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Tomber de rideau pour une campagne insipide

par Kharroubi Habib

La campagne électorale pour les législatives a fini comme elle a commencé. De bout en bout, elle a été plombée par l'indifférence affichée des citoyens aux sollicitations partisanes. Il n'y a eu aucun meeting d'aucune formation que l'on puisse qualifier de manifestation ayant drainé la grande foule. Pas même ceux animés par les partis islamistes censés bénéficier du vent favorable à leur courant politique qui a soufflé dans les pays voisins.

Pourtant et bien avant que cette campagne électorale ne démarre, les Algériens ont été proprement matraqués d'appels à s'investir dans le débat leur suggérant que par ses enjeux le scrutin du 10 mai sera un rendez-vous «existentiel» pour la Nation. Il faut croire que ces appels sont tombés à plat au vu de la bouderie populaire qui a affecté la campagne. A s'en tenir à leur comportement réfractaire aux opérations de séduction que les concurrents ont menées en leur direction, les électeurs ne se rendront pas apparemment en masse dans les bureaux de vote le 10 mai. A la décharge de leur comportement, s'ils décident effectivement de s'abstenir, c'est qu'il leur a été «rendu» une chose et son contraire sur ce scrutin. Comment ils seraient en effet tentés de prendre part à ce scrutin quand parmi les partis qui les ont incités sur tous les tons à le faire nombreux sont ceux qui en même temps leur ont donné à comprendre que les résultats du scrutin sont «pliés» avant qu'il n'ait eu lieu.

A leurs yeux, l'argument avancé malgré tout par ces derniers en faveur d'une participation populaire massive comme barrage à la fraude électorale annoncée par eux n'est d'aucune pertinence si effectivement les résultats du scrutin ont été par avance «ficelés» ainsi qu'ils l'ont prétendu. A cela, pour détourner les électeurs de l'acte électoral, s'est ajouté que l'ouverture de la campagne a été précédée de révélations offusquantes sur le rôle joué par la «chkara» dans la confection des listes de candidatures de la plupart des partis. Elles ont eu pour effet de renforcer la conviction dans l'esprit des citoyens que la course électorale n'a d'autre motivation pour ceux qui y prennent part que d'arriver à obtenir ce statut de parlementaire qui ouvre aux bénéfices des avantages et des prébendes.

Cette lourde suspicion qui a pesé sur les acteurs engagés dans la compétition, les partis en lice ne l'ont nullement dissipée en faisant valoir des programmes électoraux attractifs. Rares sont ceux qui ont développé des propositions et des engagements constitutifs d'une véritable alternative aux politiques menées par le pouvoir en place et à l'origine du marasme dans lequel se débat le pays. Cette indigence programmatique fait considérer par beaucoup de citoyens que finalement les partis qui leur promettent la rupture avec ces politiques n'ont pour tout horizon en terme de changement que celui de prendre la place de la caste dirigeante en poste. Cela leur paraît d'autant évident que les états-majors de la plupart des formations partisanes qui les courtisent s'avèrent avoir à un moment ou à un autre fait partie de cette caste puis évincés pour une raison ou une autre. Il est vrai que l'esprit de revanche est la seule motivation d'un grand nombre de ces «revenants». Le rideau est tombé sur une campagne électorale insipide. Dans trois jours l'on saura ce que les électeurs feront de leur libre arbitre.