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La pâle campagne électorale algérienne connaît-elle
une instrumentalisation de la religion ? La Cnisel qui n'est pas très
catégorique s'est inquiétée du «glissement de la religion dans les discours
politiques». Mais aussi de l'usage de la langue étrangère - le français, of
course ! -, de l'utilisation des biens et des moyens de l'Etat ou des communes
à des fins de campagne ou encore des symboles publics par des candidats en
exercice dans des fonctions étatiques.
Le mot «glissement» - qui correspond selon la définition à un mouvement entre deux éléments - est un mot trop vague? pour une mise en cause précise. On aurait aimé que les choses soient moins floues et que les propos soient moins glissants. L'utilisation des biens de l'Etat et des communes renvoie à des éléments matériels concrets qui ne méritent aucun glissement verbal ou verbeux. Il faut les désigner clairement et avec précision et les dénoncer. A l'évidence, cela concerne surtout les partis au pouvoir et accessoirement quelques partis représentés au niveau local. L'accusation d'instrumentalisation de la religion islamique cible les partis islamistes et ils s'en défendent avec vigueur. Sur cette question, la loi est effectivement claire: instrumentaliser la religion à des fins politiques est interdit. Mais comme la Cnisel veille pour tous - même si elle n'arrive pas à imposer son point de vue face à l'Intérieur sur le type de bulletin à mettre dans l'urne -, on aurait aussi aimé qu'elle n'ait pas de propos «glissants» sur la question. Espérons que la Cnisel ne pointe pas la formule générale du «Bismillah» qui est une entame largement partagée des discours et que l'on retrouve aussi dans la «famille» nationaliste. La Cnisel devra faire l'effort de nous expliquer concrètement les cas d'instrumentalisation. Y a-t-il un candidat qui a déclaré que ne pas voter sur lui est «haram» ? Un tel autre a-t-il affirmé que les autres candidats ne sont pas de bons musulmans ? Quelqu'un a-t-il édicté une fatwa ? Telles mosquées font-elles campagne? On attend donc ces éclaircissements de la part de ces vigilants observateurs de la Cnisel? Il faut néanmoins rappeler que le gouvernement a pris les devants et mis à contribution les imams et les mosquées pour inciter les gens à aller voter? Ce qui n'était pas le meilleur exemple de non-instrumentalisation. Le plus piquant est que le ministre des Affaires religieuses s'offusque aujourd'hui de voir des imams assister à des meetings tenus par les partis islamistes ! Le mélange des genres n'est jamais bon? En attendant, on peut constater que le temps est à la platitude. La tentative laborieuse de récréer une bipolarisation islamiste contre les autres n'a pas l'air de fonctionner. En réalité, il existe une terrible difficulté pour les partis et les candidats en lice à capter l'attention. Même ceux qui peuvent avoir des idées se heurtent à cette formidable montagne d'incrédulité à l'égard de la politique qui s'est accumulée au fil des ans. Dans le meilleur des cas, il faut admettre que la politique a été ramenée au niveau zéro et qu'il faudra du temps - et des preuves - pour faire renaître de l'intérêt des Algériens. Il sera inutile d'essayer de créer pour ces élections une dramatisation entre «éradicateurs» et «islamistes», elle a très peu de chance de fonctionner. La Cnisel est dans son rôle bien entendu, encore faut-il qu'elle le fasse dans la précision et non dans des généralités. |
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