Alors que le gouvernement de droite, à travers ses ministres de l'Intérieur
et de la Défense, Claude Guéant et Gérard Longuet, avait refusé l'audition des
chefs du renseignement, Erard Corbin de Mangoux, directeur général de la
sécurité extérieure (DGSE), et Bernard Squarcini, directeur central du
renseignement intérieur (DCRI), à la demande de David Assouline, président
socialiste de la commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des
lois, les chefs des services du renseignement français ont été finalement
entendus par la délégation parlementaire au renseignement sur l'affaire Mohamed
Merah. Présidée par le député UMP Guy Teissier, cette instance, aux travaux
couverts par le secret-défense, est composée à parité d'élus de droite et de
gauche: quatre députés et quatre sénateurs, trois députés UMP, un député PS,
trois sénateurs PS et un sénateur UMP. L'audition des patrons des services
secrets français devait expliquer la façon dont le Raid a débusqué Mohamed
Merah et comment la police a négocié avec le tueur. Outre Erard Corbin de
Mangoux et Bernard Squarcini, Ange Mancini, coordonnateur national au
renseignement, était également entendu dans l'affaire Merah. Cette commission
créée en 2007, produit un rapport annuel pour le chef de l'État et effectue des
mises au point, chaque mois, avec les patrons des agences de renseignements
(DGSE, DCRI, DRPP, DPSD, DGSE, DRM, DNRED, Tracfin). Au sortir de l'audition,
Guy Teissier, a, exceptionnellement, animé une conférence de presse où il
assurait qu'il n'y avait «aucune ombre au tableau». Selon lui, la commission
est «pleinement satisfaite» de ces auditions et n'a détecté «aucune faille». Le
refus du gouvernement d'accéder à la demande du Sénat, à majorité de gauche
d'auditionner Corbin de Mangoux et Bernard Squarcini, avait soulevé l'ire de
l'opposition et celle de Jean-Pierre Bel, le chef de file des sénateurs PS, à
la tête de la Haute Assemblée qui s'est dit indigné par ce refus. David
Assouline avait déclaré vouloir, derrière son initiative, «dresser un
diagnostic partagé des dispositifs législatifs en vigueur concernant la
sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme». Le vendredi 30 mars,
Gérard Longuet et Claude Guéant, les ministres de la Défense et de l'Intérieur,
décident de ne pas donner de suite favorable à la demande socialiste prétextant
un «devoir de réserve» des deux fonctionnaires concernés «n'ayant pas de
responsabilité en matière d'évaluation des lois». Jean-Pierre Bel a dénoncé ce
refus, demandant au gouvernement «de revenir sur cette décision, qui
constituerait un grave précédent, mettant en cause les prérogatives
constitutionnelles du Sénat de la République», d'autant plus qu'«un accord
avait, au demeurant, été donné pour une série d'auditions». Le président de la
Chambre haute justifie cette demande du Sénat par «l'actualité et des annonces
du président-candidat sur des projets de réformes législatives en matière de
lutte contre le terrorisme qui seraient soumis à un prochain Conseil des
ministres». Par ailleurs, les arrestations se poursuivent dans les milieux
d'islamistes dits radicaux, puisque dix d'entre eux ont été interpellés, dans
plusieurs villes de France, hier matin, lors d'une nouvelle opération
policière. Cette nouvelle opération, indépendante des descentes de vendredi
dernier, qui ont ciblé l'organisation «Forsane Alizza», a visé des personnes
susceptibles de s'être rendues en Afghanistan ou au Pakistan ou de vouloir s'y
rendre pour mener le djihad. En quelque sorte des arrestations préventives dont
la médiatisation a été critiquée par plusieurs candidats à l'Elysée. Lors de ce
coup de filet, la police est notamment intervenue à Roubaix et à Marseille,
alors que d'autres interventions ont également eu lieu à Carpentras (Vaucluse),
à Valence, à Pau et dans le Lot-et-Garonne, selon une source policière. À
Roubaix, trois personnes ont été interpellées : deux hommes vêtus de djellaba
et une femme et à Marseille, un jeune homme a été interpellé dans les quartiers
nord. À Bordeaux, un homme a été arrêté hier matin, puis conduit au domicile de
sa mère à Bon-Encontre (Lot-et-Garonne), où une perquisition a eu lieu. À Pau,
deux frères ont été arrêtés, selon les médias locaux. Des perquisitions ont eu
lieu au domicile des personnes interpellées, et du matériel informatique a été
saisi, selon une source judiciaire. Treize membres présumés du groupuscule
salafiste «Forsane Alizza», interpellés la semaine passée, ont été mis en
examen dans la nuit de mardi à mercredi, dont neuf écroués. Ils sont soupçonnés
d'association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste et
d'acquisition, de détention et de transport d'armes.