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Tout
récemment, le vice-président américain Joe Biden, de passage savamment planifié à Beyrouth, capitale
du Liban, s'est fendu d'une déclaration suintante de cynisme et alarmante à
souhait compte tenu des évènements se déroulant dans la Syrie voisine. Biden n'a rien moins que mis en garde le monde contre la
prétendue menace d'une confrontation à caractère religieux dans toute la région,
dont le régime syrien sera le déclencheur par son refus de se plier aux
injonctions internationales le sommant de s'effacer du pouvoir.
Peut-être que la Syrie va sombrer dans ce scénario dont Joe Biden impute la responsabilité à Bachar El-Assad et son régime. Mais le reste du monde arabe n'a pas attendu qu'éclate la crise syrienne pour devenir le théâtre de cette sorte de confrontation que le vice-président américain a hypocritement dit que lui et l'Amérique la redoutent. Là où dans le Moyen-Orient les populations s'affrontent au nom de leurs identités religieuses, l'Amérique n'est pas innocente et étrangère à la situation. Ce sont des confrontations auxquelles ses stratèges ont sournoisement et durablement préparé le terrain en exacerbant les antagonismes religieux réels existants. Contrairement à ce qu'elles proclament officiellement, l'Amérique et les puissances occidentales ne sont nullement opposées à ce que le Moyen-Orient bascule aux couleurs de l'islamisme politique. Peu leur importe que celui-ci soit sunnite ou chiite, pourvu que les Etats dont il a la charge ne constituent pas une menace à tout point de vue pour leurs intérêts géopolitiques, économiques et pour la sécurité de leur protégé local, l'Etat sioniste. Il est absolument naïf de croire que la vague verte qui déferle présentement sur le monde arabe et au Maghreb suscite des inquiétudes existentielles pour ces puissances occidentales. Pourtant, c'est bien cette vague qui propulse les islamistes au pouvoir qui est potentiellement porteuse de la menace sur laquelle Joe Biden a mis en garde le monde. Mais à l'évidence, l'Amérique et l'Europe s'en accommodent sans grande crainte. Et pour cause : l'islamisme politique a toujours fait le jeu de leurs stratégies. Son anti-occidentalisme a de tout temps été factuel et de façade et jamais irréductible au point d'être conflictuel avec l'Occident sur les intérêts fondamentaux qui sont les siens dans le monde arabe, dans le monde musulman ou ailleurs sur la planète. Les islamistes qui accèdent au pouvoir se sont empressés d'ailleurs d'envoyer les signaux qu'il faut en direction de l'Occident pour le rassurer sur leurs bonnes intentions à l'égard de ses intérêts primordiaux. En contrepartie, l'Amérique et l'Occident se montreront très conciliants à leurs égards en faisant valoir qu'ils sont arrivés au pouvoir par la voie démocratique des urnes. Ils se montreront moins révulsifs à l'instauration de leur projet de société, quitte à en dénoncer de temps à autre et tout symboliquement les aspects choquants pour les valeurs humanistes, les principes libertaires et les droits des personnes. L'Amérique et l'Occident se sont faits à une durable cœxistence avec des pouvoirs islamistes : ce à quoi les a préparés celle qu'ils ont avec les monarchies de la péninsule Arabique, avec tous les immenses bénéfices qu'ils en retirent. Libre à qui veut de voir dans ce point de vue la manifestation d'un penchant de son auteur pour la «théorie du complot». Le monde arabe sous la botte des dictatures, l'invasion de l'Irak, et plus loin encore le coup d'Etat contre Mossadegh, l'agression tripartite de Suez en 1956, n'ont-ils pas été le fruit de complots désormais connus dans leurs moindres péripéties et les auteurs déterminants définitivement identifiés ? |
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