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Algérie : les compagnies privées maintiennent le secteur des assurances à flot

par Yazid Taleb

Très loin des progrès attendus et annoncés au cours des dernières années, les performances globales du secteur des assurances sont, depuis maintenant près de 18 mois, particulièrement médiocres et plombées par les résultats des compagnies publiques. Seules les compagnies privées parviennent à tirer leur épingle du jeu.

Le Conseil national des assurances (CNA) annonçait récemment un chiffre d'affaires de 81 milliards de dinars et une croissance poussive de 4% pour le secteur algérien des assurances en 2010. Des performances qui correspondent, compte tenu de l'inflation, à une quasi-stagnation de l'activité .Ils contrastent avec le taux de 12% annoncé en 2009 qui avait pu faire croire que le secteur des assurances se situait sur une dynamique positive. Le plus inquiétant est que les premiers résultats connus en 2011, qui concernent le premier trimestre, prolongent et aggravent la tendance de 2010 .Le dernier rapport de conjoncture du CNA, publié au cours de l'été dernier, annonce carrément une baisse de l'activité de 2% par rapport à la même période de l'année dernière. La seule bonne nouvelle dans ce tableau aux couleurs assez sombres est constituée par l'évolution favorable des assurances de personnes dont le chiffre d'affaires est en hausse de plus de 25% avec près de 9% de part de marché en 2010. Une augmentation qui s'est néanmoins ralentie fortement au premier semestre 2011 puisque le taux de croissance de la branche n'est plus que de 3%.

LA PERCEE DES COMPAGNIES PRIVEES

Les contre-performances récentes des assurances algériennes n'empêchent pas les compagnies privées de faire de bonnes affaires et de continuer à augmenter régulièrement leur part de marché. La suppression du monopole de l'Etat depuis 1995 a principalement profité à un petit nombre de compagnies privées qui ont manifesté un réel dynamisme en élargissant la gamme des produits offerts à la clientèle et en pratiquant une sévère concurrence sur les tarifs. Avec un chiffre d'affaires de 20,4 milliards de dinars en 2010, en hausse de 12,5% comparativement à l'année 2009, les sociétés d'assurance à capitaux privés ont réalisé 25,3% de la production totale du marché. La percée des compagnies privées semble en outre se confirmer et s'accélérer en 2011. Au premier trimestre leur chiffre d'affaires est de nouveau en forte hausse et dépasse 7 milliards de dinars tandis que leur part de marché est désormais proche de 30%. Le principal pilier de la croissance des compagnies privées était constitué au cours des dernières années par la branche auto. Plus encore que leurs consoeurs du secteur public, elles ont su exploiter, selon le CNA, la croissance rapide «d'un parc automobile de plus en plus jeune, incitant à la souscription aux garanties dommages et qui s'est réalisée malgré la suppression des crédits à la consommation intervenue en septembre 2009». Plus de 60% du chiffre d'affaires des compagnies privées était l'année dernière réalisé par la branche de l'assurance automobile concentrée dans le segment particulièrement rentable des garanties facultatives. Dans ce dernier domaine, les compagnies privées détiennent désormais près d'un tiers du marché algérien.

COUP D'ARRET POUR LES ASSURANCES DE PERSONNES

Un autre domaine d'activité s'annonçait jusqu'à une date récente comme particulièrement prometteur pour les assureurs privés .Il s'agit de la branche à fort potentiel et en développement rapide des assurances de personnes dans laquelle, selon les données récentes fournies par le CNA, ils faisaient quasiment jeu égal en terme de chiffre d'affaires au premier trimestre 2011 avec les compagnies publiques. Une croissance des assurances de personnes qui risque fort de connaître un coup d'arrêt brutal au cours des mois à venir. Depuis le 1er juillet 2011, l'ensemble des compagnies d'assurances ont été tenues de séparer les assurances de personnes et les assurances de dommages. Les sociétés n'ayant pas opté pour la création de filiale d'assurance de personnes peuvent néanmoins poursuivre la gestion des contrats jusqu'à extinction de leurs effets ou transférer, en totalité ou en partie, leur portefeuille de contrats à une ou plusieurs sociétés d'assurances agréées. Une note du ministère des Finances datée du 2 juin 2011 a précisé le mode opératoire à mettre en œuvre pour réaliser l'opération de séparation des deux activités et a levé un certain nombre d'ambiguïtés (sort du portefeuille d'assurance de personnes appartenant à la société d'assurance «dommages», commercialisation des produits d'assurance de personnes).

 Jusqu'à ces dernières semaines seules les trois compagnies publiques avaient constitué des filiales spécialisées et étaient donc autorisées à souscrire et à commercialiser des produits d'assurance de personnes. Il s'agit Taamine Life Algérie, filiale de la CAAT, CAARAMA Assurance, filiale de la CAAR et de la Société de prévoyance et de santé (SAPS), filiale issue d'un partenariat entre la SAA et la compagnie française Macif. Soulignons également la présence ces dernières années sur le marché algérien de Cardif El Djazaïr, filiale du français BNP Paribas Assurance qui a été constitué d'emblée en société d'assurance de personnes. Elles ont été rejointes tout récemment par la nouvelle compagnie MACIR-VIE créée par la CIAR, première compagnie privée algérienne par le chiffre d'affaires. On attend également la prochaine entrée en lice du groupe AXA associé à la BEA ( le groupe devrait dévoiler officiellement ses projets dans une quinzaine de jours). Le secrétaire permanent du CNA, M. M. Abdel Hakim Benbouabellah assurait en outre voici quelques semaines que «d'autres sociétés spécialisées en assurance de personnes sont en voie de constitution et de création». Le paysage du secteur algérien des assurances, en pleine recomposition, pourrait donc encore évoluer rapidement avant de retrouver des rythmes de croissance plus en rapport avec le potentiel reconnu du marché.