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Tous les
politiciens, en course à n'importe quel mandat, promettent le changement dans
leurs programmes. Cependant, les acceptions et les intellections sont
différentes d'un candidat à l'autre. Et chacun de ceux auxquels s'adresse le
programme se sent rassuré. Chacun retrouve ce qu'il attend. Mais au fait,
quelle est l'idéologie du changement ?
Cette transformation, cette évolution, ce remplacement, cette mutation, ce transfert, et tous leurs dispositifs, concernent soit les personnes ou bien les choses. Cette modification, cette instabilité. Ces métamorphoses, ces aiguillages. Ces dénaturations et ces falsifications, sont au final, encastrables et partout enchâssables. C'est la preuve par neuf de la polysémie. Les changements sont tantôt doux, tantôt violents, il y a les changements dans la continuité, euphémisme primaire, blouseur pour nigaud, signifiant, staut quo, stand bye. On reprend les mêmes et on recommence. Mais quand on est en charge de l'essentiel, dans une société, quel changement proposer, au segment fondamental d'un peuple : ses jeunes ? Il faudrait que les changements proposés épousent les nécessités du moment de vie de ces jeunes. Ensuite, il faut conceptualiser pour mettre en œuvre ces changements qui permettront d'aider les jeunes pour vivre normalement. Au plan psychologique, au plan physique et sur le plan économique, leurs vies. Les angles d'attaque, et sans être péremptoire, pour y parvenir, ne peuvent être que, l'éducation, les formations, les apprentissages, une offre de développement des potentialités, et la promotion de tous les talents, quel qu'ils soient. Pour cela il faut des programmes adaptés au siècle où vivent ces jeunes, élaborés par des adultes n'ayant aucune prétention de prendre pour eux, de ce qui est justement dû à ces jeunes. Hannah Arendt disait : «Former une génération nouvelle pour un monde nouveau traduit en fait le désir de refuser aux nouveaux arrivants leurs chances d'innover». Et c'est là où les changements perdent de leurs sens et de leur efficacité, s'enfoncent et échouent, mais seulement pour les jeunes. Et ici, nous pouvons évoquer une idéologie, sinon une philosophie, qui servira de pierre angulaire et d'étais sur lesquels, reposeront les programmes de préparation destinés aux jeunes. C'est un système projet de société basé sur ces principes : le seul parcours pour l'accès à la promotion sociale, à tous les niveaux que propose la nation, et dans tous les domaines. C'est réussir par ses propres moyens, sa scolarité, de l'école primaire aux post-graduations. C'est être compétent, c'est-à-dire savoir faire convenablement une chose, à la fin d'une des formations, que proposent, en Algérie, les centres de formation professionnelle et de l'apprentissage. Et enfin exercer d'une manière brillante, extraordinaire et merveilleuse ses talents. C'est une éthique à implémenter dès le début chez les jeunes, auxquels les adultes auront donné l'exemple, dans les familles, dans tous les établissements d'éducation et de formation, et pareillement dans tous les espaces et environnements de la vie au quotidien. Ce qui est ici remis en cause, ce sont les contenus des programmes scolaires, universitaires, et ceux des diverses formations et apprentissages, ainsi que l'inadaptation des méthodes. Mais surtout les échecs et la capitulation de la ressource humaine en charge d'inculquer ces programmes. Il est devenu machinal qu'à chaque journal télévisé traitant de l'université, de pôles ou bien de centres universitaires nouveaux, d'entendre le journaliste, et les responsables universitaires évoquer, le nombre de lits réalisés et la quantité de places pédagogiques offertes. A quand un sujet au J.T valorisant ce que proposent ces établissements académiques. La recherche scientifique, le nombre de doctorants, les publications, les intégrations des résultats des recherches dans le développement de l'homme, et de l'économie nationale. Donc nos institutions qui ont vocation à préparer nos jeunes à