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Le sage de Rahouia

par El Yazid Dib

Il n'a pas fait l'université ni connu les longues veillées des révisions scolaires. Les siennes se firent par contre en contact de l'exégèse et des motifs génésiaques de la vie et de ses dépendances. Ses manuels n'étaient autres que la sainteté et l'action agissante des règles de la bienséance.

Le hameau fit de lui, voire de la profondeur qui animait ses entrailles, un leader incontesté, élu sans campagne, sans urnes ni bulletins de vote. Il devait ses auréoles aussi à une descendance imbue de préceptes, de bonté et grandeur de cœur. C'est en toute justesse que justement ce cœur acquiert en ses parois toute la vasteté des sollicitudes émises et des soucis sociétaux gémis ça et là.

Le vieux, propriétaire d'un fonds de valeur inépuisable, faisait de l'altruisme une monnaie courante qu'il dispensa dans un élan généreux, lui aussi inaltérable. Erudit dans les sciences du bon sens, la justice demandée chez lui ne se confinait pas dans la moitié des choses ou l'affectation d'un tord à l'un et d'une raison à l'autre. Le partage égalitaire ou l'équilibre façadier ne sont jamais une droiture ou une rectitude à son sens. Ce comportement suscité éternellement par une étrange inspiration l'a de tout marqué. La même réaction restait observable face à sa propre progéniture. Quand il voulut faire un prêt, dans une poche familiale, il ne le prenait pas comme offrande ou un don gratifiant ses nombreux sacrifices, mais lui assurait une issue libératoire. Quand il voulut faire taire un conflit, il puisait de son propre trésor pour taire une créance ou et éteindre une dette. Sa patrie s'appelait, vers 1906, Montgolfier, mais s'étalait sur tout le tissu national. Il lui arrivait souvent d'être au cœur d'une impasse, d'une tourmente, mais vite la résolution extatique, comme un oracle divin, le surprend en pleine dévotion.

Si comme aucune la hiérarchie ne vienne pour s'établir entre une doléance, la sienne, et l'acquiescement du pouvoir unique et exclusif. Presque tout près de Dieu, il craignait, car craint le sort et se morfondait à l'égard de la turpitude et de l'insolence de la vie mais aussi de ses dépendances. Tel un tamis où viennent s'asseoir les scories pour en libérer le bien et la philanthropie. Tout s'arrêtait par-devant sa stature.

A sa mort, un villageois parlait que la foule a perdu en lui « une cale ». Celle qui faisait de la rétention de l'antipathie et de la haine, une joie et un bonheur villageois.