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Si le pouvoir organise le prochain scrutin des législatives
dans les conditions de transparence et de régularité sur lesquelles il s'est
solennellement engagé devant le peuple et l'opinion internationale, il n'est
pas besoin d'être «Madame Soleil» pour prédire que le courant islamiste en
Algérie fera une spectaculaire percée électorale en la circonstance. Cette
perspective ne constituera une surprise que pour ceux qui ont naïvement cru que
l'ancrage et l'influence du courant islamiste au sein de la société algérienne
sont réduits à ce qu'ont fait apparaître les scores électoraux réalisés par les
formations politiques légales qui s'en revendiquent.
S'en tenir à cette fausse vision de la marginalité du phénomène islamiste dans la société algérienne pour décréter qu'il ne saurait y avoir récidive en Algérie de ce qui s'est passé en Tunisie, au Maroc et en Egypte, c'est assurément s'accrocher à une conviction en déphasage avec la prégnante réalité. Il nous faut bien admettre que les scrutins antérieurs organisés en Algérie ont donné lieu à des fraudes électorales, que même le président de la République a qualifiées comme ayant été d'une ampleur qui les apparente à celles à laquelle s'adonnait l'administration coloniale sous la houlette du fameux gouverneur général Edmond Naegelen, dont le nom est passé à la postérité pour ce fait. Il ne sert donc à rien d'agiter leurs résultats en guise d'arguments pour réfuter l'hypothèse que le courant islamiste est en situation d'opérer une spectaculaire percée électorale dans un scrutin transparent et régulier. D'autant que même le citoyen lambda n'ignore pas que dans le contexte particulier qui a été celui de l'Algérie depuis deux décennies, le «tripatouillage» des urnes par le pouvoir a eu pour objectif primordial de réduire à la portion congrue la présence du courant islamiste dans les institutions électives de la République. Ce qui a contribué à asseoir chez beaucoup la naïve conviction que le courant islamiste n'a en Algérie qu'une audience sans conséquence véritable sur les équilibres qui font le paysage politique national. Un scrutin libre verra le poids des islamistes renforcé, ne serait-ce que parce qu'ils ne seront pas arbitrairement dépossédés de ce que les urnes leur donneront et qui, c'est un secret de Polichinelle, a été automatiquement minoré dans la grande largeur à chaque élection suivante. Cela étant, il ne faut pas basculer dans la thèse que l'Algérie va inévitablement connaître une vague «verte», voire un tsunami islamiste qui emportera la République et son système constitutionnel. S'il est une chose sur laquelle on peut faire confiance au pouvoir algérien, c'est qu'il n'est pas dupe de la fausseté de la configuration politique nationale dessinée par les résultats des précédents et frauduleux scrutins organisés par lui. Ce qui explique qu'il a procédé par ses réformes à une ouverture démocratique balisée de telle sorte qu'elle n'empêchera pas une percée électorale islamiste, mais fera qu'elle restera dans des proportions qui ne mettront pas en péril «la sécurité» du système républicain. Et les précautions prises par le pouvoir seront d'autant plus efficaces que le courant islamiste algérien est atomisé entre composantes dont les divergences doctrinales et haines personnelles ne les prédisposent pas à faire front électoral commun et que celles qui ont accepté d'entrer dans le jeu politique et électoral, tel que voulu par le pouvoir, sont vouées aux gémonies par celles qu'il en a exclu pour cause de responsabilité dans «la tragédie nationale». |
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