du scrutin, les «experts» de FB, citant des «sources bien placées», donnaient les islamistes «largement gagnants», reprochaient aux boycotteurs d'avoir «laissé le champ libre aux barbus» et annonçaient la «dawla islamiya». Après l'annonce des résultats préliminaires, les commentaires sur FB étaient plutôt dans le registre de la dérision, comme l'illustre une photo retouchée de Mr Bean grimaçant devant un bout de papier sur lequel était inscrit «FLN : 220». |
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