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Kayène tout !

par El-Guellil

Ceux qui n'ont pas été nourris par le chich kabeb, ceux qui ne connaissaient la pizza qu'à travers leur télé noir et blanc, doivent s'en rappeler. Le bon vieux temps des pénuries. Eh oui ! Que c'était le bon vieux temps ! On avait tous un salaire et un poste de travail. Des allocations devises. Le dinar était aussi fort que l'équipe nationale de foot. On habitait les appartements bien vacants, qui nous ont été cédés à presque rien, et par facilité. D'autres, au même moment ont acquis leurs châteaux aux mêmes prix, ce n'était pas un problème, on était contents de devenir propriétaire. C'était le bon vieux temps des pénuries, on était heureux de pouvoir trouver un bidou zit, un frigo, une plaquette d'oeufs espagnols, même qu'on riait de cette situation insolite qu'ils disaient les coqs du village, nos pas très cons citoyens. Dans les temps bénis de la pénurie les ménagères ne pouvaient pas planifier le menu. C'était au petit bonheur la chance. Cela dépendait des Capcs, des Ofla et des intermédiaires. On arrivait donc, poussés par nos couffins, au marché et tout se décidait sur place. S'il y a de la batata, le problème ne se posait pas. On avait le choix. Batata frite, batata boulangère, batata ragoût. Mais la purée de nous autres, c'est quand la batata se faisait rare. Alors là ya khouya ibanou les débrouillards. Avec oualou, chacun devait nourrir ghoualou ! Il est né alors un commerce, celui de la concomitance. Si tu voulais un kilo de pomme de terre il fallait prendre un kilo de carrota. Si vous en voulez deux, c'est un kilo de carrota et un kilo de navets. La pratique s'est généralisée. L'épicier ne te fournissait du beurre que si tu acceptais de prendre la semoule grosse comme des cailloux. La mairie ne te délivrait un extrait de naissance que si tu présentais ta carte de vote et j'en passe?

Aujourd'hui y'a plus de pénurie. Koulchi moujoud sur le marché. C'est la pénurie d'argent qui fait mal.