« Grève», «boycott des audiences», «cessation de travail», «abstention de
prestations des services»? Les intitulés de l'action orchestrée par les robes
noires, entrée dans sa deuxième et avant-dernière journée hier, divergeaient
d'un barreau à l'autre, d'un avocat à l'autre. En tous les cas, les avocats
n'ont pas enfilé, hier encore, leurs toges à l'appel de leur représentation
professionnelle, l'Union nationale des barreaux d'Algérie, pour revendiquer
l'amendement du projet de loi réglementant la profession d'avocat à travers
certains articles, soit le « minimum consensuel » dégagé au forceps, à l'issue
de l'assemblée générale de l'UNBA de Béjaïa, qui avait réuni autour de la table, les bâtonniers
des quinze barreaux du pays. Une action de protestation qui a paralysé, pour le
deuxième jour consécutif, l'ensemble des tribunaux ou réduit, dans les
meilleurs cas, bon nombre d'entre eux à une sorte de service d'état-civil
délivrant casiers judiciaires et certificats de nationnalité.
Formalités obligent, les audiences ont eu lieu malgré la certitude acquise
d'avance qu'il n'y aura pas la partie défense. Et, donc, pas de procès non plus.
Aussi les magistrats ont-ils dû répéter la même «chanson» à chaque appel d'un
dossier: «Affaire reportée», ou renvoyer le paquet de dossiers tout en bloc, justiables avec, à une date ultérieure.
Les audiences ont été suspendues expéditivement, les prétoires vidés
rapidement. D'autre part, le «suspense» qui entoure la cérémonie officielle
d'ouverture de l'année judiciaire, qui sera présidée -comme le veut les rituels-
par le président de la République, en sa qualité du premier magistrat du pays, était
l'un des sujets au centre des débats, dans le mileu
des avocats. Certains trouvent «anormal» que l'on n'ait pas annoncé à ce jour
la date de cet évènement, et y voient dans ce fait, une stratégie de
«temporisation» de la part des décideurs, qui, selon ces avocats, attendent
l'éclaircie de la situation avec la fin du mouvement de protestation des robes
noires, pour fixer la date de la cérémonie. Car, on ne peut même imaginer un
tel évènement de la justice sur fond de vague de contestations des porte-drapeaux
de la défense, encore moins sans la présence à la cour suprême de leurs
représentants. Entre autres signes, en tout cas, de l'éminence de cet évènement
polico-judiciaire, l'installation dans les grandes
cours, du matériel audiovisuel pour la transmission en direct via duplex de
cette cérémonie. Ceci alors que ni les chefs de cours ni les bâtonniers des
quinze barreaux, et à leur tête le président de l'UNBA,
n'ont reçu jusqu'à l'heure une invitation pour prendre part à cette cérémonie. Par
ailleurs, contacté hier dans l'après-midi, le président de l'Union nationale
des barreaux d'Algérie, Maître Lenouar, également le
bâtonnier de la région de Constantine, nous a affirmé que « pour sa seconde
journée, la grève des avocats se poursuit normalement à travers tout le
territoire national, dans le calme et dans les meilleures conditions». A une
question sur l'incidence sur le fonctionnement des cours et tribunaux», notre
interlocuteur a affirmé que «les juges se montrent très souples envers les
citoyens dans le traitement des affaires judiciaires et s'efforcent de renvoyer
les affaires à des dates déterminées».