cheminer paisiblement, en travaillant dur, sur les parcours de la promotion sociale à égalité des chances, font dans le quantitatif. Ce qui se traduit sur le marché du travail par une inadéquation de l'offre quantitative par rapport à la demande qualitative. Ce qui produit ce genre de chômage, bien chez nous. Car par ailleurs, et ce qui confirme cette inappropriation du produit, par rapport à la demande du marché. Le produit formation de quelques rares établissements universitaires publics algériens, est très convoité et s'arrache, dès la fin des études, par des bureaux d'études, des cabinets conseils internationaux, des banques à rayonnement intercontinental, des entreprises étrangères de tous les secteurs et les nombreux bureaux de liaison, présents en Algérie. Aux autres et qui sont de loin les plus nombreux, les pouvoirs publics proposent maints dispositifs, pour les insérer dans le marché du travail, avec des résultats jusqu'à présent mitigés, considérant l'absence contre productive, d'évaluations d'impact. On ne traite pas du substrat de ces dispositifs, mais au contraire, certains, à dessein, s'obstinent à leur trouver des tares, et focalisent opiniâtrement sur leurs détails. Ils soufflent sournoisement sur la fibre la plus sensible, pour faire abandonner, renoncer, et faire lâcher ceux auxquels sont destinés ces dispositifs, sans risque aucun qu'ils reviennent, redemander ce qui leur est, légalement dû. Tous les dispositifs d'aide aux jeunes, qu'offre l'Etat, comportent, ce qui va de soi, l'octroi de crédit dont la plupart sont accordés à taux d'intérêt, zéro. Qu'il s'agisse de l'Agence Nationale de Soutien à l'Emploi des Jeunes -l'ANSEJ-, de l'Agence National du Micro-crédit- ANGEM- ou bien de la Caisse Nationale des Allocations Chômage -CNAC. Les seuls intérêts exigibles sont ceux relatifs à la partie prêt bancaire, quand elle existe, et encore, à un taux de 1 %. C'est-à-dire insignifiants, pas de la nature, de l'usure, riba. Lors des journées de concertations avec la population de la wilaya d'Alger, les 9 et 10 novembre 2011, organisées par le Conseil National Economique et Social, au palais des nations à club des pins. La quasi majorité des jeunes et des imams qui avaient pris la parole, avaient insisté, sur un seul point concernant les trois dispositifs. A savoir l'existence d'un taux d'intérêt, qu'ils avaient tous appelé, les pouvoirs publics à faire disparaître. J'étais présent, je peux en témoigner. Quelle en est la cause. L'intérêt est selon tous ces intervenants Haram. Effectivement dans le milieu ambiant, de pareilles affirmations, font chorus et passent pour être conformes au dogme, et qu'il n'y a pas lieu d'en discuter. Et que par conséquent, les programmes initiés par l'Etat, et mis en pratiques par des agents de l'Etat, en direction des jeunes, se font en méconnaissance, sinon contre des prescriptions religieuses. Et subitement, cela désocialise tous ces dispositifs, les disqualifie aux yeux des chromeurs, les rend douteux, les fait échouer, et au final prive les jeunes de se prendre en charge, et socialement se promouvoir. C'est un ébrèchement et des lézardes à la solidarité nationale en direction de la force vive du pays : sa jeunesse. Quel comportement, auront, un jeune homme ou une jeune fille, déjà tourmentés par leurs situations de chômeurs, de lire des réponses d'un cheikh, publiées par des journaux algériens arabophones, à grand tirage, destinées à d'autres jeunes qui veulent être situés quant à l'admissibilité ou non par la religion musulmane de l'aide financière, qu'alloue, le Fonds National de Soutien à l'Emploi des Jeunes. Quand ils lisent ceci :« A l'origine, ce n'est pas admissible, la yadjouz, parce que, c'est une relation basée sur l'usure ». Et lui réciter une partie du verset 275 de la Soura II : «Dieu autorise la vente et prohibe l'usure». Et le verset 278 de la même Soura : «Vous qui croyez prémunissez-vous envers Dieu, abandonnez ce qu'il vous reste à percevoir d'usuraire si vous êtes croyants » . Après cela, le cheikh, conseillera