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La contestation reste vivace dans la région de Qatif: L'Arabie Saoudite réprime ses chiites

par Salem Ferdi

La région de Qatif, dans l'est de l'Arabie Saoudite, à dominante chiite, reste plus que jamais un pôle de contestation politique que les autorités saoudiennes minimisent et l'imputent de manière systématique à des menées iraniennes. Face aux appels à la réforme, la réponse des autorités reste la même : la répression.

De manière régulière, la région de Qatif, très riche en pétrole, est en proie à des manifestations alimentées par le cycle classique de la répression-protestation. Les incidents qui se répètent ont une similitude frappante. Ainsi, une personne a été tuée et trois autres blessées dans des affrontements entre forces de sécurité et manifestants chiites. Les autorités ayant promis de frapper avec une «main de fer» les contestataires, la police a tendance à faire usage de tirs à balles réelles. Cela s'est passé dans la nuit de jeudi à vendredi à Awamiya, devenue un des lieux le plus contestataire dans la région. Officiellement, le ministère de l'Intérieur explique ces tirs à balles réelles par un acte de légitime défense. Selon lui, une patrouille des forces de sécurité a été visée par un cocktail Molotov à Awamiya, et ses membres ont ensuite été la cible de tirs auxquels ils ont riposté.

Ces évènements sont intervenus dans le contexte des commémorations du seuil d'Arbaïn, en général très mal vues par une police religieuse et un establishment religieux sunnite qui ne sont pas connus pour faire preuve de tolérance. Deux jours après ces incidents, une patrouille de police a essuyé des tirs faisant un blessé parmi les policiers, selon les autorités.

Un porte-parole de la police a indiqué qu'une «patrouille de police a été visée par des tirs samedi alors qu'elle circulait dans la province de Qatif». «Un policier a été blessé et hospitalisé», a-t-il indiqué dans un communiqué rapporté par l'agence officielle SPA.

DES APPELS AU DIALOGUE NON ENTENDUS

Un dignitaire chiite de Awamiya, cheikh Fayçal al-Awami, a demandé au «gouvernement d'entamer un dialogue véritable avec les chiites de la province orientale pour mettre fin à la discrimination confessionnelle». Une discrimination rendue encore plus insupportable par le fait que la région est particulièrement riche. Un «mouvement de Jeunes» dénonce le comportement de la police qui a, selon lui, transformé Awamiya en «caserne militaire». Des manifestations organisées dans quatre villages de la région de Qatif appelant à la «libération des détenus politiques, à la réforme et à la fin de la discrimination sectaire», n'ont pas été appréciées par les autorités qui tentent d'étouffer par tous les moyens une contestation qui reste vivace depuis mars 2010. Elles ont pris un aspect plus violent en octobre dernier où 14 personnes ont été blessées à Awamiya. Quatre personnes ont été tuées en novembre. Un «Mouvement saoudien des Jeunes libres» avait annoncé à cette époque le «début du soulèvement populaire contre le régime des al Saoud dans l'ensemble du pays». Qatif continue ainsi d'être l'épicentre de la contestation des chiites saoudiens qui réclament des droits égaux avec les sunnites.

Les autorités qui se refusent à engager un dialogue politique dénoncent en général des «fauteurs de troubles» à la solde d'un pays étranger (Iran). Après les évènements de novembre dernier, le ministère saoudien de l'Intérieur avait promis une répression sans faille en indiquant qu'il frapperait les «mercenaires» d'une «main de fer». Face à une contestation menée principalement par les jeunes, le ministère de l'Intérieur avait adressé un avertissement aux «parents des fauteurs de troubles» en leur demandant de «prendre leur responsabilité envers leurs enfants». Les citoyens saoudiens qui réclament des droits et des réformes sont systématiquement accusés d'être la «cinquième colonne» de l'Iran.