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Le boycott par le RCD n'est pas pour surprendre

par Kharroubi Habib

Le RCD boycottera les élections législatives. Saïd Sadi, son chef, l'a officiellement annoncé vendredi à Alger à l'issue des travaux du conseil national du parti. La décision n'a pas été une surprise, sauf pour les milieux qui ont cru que le RCD ne pouvait pratiquer la politique de la chaise vide après avoir obtenu gain de cause sur sa principale revendication pour le scrutin, à savoir la présence des observateurs étrangers.

A priori, cette assurance obtenue n'a pas eu pour effet d'inciter le RCD à la participation, dont son président a motivé le refus en prétendant, selon lui, que «la partie serait déjà jouée», précisant même «que les participants au vote du 10 mai prochain ont tous négocié leur quota» et que dans ce marchandage, «il aurait été réservé quatre sièges à sa formation».

Au-delà de la raison invoquée par Saïd Sadi pour justifier l'option du boycott, il nous semble que la décision du RCD était inéluctable. Cela au vu de l'analyse faite par ce parti de la situation telle qu'elle se présente dans le pays et des prises de position qu'elle lui a fait assumer à l'occasion d'évènements ayant fait l'actualité nationale ces deux dernières années. L'analyse du RCD l'a conduit à considérer que le changement en Algérie ne peut se produire ni de l'intérieur du pouvoir ni avec celui-ci. Une conclusion qui lui a fait faire quitter l'hémicycle de l'APN à ses élus. Comme à essayer de prendre la tête de la velléité de contestation de rue déclenchée par la CNDC dans le sillage des révoltes populaires ayant enclenché le processus des chutes des régimes tunisien de Ben Ali et égyptien de Moubarak. A tort ou à raison, Saïd Sadi et le RCD semblent toujours convaincus qu'il est possible de rééditer en Algérie le scénario tuniso-égyptien. S'inscrire dans la logique électorale voulue par le pouvoir leur apparaît, semble-t-il, admettre que l'Algérie est apte à sortir de sa crise politique autrement que par la confrontation entre les citoyens et ce pouvoir.

On peut avancer l'hypothèse que le RCD table sur la conviction que les résultats des élections législatives vont enlever à l'opinion nationale les quelques illusions qu'elle aurait eu de voir se tenir des élections dans le pays transparentes et régulières, et ainsi convaincre le plus grand nombre que seule l'opposition frontale au régime peut amener le changement. En ayant opté pour le boycott électoral, le RCD pourrait alors à ce moment se faire le porte-voix et la locomotive du mouvement de contestation qui se fera entendre. En somme, avec son boycott, le RCD se met en «réserve de la nation» en vue d'une situation politique post électorale qu'il anticipe comme devant être crucialement agitée et propice à une offensive décisive contre le régime et le pouvoir.

Faut-il encore que ce que le RCD envisage comme devant se produite ait effectivement lieu. Saïd Sadi et sa formation se sont souvent trompés dans leurs analyses. Pourquoi il en serait autrement cette fois-ci encore ? Cette fois, il nous apparaît que Sadi et le RCD jouent une partition qui pourrait se conclure par leur mort politique au cas où elle s'avérerait avoir été rédigée et menée sur la surestimation de la réaction populaire aux résultats des élections législatives.

Pour l'heure en tout cas, le RCD est le seul parti à avoir opté pour le boycott et aucun autre n'a fait savoir qu'il en fera de même.