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ArcelorMittal en cessation de paiement: Règlement de comptes sous les hauts-fourneaux d'El-Hadjar

par Salem Ferdi

Le tribunal d'El-Hadjar a été officiellement informé, hier, de la situation de cessation de paiement du complexe ArcelorMittal par le DG de l'entreprise Vincent Le Gouic.

Le dépôt de la déclaration de cessation de paiement se fait en conformité avec les dispositions du code de commerce. ArcelorMittal, en dépit de la mobilisation du syndicat de l'entreprise qui a mis en avant la préservation des emplois, n'avait pas réussi à obtenir de la Banque extérieure d'Algérie un prêt de 200 millions de dollars pour effectuer des travaux de rénovation et pour payer une dette de 120 millions de dollars contractée auprès de Société Générale et arrivée à échéance. Les choses semblent s'être accélérées avec l'intervention d'Ahmed Ouyahia qui a donné l'assurance que le complexe d'El-Hadjar ne sera pas fermé tout en demandant au syndicat d'entreprise de ne «pas être une arme» aux mains d'ArcelorMittal. Le syndicat d'El-Hadjar a, en effet, pris parti pour la direction de l'entreprise et a fustigé la Banque extérieure d'Algérie pour avoir refusé d'octroyer le prêt de 200 millions de dollars. Le syndicat a pris acte de la prise de position du Premier ministre sur la pérennité du complexe d'El-Hadjar et a donc, objectivement, cessé d'être un moyen de pression.

LA BEA S'EXPLIQUE

Au demeurant, au sens strict du terme, une banque apprécie le risque et le niveau des garanties attendues sur la base de la rentabilité de son intervention et la solvabilité du bénéficiaire du crédit. Le sort des 6.000 travailleurs d'El-Hadjar est un souci du gouvernement, il n'a pas à être celui du banquier. A plus forte raison, il n'a pas à devenir un élément de la négociation sur l'octroi d'un prêt. Or, il semble que du point de vue de la BEA, les garanties présentées par ArcelorMittal sont sans valeur. Selon son PDG, Mohamed Loukal, ArcelorMittal, le partenaire de l'Algérie dans le complexe sidérurgique d'El-Hadjar (Annaba), veut faire endosser à sa banque ses propres contraintes financières. ArcelorMittal a «utilisé comme parade durant tout le processus de négociations (avec la BEA pour l'octroi d'un crédit de 14 milliards de DA), des propositions de garanties de prêt qui n'ont pas de valeur», a-t-il déclaré. «Dans ce dossier il y a lieu de ne pas se tromper de cible et de vouloir incriminer la BEA à tout prix». Loukal a expliqué que depuis la mise en œuvre du partenariat, ArcelorMittal a réorienté la relation bancaire au profit de banques privées, en dépit du fait que la BEA est la banque du complexe El-Hadjar depuis sa création. La BEA s'est trouvée ainsi «confinée à assurer les remontées de trésoreries vers ces banques (privées) et la paie des travailleurs du complexe», ajoute-t-il. Cette désaffection d'ArcelorMittal avait même conduit la BEA à envisager de fermer son agence implantée au niveau du site car devenue «vulnérable sur le plan de la rentabilité». ArcelorMittal a repris attache avec la BEA pour obtenir un crédit d'exploitation de 5 milliards de dinars et un crédit de 9 milliards de dinars pour le rachat d'une dette contractée auprès de Société Générale.

DES GARANTIES POUR SOCIETE GENERALE MAIS PAS POUR LA BEA !

La BEA a demandé, à ce qu'il semble, des garanties au moins égales à celles octroyées à Société Générale. La position de la BEA se défend parfaitement, estiment des spécialistes du secteur bancaire. Elle se fonde sur le constat fait par la banque qu'ArcelorMittal n'est pas un client fidèle et ne peut donc prétendre à des largesses. Ce même client refuse de donner les garanties que la BEA attend. Et ce refus est d'autant mal vécu qu'ArcelorMittal aurait donné ces garanties à Société Générale Algérie. «Pourquoi on donne des garanties à Société Générale et non pas à la BEA. Pourquoi je donnerai un crédit sans garanties à un étranger pour la simple raison qu'il me menace avec les six mille travailleurs algériens», a résumé Ahmed Ouyahia. Le complexe El-Hadjar est peut-être sur le chemin de la renationalisation.