à ces jeunes de rechercher d'autres voies pour trouver du travail, sinon d'accepter contraint - au sens où ce mot est religieusement entendu et compris-, les aides des dispositifs de soutien à l'emploi des jeunes, qu'offre l'Etat. Ici, n'est pas pour moi l'espace de discuter cette approche exégétique, mais je mesure l'ampleur des dégâts et des dommages irréversibles que causent pareilles affirmations, dans un milieu de jeunes, où l'appréhension de problèmes séculiers et la recherche de leurs solutions, sont conditionnées par, et uniquement, le référent religieux, quelque soit son authenticité, du moment qu'il est prononcé par un cheikh. En pratique,dans l'imaginaire de nos jeunes, que valent des décrets présidentiels,ou bien exécutifs, publiés au journal officiel de la république algérienne,procurant des avantages matériels terrestres et terriens,face à une fetwa étayée par de versets du Coran,même sortis de leur véritables sens et contextes. Cependant, pour montrer qu'il existe d'autres d'approches plus outillées, qui traitent du problème de l'usure au sens religieux. Je citerais, ce que feu, Mohamed Charfi, le professeur émérite à la faculté des sciences juridiques de Tunis, décédé en 2008, ancien président de la ligue tunisienne des droits de l'homme 1988/1989, et ancien ministre de l'éducation et des sciences de son pays, 1989/1994,dit à la page 128 de son ouvrage Islam et liberté, paru aux éditions Albin Michel en 1998:'' l'origine de cette prohibition se trouve dans la condamnation du riba par le Coran et par l'interprétation de cette notion par les théologiens. Nous distinguons aujourd'hui d'une part le prêt à intérêt à un taux raisonnable, qui est permis par la loi, réglementé et contrôler par l'institut d'émission et qui rend les meilleurs services à l'économie, et, d'autre part, l'usure, qui est illégale parce que les taux sont excessifs, immoraux et néfastes pour l'économie. Mais les théologiens, n'ont pas pensé à cette distinction qui, à l'époque, n'existait pas et ont, de ce fait, interprété le riba comme étant non seulement l'usure mais tout prêt à intérêt même minime. Pourtant la définition de cette notion telle que suggérée par le Coran fait penser beaucoup plus à l'usure caractérisée qu'au simple prêt à intérêt raisonnable. Le verset 125 de la Soura III « la famille Omrane » dit : «O vous qui croyez, ne vivez pas de l'usure (produisant le) double deux fois». C'est là, poursuit-il, une allusion claire à la pratique antérieure à l'islam en Arabie où l'emprunteur devait rembourser le double de la somme ou de la quantité qu'il avait empruntée. Le taux était donc de 100 %. Et le débiteur qui n'arrivait pas à rembourser sa dette à terme échu et qui obtenait un délai de grâce devait rembourser le double du double ; sinon, il devenait l'esclave de son créancier. Voila ce que le Coran a interdit, conclut-il. Chacun des lecteurs se fera sa propre opinion sur cette question. Mais la première interprétation fait beaucoup de casse et ses promoteurs, après l'avoir généralisée dans tous les milieux, réduisent depuis, l'aide de l'Etat en direction des jeunes chômeurs, à leur trouver des places de commerçants. Ils ont érigé ces aides, en principe qui n'envisage la relation à la vie, que patrimoniale. C'est-à-dire, qu'en biens matériels, en capital, en propriété, en fortunes, et en richesses. En pratique, aider les jeunes, cela se résume dans l'imaginaire, récemment travaillé, par diverses voix, à leur faciliter l'accès au commerce. Mais à quel niveau ? La vente de produits finis, et particulièrement ceux importés. Il s'agit de leur faciliter l'inscription au registre de commerce, et de régulariser le commerce informel, et à offrir à tous les jeunes qui le demandent des locaux, des étals, des tables, des carreaux, pour ce faire .Cela ne demande aucune formation aucune qualification. Il s'agit seulement de posséder le capital de départ. Et les bayeurs de fonds qui ne sont plus des jeunes, sont nombreux sur ce créneau. C'est une démarche létale pour toutes les formations, pour