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Le Yémen élit aujourd'hui un nouveau président après
un long mouvement de contestation qui a abouti à un départ négocié de l'ancien
président Ali Abdallah Saleh. L'autocrate est en effet parti aux Etats-Unis
avec une immunité en poche.
En soi, le scrutin d'aujourd'hui n'est porteur d'aucune surprise, puisqu'en vertu de l'accord signé, il y a un seul candidat : le vice-président Abd Rabbo Mansour Hadi. Celui-ci est donc assuré de remplacer l'ancien autocrate Saleh, qui avait caressé l'idée de céder le pouvoir à son rejeton de fils après 33 ans de règne sans partage. Une maladie autocratique typiquement «républicaine» et «arabe». Cette transmission familiale du pouvoir n'aura en définitive «réussi» qu'en Syrie ; le mot réussite prenant ici un tour particulièrement sinistre quand on voit où le pays a été mené par le «jeune» et «moderne» Bachar Al-Assad. Durant les dix longs mois de contestation du pouvoir de Ali Abdallah Saleh, les médias n'ont pas accordé une attention particulière à des forces ayant des objectifs différents de ceux des contestataires de Sanaa et d'ailleurs. L'action des djihadistes islamistes, à force d'avoir servi de prétexte au régime de Saleh, a été minimisée. Tout comme celle du mouvement chiite d'Al-Houti, dans le nord du pays, contre lequel l'armée yéménite a pourtant mené une véritable guerre sans parvenir à le mater. Ces deux mouvements, très radicalement opposés, ont profité des dix mois de quasi-chaos pour se renforcer et s'installer, alors que l'armée yéménite se scindait entre loyalistes et ralliés aux contestataires. Et on risque d'en entendre parler dans les prochaines semaines ou les prochains mois. Le poids des djihadistes et des houtistes ne sera pas cependant visible dans ce scrutin sans concurrence. Il n'en est pas de même pour le Sud Yémen. Après avoir été fortement réprimé, le «mouvement sudiste» (al-Harak al-Janoubi) a repris du poids et appelle à boycotter le scrutin. Les services de sécurité se sont déployés avec force dans Aden en arguant que des partisans du «mouvement sudiste» cherchaient à empêcher le vote par la force. La question de la participation au Sud est sans doute l'enjeu politique le plus crucial pour ce scrutin, qui prend partout ailleurs l'aspect d'une formalité avant le début d'un processus de transition. Le Sud Yémen était gouverné par une république «marxisante», avant que le pays ne soit réunifié par la force des armes en 1990. Et c'est en tant qu'«unificateur» que Ali Abdallah Saleh s'est imposé au pouvoir pendant plus de trois décennies, la menace de sécession au Sud lui servant continuellement de prétexte. Le problème est que la réunification par la force n'a pas été suivie d'une politique sérieuse d'intégration nationale. Il aurait fallu une démocratisation réelle du pays pour surmonter de manière vertueuse cette réunification par la guerre. Cela n'a pas été le cas et cela n'a fait que renforcer, au fil des ans, le sentiment chez une bonne partie des Yéménites du Sud qu'ils étaient «mieux» sans ceux du Nord. En appelant au boycott des élections, le mouvement sudiste se saisit de ce qui semblait n'être qu'une formalité pour envoyer un message politique sans équivoque. Les plus radicaux, qui se reconnaissent dans l'ancien vice-président yéménite en exil, Ali Salem Al-Baïd, ont appelé à empêcher le déroulement du scrutin et à la désobéissance civile. Les lendemains d'un scrutin censé n'être qu'une formalité risquent d'être mouvementés. |
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