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Libye : relance de la production pétrolière et renvoi d'ascenseur aux pays «amis»

par Idir Ahatim

La production pétrolière libyenne reprend plus vite que prévu. Les nouvelles autorités ont demandé aux compagnies étrangères dont Sonatrach de reprendre les activités à l'arrêt. Si les contrats conclus sous Kadhafi ne sont pas remis en cause, les nouvelles autorités ont confirmé qu'elles accorderaient une prime aux compagnies des pays qui se sont engagés au côté de la rébellion.

Selon des sources informées, des courriers ont été adressés aux compagnies étrangères déjà présentes en Libye, dans le secteur des hydrocarbures, les priant de reprendre rapidement leurs activités. Parallèlement, les nouvelles autorités libyennes désignent dix sociétés, toutes occidentales, issues de pays ayant soutenu sans réserve l'émergence du CNT qui auront un accès prioritaire à l'offre de brut. Ces deux actions suggèrent une démarche pragmatique des autorités libyennes, selon deux axes, pas forcément contradictoires. Le secrétaire général de l'Opep, Abdallah El Badri, avait affirmé à Doha que la «Libye atteindra sa production normale d'ici la fin du deuxième trimestre 2012, avec 1,58 million de barils par jour (mbj)» et que «la production revient très rapidement, ce qui a surpris presque tout le monde». Les évènements ont fait passer la production libyenne de 1,6 mbj de pétrole, pour des exportations de 1,3 mbj, à 600 000 barils par jour ; tous les observateurs rejoignaient le chef de la Compagnie pétrolière nationale libyenne (NOC), Nouri Berouin, qu'il espérait un retour à la normale fin 2012. Les craintes quant à des représailles du CNT contre les compagnies pétrolières de pays n'ayant pas soutenu aveuglément le processus de renversement de Kadhafi ont vite été dissipées. De fait, il était important de préserver la fiabilité des contrats libyens, d'une part, et de relancer très rapidement les mécanismes d'alimentation de la rente pétrolière, d'autre part. C'est ainsi qu'un courrier a été adressé à toutes les compagnies déjà présentes dans l'amont libyen les invitant à reprendre leurs activités et de mentionner les pertes enregistrées du fait de la cessation forcée de leurs travaux. Sipex (Sonatrach International Petroleum Exploration & Production) n'a pas fait exception.

LES AMIS RECOMPENSES

Soucieux de renvoyer la balle aux pays de l'OTAN qui ont permis son émergence à la tête de la Libye, le CNT aurait chargé la compagnie pétrolière publique libyenne - la NOC - d'établir une liste de sociétés qui bénéficieront d'un accès prioritaire à son offre à terme de brut en 2012. Selon une source haut placée au sein de la NOC on retrouve sans surprise des compagnies espagnole Repsol, française Total, italiennes Eni et Saras, anglo-hollandaise Royal Dutch Shell, autrichienne OMV, britannique BP, portugaise Galp et, last but not least américaines Exxon Mobil et ConocoPhillips. Cette liste pourrait être renforcée dans les prochaines semaines. Cette démarche de la reconnaissance pour service rendu sera probablement renforcée par un bonus pour les sociétés «amies» dans les futurs rounds d'attribution d'aires d'exploration. Le risque sera minime, en termes de perte de crédibilité commerciale, car le camp bénéficiaire de ces faveurs est très largement porteur du point de vue de la demande en énergie et de l'offre de technologie. Sonatrach devra se frayer un chemin dans ce jeu aux règles mouvantes. Elle dispose déjà de deux périmètres en développement ; du succès de ses activités sur le terrain et de l'évolution des relations avec les nouvelles autorités libyennes dépend la pérennité de sa présence dans un domaine minier des plus prolifiques.