tous les apprentissages. Et subséquemment pour tous les dispositifs d'aide de l'Etat, en direction des jeunes. Ceux qui veulent dévoyer toutes ces constructions, très coûteuses, en matière de transferts sociaux engagés par les pouvoirs publics, sont ceux là même qui promeuvent la politique du souk et la mentalité bazarie .Sauf que dans les pays où les bazars sont ancestraux, les produits vendus, sont cultivés, sinon conçus, façonnés, et travailler sur place. À un taux très élevé d'intégration et une haute valeur ajoutée de savoirs faire. Alors quels changements entreprendre ? Commencer par réduire drastiquement, la gratuité, c'est-à-dire, ce que l'on reçoit contre rien, ce qui ne coûte rien à son bénéficiaire, d'où sa non valeur pour le récipiendaire. Ceux auxquels s'adressent ces aides de l'Etat, ne sont pas des personnes, à besoins spécifiques. Ce sont des jeunes valides et normalement constitués. A cet effet, ils doivent quelque chose contre ce que leur offre la nation. Sinon la donne et l'équation sont faussées, et les résultats seront à fortiori, si ce n'est déjà le cas, socialement cataclysmiques. Et ici, la question concerne le culturel. C'est-à-dire ce qui est acquis par rapport à ce qui est inné. Et ce bagage culturel acquis est composé, de ce qui deviendra le cadre de références, qui sera consulté, à chaque fois qu'il y a problèmes, difficultés, crises, angoisses, dangers, détresses et bien sur chômage. Il englobera, l'éducatif, l'instructif, l'esthétique,le cultuel, le rituel, l'imaginaire, le mythique,le mystique,le réel, l'irréel, le légendaire, les ancêtres,le territoire, l'histoire,les hommes, les femmes, leurs victoires, leurs défaite,leurs héroïsme et rarement leurs crimes,leurs indignités et leurs veuleries. C'est aussi l'approche, amicale ou belliqueuse, de l'autre et de son propre cadre de références etc. Tout cela pour trouver les réponses, les règlements et les dénouements. Toutefois, quand tout ou presque devient accessible, sans réussites scolaires, sans mérites universitaires, sans habiletés, ni habilités professionnelles, et avec l'absence d'exploits dans l'exercice des talents. Ne demeurent alors comme références, que ce qui a été légèrement sculpté par l'acquis, c'est-à-dire la facilité, la filouterie, la fraude et la triche, la tromperie, les abus et la malpropreté. Ainsi la boucle est bouclée, et les politiques, les hommes et les femmes, qui proposent des changements pour aider nos jeunes, pour retrouver les chemins du travail peuvent, sans faire table rase de tout ce qui existe. Procédez à des changements, en recréant l'école de l'unique cheminement vers la promotion sociale à tous les niveaux, des organigrammes que propose l'Algérie et dans tous les domaines, qui constituent ses institutions, ses assemblées élues, ses organisations, ses établissement, ses partis politiques, et toutes les composantes de sa société civile. Ce sera difficile, mais ce n'est pas impossible. Dès lors, à cette étape, qui aura vu passer, une ou bien deux générations, les changements proposés par les politiques, auront peut-être aidé les jeunes. Mais quand tous les politiques, les hommes et les femmes, pressés par les échéances électorales, veulent tout et tout de suite. Ce sont eux et elles, qui, cristallisent et matérialisent cette impossibilité du changement. Ils planifient leurs actions sur le court terme, souvent dans la précipitation, car ils sont obnubilés, ils sont obsédés et ils sont tarabustés par la périodicité quinquennale des élections des différentes assemblées populaires, avec l'objectif fixation, de les remporter, une deuxième, une troisième fois, et plus, si possible. Alors faudrait-il que ceux et celles qui proposent des changements pour aider les jeunes, se souviennent, qu'ils avaient eux même, un jour été jeunes, et qu'ils avaient trouvé des adultes bénévoles, sans programmes politiques, qui les avaient en ce temps là aidés ? * - Jacques Berque. Traduction du Coran, éd ,Sindbad 1998 |
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