La Russie a critiqué, hier mercredi, le président syrien, Bachar
Al-Assad, pour les «gros retards» dans l'application
des réformes et mis en garde Damas contre un risque d'escalade de la crise si
le régime n'écoutait pas les conseils de son allié russe. «Malheureusement, tous
nos conseils, et de loin, n'ont pas été suivis d'effet et n'ont pas toujours
été mis en pratique en temps voulu, loin de là», a déploré le chef de la
diplomatie russe, Sergueï Lavrov, lors d'une séance de questions-réponses à la
chambre basse du Parlement (Douma). Le régime de Bachar
Al-Assad a «introduit de bonnes réformes qui
renouvellent le système et l'ouvrent au pluralisme, mais cela est fait avec un
gros retard», a critiqué M. Lavrov. La proposition d'entamer un dialogue inter-syrien intervient elle aussi «avec retard», a
renchéri le ministre russe, observant que cette «inertie» pourrait finir par
«engloutir tout le monde». Ces déclarations interviennent au lendemain de
l'annonce par Bachar Al-Assad
de la tenue d'élections législatives, le 7 mai, les premières depuis le début
de la révolte qui a fait plus de 8.500 morts depuis un an, selon l'Obervatoire syrien des droits de l'homme (OSDH). La
communauté internationale attendait une réponse du président syrien aux
«propositions concrètes» faites, le week-end dernier, par l'émissaire de l'ONU
et de la Ligue
arabe, Kofi Annan, notamment
un arrêt immédiat des violences, un accès aux organisations humanitaires et
l'ouverture d'un dialogue. Des pays occidentaux ont appelé la Russie à user de son
influence pour tenter de persuader le régime de Bachar
Al-Assad de mettre fin à la répression. M. Lavrov a
insisté sur le fait que la
Russie faisait tout ce qu'elle pouvait pour tenter de
résoudre le conflit, soulignant que Moscou gardait une capacité d'influence sur
le régime d'Assad. «La partie dans le conflit sur
laquelle nous avons de l'influence est le gouvernement de Bachar
Al-Assad», a reconnu M. Lavrov, observant que Moscou
ne défendait «pas le régime syrien mais la justice» dans le pays. «C'est au
peuple de décider qui doit être au pouvoir en Syrie», a-t-il souligné, réaffirmant
l'opposition de Moscou à toute ingérence et toute «résolution grossière» de
l'ONU «comme ce fut le cas pour la
Libye». Membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, la Russie s'était abstenue
lors d'un vote sur la Libye
en mars 2011 qui a permis les frappes internationales contre les forces de
Kadhafi, conduisant à la chute du régime. Mais Moscou a critiqué par la suite
l'intervention des avions de l'Otan en Libye, estimant qu'elle sortait du cadre
de la résolution. Depuis, la
Russie a bloqué deux résolutions des Occidentaux condamnant
la répression du régime de Bachar Al-Assad
et rejeté, la semaine dernière, un nouveau projet américain au Conseil de
sécurité. Ce texte exige du régime l'arrêt «immédiat» des violences et appelle
l'opposition à «s'abstenir de toute violence» au cas où le pouvoir se plierait
aux exigences de cette résolution. La
Russie veut convaincre la Syrie d'accepter des observateurs internationaux
indépendants qui surveilleraient l'arrêt «simultané» des violences des deux
côtés. Moscou insiste pour mettre sur le même plan les violences du régime et
de l'opposition armée syrienne, ce que les Occidentaux refusent. M. Lavrov a, par
ailleurs, affirmé que les armes que la Russie continue à vendre à la Syrie ne sont pas utilisées
contre les civils.