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Autant
les Algériens se sont enthousiasmés pour les révolutions du «jasmin» en Tunisie
et de la place «Tahrir» en Egypte et ont exprimé à
leur égard un sentiment de solidarité unanime, autant leurs avis et opinions se
sont faits divergents dans l'appréciation de la révolte populaire qui est venue
à bout du régime de l'ex-guide de la révolution libyenne et de celle en cours
en Syrie contre celui de Bachar el-Assad.
La fracture provoquée dans l'opinion publique algérienne par ces deux mouvements ne provient pas du fait qu'il se trouverait des Algériens pour considérer que les dictateurs libyens et syriens et leurs régimes ne méritent pas d'être jetés à la poubelle de l'histoire par leurs peuples, comme l'ont été ceux de la Tunisie et de l'Egypte. Pour preuve, il y a eu expression de solidarité unanime dans cette opinion avec les manifestants et insurgés libyens au début de leur révolte contre le pouvoir kadhafiste. Il en a été de même quand la rue syrienne s'est embrasée. Le flottement puis les divergences sont apparus au sein de cette opinion dès lors qu'il a été question d'une intervention militaire étrangère dans ces deux crises, dont beaucoup de citoyens font désormais la lecture que, contrairement aux révolutions tunisienne et égyptienne qui ont été l'œuvre des peuples de ces pays, elles résultent de manipulations extérieures aux visées ne se limitant pas à faire aboutir les aspirations des Libyens et des Syriens à en finir avec les régimes despotiques dont ils ont pâti ou pâtissent encore depuis des décennies. D'autres, par contre, ne manifestent aucune réticence pour l'intervention étrangère au principe de la disproportion de force entre les insurgés hier en Libye et aujourd'hui en Syrie et les régimes dictatoriaux auxquels ils ont décidé de se confronter. La façon dont les puissances étrangères sont intervenues en Libye a conforté les tenants du premier courant d'opinion dans leur refus d'une récidive du scénario libyen à la crise syrienne, alors que ceux du second persistent à faire valoir que l'intervention étrangère s'impose en Syrie pour protéger sa population et hâter la chute du régime d'al-Assad. De quelque bord qu'ils se situent par la façon dont ils perçoivent les développements induits par les révoltes populaires qui sont à l'œuvre dans le monde arabe, les citoyens algériens sont conscients que de formidables enjeux sont en cause. Les uns croient voir le déroulement d'un plan impérialiste dont les promoteurs surfent sur la colère et le désespoir provoqués au sein des peuples arabes par leurs régimes dictatoriaux et prédateurs, les attisent et les manipulent pour reconfigurer à leur convenance la carte politique régionale. Les autres, que c'est un passage obligé pour que les peuples arabes accèdent à la dignité, aux libertés et à la démocratie. Ce qui se passe post révolutions abouties d'une manière ou d'une autre en Tunisie, en Egypte et en Libye est peu probant de la justesse du point de vue de ces derniers. Ils sont mal venus alors quand ils agitent le péril pour l'Algérie que, sous prétexte de revendiquer la démocratie et les libertés du peuple et des citoyens, des forces s'activent à rendre possible la substitution d'une dictature par une autre. Dans ce monde arabe «compliqué», la boîte de Pandore a été ouverte et nul n'est prophète pour dire sans se tromper ce qu'il en sortira. Sera-t-il conforme à la prévision pessimiste des anti-interventions étrangères ou à celle de ceux qui les créditent d'apporter des lendemains qui chantent pour la région et ses peuples ? |
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