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Karim Djoudi refait les comptes et ? réduit le déficit du Trésor

par Yazid Taleb

Le ministre de Finances, Karim Djoudi, n'est pas tout à fait sur la même longueur d'onde que le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, au sujet du recours au Fonds de régulation des recettes pour financer les engagements de l'Etat. Il s'est livré à une lecture inédite des comptes publics dont l'effet est de minimiser l'ampleur du déficit du Trésor public. De quoi se poser des questions sur l'utilité d'une loi de finances?

Le ministre des Finances M. Karim Djoudi a apporté, dans sa dernière intervention publique, des éclairages utiles sur la pratique budgétaire des autorités algériennes. Des éclairages qui se rapportent au projet de loi de finances 2012, en cours d'examen par l'APN, sur les exercices écoulés et les perspectives de moyen terme. M.Djoudi a d'abord contredit le Premier ministre M.Ahmed Ouyahia qui a déclaré à la presse, à l'occasion de la tripartite, que le Fonds de régulation des recettes (FRR) serait mis à contribution en 2011 et 2012 pour financer les engagements pris par l'Etat depuis le début de l'année. Le ministre des Finances a soutenu un point de vue inverse en soulignant tout d'abord que le montant des recettes abritées par le Fonds de régulation des recettes continuait d'augmenter et se situait fin 2010 à 4800 milliards de dinars. Le ministre des Finances a proposé en outre une lecture inédite des comptes publics. Pour lui, le déficit réel du Trésor public, représenté par la différence entre les encaissements et les décaissements enregistrés effectivement, est très éloigné des chiffres annoncés par les lois de finances de ces dernières années. Selon lui, «le déficit réel n'a pas dépassé 11% du PIB et il a même été réduit à moins de 5% grâce à l'utilisation des ressources internes au circuit du Trésor public». On est donc loin des déficits nominaux supérieurs à 30% annoncés en 2010 et 2011, voire des 25% prévus par le projet de budget pour 2012. Les députés qui planchent depuis quelques années sur des projets de loi de finances - dont on peut s'interroger sur l'utilité et la sincérité - apprécieront certainement les précisions apportées par le ministre des Finances. En tout état de cause M.Djoudi estime que le déficit du budget de l'Etat en 2012 devrait être couvert «par le recours à l'endettement interne mais sans aucun recours à l'endettement externe ni aux réserves de change». Dans le sillage de l'exposé des motifs de la loi de finances 2012 qui décrit «une conjoncture économique mondiale en 2011 globalement caractérisée par une situation financière chaotique avec la crise de l'endettement public dans les pays de la zone euro, la hausse du chômage, l'instabilité des marchés des matières premières, sur fond de fluctuation des cours du pétrole et la difficile lisibilité du marché des changes», le ministre des Finances relève en outre que des craintes pourraient provenir «de l'effet de la récession qui pourrait rattraper les économies européenne et américaine, et de son impact sur la croissance mondiale et les cours du marché pétrolier».Il se montre néanmoins confiant en se référant à des projections à moyen terme réalisées par les services de son ministère qui démontreraient que pour «des prix du pétrole maintenus au dessus de 75 dollars et prévus dans une fourchette de 75 à 90 dollars , il n'y aura pas de nécessité de recourir aux réserves de change du pays».

LA REDUCTION DES DEPENSES D'EQUIPEMENT EN QUESTION

L'une des caractéristiques principales du projet loi de finances 2012 et celle qui a suscité le plus de commentaires est, d'autre part, certainement constituée par le sabrage des dépenses d'équipement de l'Etat. Leur montant total, légèrement supérieur à 2.800 milliards de DA, est en baisse de près de 30% par rapport à la dotation de 2011. M.Karim Djoudi tente de justifier cette évolution en expliquant que «près de 85% des investissements inscrits au titre du programme quinquennal 2010-2014 ont déjà été pris en charge par les dernières lois de finances».Le ministre ajoute «il n'y aura pas d'augmentation des dépenses en capital car les projets avancent bien. Les seules augmentations programmées concernent les secteurs de l'habitat et de l'agriculture». On peut en déduire que la tendance à la réduction des dépenses d'équipement enregistrée pour la première fois depuis très longtemps avec le projet de loi de finances 2012 a de fortes chances de se poursuivre au cours des prochaines années ( au moins en 2013 voire en 2014). Et que cela augure donc d'un ralentissement sensible du rythme de programmation des projets d'investissement publics. Sur le chapitre de l'IRG (impôt sur le revenu global), M.Karim Djoudi est en accord avec le Premier ministre. Le ministre justifie le refus opposé par le gouvernement à la baisse de cet impôt proposée par l'UGTA en soulignant que cet impôt représente «20 à 25% d'une fiscalité ordinaire qui ne couvre désormais qu'un peu plus de 40% des dépenses de fonctionnement de l'Etat».