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La Tunisie, un an après le soulèvement contre le régime déchu de Ben Ali, en fuite,
a un nouveau président. Moncef Marzouki,
qui a prêté serment, hier mardi, au Palais de Carthage où il a pris ses
nouveaux quartiers de chef de l'Etat tunisien, réalise un rêve. A 66 ans, ce
désormais ancien opposant historique au régime de Zine
El-Abidine Ben Ali, qui a passé 10 années d'exil en
France, avait annoncé sa candidature à la présidence de la République deux
jours après la chute, en janvier, de l'ex-dirigeant.
Durant la prestation de serment, les larmes aux yeux, il a rendu hommage aux "martyrs de la Révolution". "Sans leur sacrifice, je ne serais pas là à cet endroit", a-t-il dit les larmes aux yeux, avant de "prier aussi pour les peuples syrien et yéménite". "Le principal défi est de réaliser les objectifs de la révolution. D'autres nations nous regardent comme un laboratoire de la démocratie", a-t-il ajouté, en appelant à la "réconciliation" en Tunisie. Un vaste chantier attend en fait le nouveau président, à commencer par nommer, dès aujourd'hui, le chef de gouvernement, qui devrait être Hamadi Jebali, le numéro deux d'Ennahda, vainqueur des élections législatives anticipées d'octobre dernier. Le partage de pouvoir a été décidé entre les trois partis vainqueurs de ces élections: Ennahda, et les deux partis de la gauche, le CPR (Congrès pour la République) et Ettakatol, dont le N°1 Mustapha Benjaafar assure le fonctionnement de l'Assemblée constituante, qui a voté tard dans la soirée de dimanche les textes de la Constituante. Ce texte, qui régit l'organisation des pouvoirs pendant la période transitoire jusqu'aux prochaines élections générales, a été voté par 141 voix contre 37 et 39 abstentions, après cinq jours de débats intenses et houleux. Son adoption constituait le préalable à l'élection du président et la formation du gouvernement. Le texte définit notamment les prérogatives des trois "têtes" de l'Etat, le président de la République, le chef du gouvernement et le président de la Constituante (Mustapha Ben Jaafar). Moncef Marzouki, dirigeant du CPR, a été élu par 153 voix pour, 3 contre, 2 abstentions et 44 votes blancs sur un total de 202 votants sur les 217 membres de l'Assemblée. La prestation de serment du premier président tunisien de l'ère post-Ben Ali a été solennelle: vêtu d'un burnous, il a promis d'être le "président de tous les Tunisiens" et de "n'épargner aucun effort" pour améliorer la vie de ses compatriotes. Et, à l'adresse de ceux qui agitent déjà le spectre d'une république islamique tunisienne, il dira que ''notre mission est de promouvoir notre identité arabo-musulmane et d'être ouverts à l'étranger, de protéger les voilées et les filles en nique comme les non voilées". Un message clair pour tous ceux qui doutent d'une Tunisie ouverte à toutes les tendances, qu'elles soient religieuses, politiques ou culturelles. L'investiture de Marzouki ouvre la voie à la nomination d'un gouvernement qui aura la lourde charge de redresser l'économie du pays, relancer les investissements et la confiance des partenaires étrangers et créer de l'emploi dans un pays où le taux de chômage est de plus de 18%, le plus élevé du Maghreb. Pour le chef de gouvernement, qui sera désigné aujourd'hui, il s'agit surtout de calmer les appréhensions sociales et les craintes d'une récession en Tunisie, et, surtout, de trouver des solutions urgentes au problème du chômage, qui a été en décembre 2010 l'étincelle qui a fait tomber le régime du clan Ben Ali. Le président Abdelaziz Bouteflika a félicité, lundi, Moncef Marzouki, l'assurant de sa ''ferme détermination à oeuvrer à la consolidation des liens de fraternité et des relations de coopération privilégiées unissant les deux pays au mieux des intérêts de nos deux peuples frères". M. Bouteflika a été l'un des premiers chefs d'Etat à féliciter le premier président tunisien élu démocratiquement, après plus de 20 ans de dictature. Une promptitude qui peut être décryptée comme un puissant signal d'Alger pour le nouveau pouvoir à Tunis, qui devrait multiplier les appels de soutien dans cette phase délicate d'un nouveau départ du pays, autant sur le plan politique qu'économique. Une année, jour pour jour, après l'immolation dans un village oublié de l'arrière-pays, Sidi Bouzid, d'un vendeur ambulant, pour protester contre la ''hogra''. La suite, c'était le raz de marée du Printemps arabe, qui continue au Yémen et en Syrie, après l'Egypte, et la Libye. |
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