|
Envoyer à un ami |
Version à imprimer |
Version en PDF
Le président tunisien Moncef Marzouki achève par
l'Algérie sa mission de pèlerin de la relance de l'Union maghrébine. Et, disons-le
d'emblée, c'est une mission digne d'être soutenue, même si le « décalage» entre
les systèmes politiques des différents pays maghrébins est loin d'être résorbé.
Entre une Tunisie en transition, une Libye «en milices», une Mauritanie qui paraît
lointaine et une inquiétante immobilité au Maroc et en Algérie, il n'est pas
facile d'être en phase.
Pourtant, il faut souhaiter que Marzouki n'ait pas tort d'avoir déclaré à Nouakchott que les «conditions psychologiques » pour la construction du Maghreb arabe étaient «désormais réunies » après la chute des régimes Ben Ali et Kadhafi en Tunisie et en Libye. Il est évident que le Maghreb connaîtrait une dynamique plus rapide si la démocratisation des différents pays qui le composent était effective et réelle. C'est objectivement en marche avec, nécessairement, des différences de timing et de conditions. Le plus grand souhait des militants du Maghreb est que les Etats cessent, au moins, d'être des acteurs bloquants et acceptent de faire preuve de pragmatisme. Il n'est pas besoin d'attendre les progrès de la démocratie pour encourager la libre circulation des personnes et des biens au sein de l'espace maghrébin. Il y a dans le domaine économique, du savoir et de la culture, des synergies importantes à faire et qui seront, à terme, profitables à tous. Y compris l'économie algérienne, même si, en apparence, ce serait elle qui gagnerait le moins au vu de sa structure. En réalité, c'est un calcul étriqué. On l'a déjà dit, on le répète : l'économie algérienne ne perdrait rien si les produits qu'elle importe d'Europe ou d'Asie viennent de Tunisie ou du Maroc. Au contraire - à condition que ces pays ne servent pas de faux drapeaux - il faut encourager, comme cela est prévu dans les textes de l'UMA, le produit maghrébin. Pourtant, si le Maghreb est continuellement en l'année zéro, cela tient au fait que les élites au pouvoir n'ont pas voulu que le minimum syndical de relations entre les pays de la région puisse se faire et créer de manière naturelle son élargissement. Depuis deux décennies, nous ne sommes pas dans la construction maghrébine, mais dans l'entrave à cette construction. L'Algérie et le Maroc ont perdu un temps énorme pour arriver, en même temps, à l'idée d'une déconnexion de la question du Sahara Occidental du dossier bilatéral et du Maghreb. «Quand vous avez un problème que vous ne pouvez surmonter, il faut le contourner? Continuez à discuter et laissez ce problème pour le moment entre parenthèses, le laisser à l'ONU qui s'en est emparée». Ce que dit Marzouki, de manière précise, n'a rien de nouveau. C'est une idée pragmatique qui aurait pu faire avancer les choses, mais qui malheureusement n'a jamais été défendue «au même moment» par Alger et Rabat. Aujourd'hui, il existe un contexte international qui «presse» les pays de la région à accélérer le pas. On peut se désoler qu'on ait attendu que ces pressions se soient faites plus actives pour que l'on ressente un début de frémissement. Pourtant, et c'est là le rôle des politiques, rien n'interdit que les Maghrébins se réapproprient leur projet et le mènent pour leur propre intérêt. Mais cela suppose que l'on sorte des politiques diffuses d'entraves au Maghreb pour un vrai désir de Maghreb. Le Maghreb valait bien que M. Marzouki prenne son bâton de pèlerin. Espérons qu'il n'a trouvé que des «convaincus» ! |
|