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Syrie : Bachar al-Assad parle de complot et menace

par Yazid Alilat

Le président syrien Bachar al-Assad n'est pas prêt à quitter le pouvoir. Après presque une année de violences, d'affrontements armés et de répression de manifestants demandant le départ de l'actuel régime, qui ont fait au moins 5.000 morts selon des ONG et l'ONU, il a proposé aux Syriens une nouvelle Constitution. Dans un long discours de plus d'une heure et demie retransmis à partir de l'université de Damas, il a tracé un agenda politique pour les prochains mois, avec à la clé la tenue d'un référendum sur une nouvelle Constitution. Mais, dans la foulée, il persiste à souligner qu'il n'a jamais donné l'ordre de tirer sur les manifestants.

Discours à deux vitesses, l'intervention de Bachar al-Assad aura été au moins claire sur les intentions politiques du régime, autant pour gagner du temps que pour désavouer l'opposition. Ainsi, il a annoncé la tenue d'un référendum sur une nouvelle Constitution en mars et des élections législatives en mai ou juin, pour la constitution d'un gouvernement d'union nationale représentant tous les courants politiques et la société civile. «Lorsque la commission sur la nouvelle Constitution aura terminé ses travaux, il y aura un référendum populaire car cette question intéresse tout le monde.

Le référendum aura lieu la première semaine de mars», a déclaré le président Al-Assad. Le référendum sur la Constitution ouvrira la voie à des élections législatives qui devraient se tenir en mai ou juin. «Nous sommes ouverts et toujours disposés au dialogue avec les différentes parties. Mais certaines forces de l'opposition ne sont malheureusement pas prêtes à ce dialogue», a-t-il fait souligner dans son discours, faisant référence à l'opposition qui a été rejointe par des déserteurs de l'armée régulière, notamment des officiers.

LA THESE DU COMPLOT

Pour autant, si Bachar veut ouvrir le champ politique d'un côté, il le ferme de l'autre en «sortant» la thèse du complot ourdi contre la Syrie. Il a accusé des pays étrangers de comploter» contre le régime. «Ce qui se passe aujourd'hui en Syrie avait été préparé pour la région depuis des décennies. Mais leur rêve tournera au cauchemar. Nous n'allons pas permettre la défaite de la Syrie qui signifiera la chute de la région entière», a-t-il dit dans cette quatrième intervention télévisée depuis le début de l'insurrection contre son régime. Il a notamment attaqué les «médias internationaux» qui tentent selon lui «sans relâche de pousser la Syrie à l'effondrement». Pour lui, le rétablissement de la sécurité était «la priorité absolue» du régime, promettant de frapper les «terroristes» d'une main de fer. «Il ne faut pas tolérer ceux qui terrorisent les gens, ni ceux qui sont complices avec les (parties) étrangères», a-t-il affirmé.  Il a également évoqué «l'idée d'un élargissement du gouvernement qui accueillera toutes les forces politiques». Mais, a-t-il précisé, «nous ne voulons pas d'opposants qui reçoivent des ordres de l'étranger, qui nous font du chantage», a-t-il ajouté. Sur les tirs contre les manifestants, il a nié en bloc avoir donné l'ordre de tirer. «Aucun ordre n'a été donné de la part d'aucune autorité pour ouvrir le feu» sur des manifestants, accusant des parties étrangères de «chercher à déstabiliser» le pays, soulignant que «selon la loi, personne ne peut ouvrir le feu sauf en cas d'autodéfense». «Nous n'avons pas besoin de leçons en démocratie», a-t-il martelé, soulignant que «le peuple syrien est capable de conduire un Etat fort et développé» et qu'»il gouvernait par la volonté de ce peuple». «La Syrie a besoin de tous ses enfants sans exclusion pour travailler ensemble pour une nouvelle ère de développement et de stabilité», a-t-il ajouté.

DES OBSERVATEURS ATTAQUES A LATTAQUIE

Coïncidence ou pas, le discours du président syrien, dont la chute a été envisagée par Israël qui se prépare à accueillir des réfugiés «alaouites» au Golan, intervient le jour où des membres de la mission des observateurs arabes ont été attaqués à Lattaquié.

Des observateurs d'Algérie, du Koweït, des Emirats arabes unis, d'Irak et du Maroc ont subi cette attaque en faisant route vers la ville de Lattaquié. Deux officiers koweïtiens ont été blessés dans cette attaque. Immédiatement après, le SG de la Ligue arabe, Nabil al-Arabi, a dénoncé cet incident, relevant que «la Ligue arabe dénonce les actions irresponsables et les actes de violence contre ses observateurs», ajoutant qu'il tenait «le gouvernement syrien pour pleinement responsable de la protection» de la mission. «Plusieurs membres de la mission d'observation ont été blessés et une partie de leur équipement gravement endommagé», selon la Ligue arabe.

Des attaques «menées par des éléments pro-régime» ont eu lieu à Lattaquié, sur la côte méditerranéenne, ainsi qu'à Deir Ezzor, selon un communiqué. Dimanche, à l'issue d'une réunion au Caire, le comité ministériel de la Ligue arabe, en charge de la crise syrienne, avait décidé de poursuivre et renforcer la mission d'observateurs en Syrie, en dépit des réserves de certains milieux quant à son efficacité. Il a appelé également «le gouvernement syrien et tous les groupes armés à stopper immédiatement tous les actes de violence».