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La France vient d'avouer officiellement qu'elle exige sa part du pétrole libyen dans
un contexte qu'elle voudrait le plus brouillé avec l'Algérie.
Si les officiels français démentent l'existence d'une lettre transmise à l'émir du Qatar dans laquelle les membres du Conseil national de transition libyen (CNT) reconnaissent réserver 35% du pétrole de leur pays à la France, ils avouent cependant officiellement que la guerre qu'ils mènent contre Maâmar El Khadafi leur permet d'avoir des privilèges dans ce sens. L'acharnement de Sarkozy contre El Khadafi commence ainsi à dévoiler ses arrière-pensées. Ce n'est pas tant cette voracité dont il fait preuve qui étonne, puisqu'elle est évidente, mais c'est surtout le fait qu'elle soit exprimée aussi tôt, avant même que la guerre sarkozienne contre la Libye ne soit finie et ses nombreuses victimes ne soient enterrées. Les frappes de l'OTAN continuent de faire des ravages en vies humaines au nom de l'instauration de la démocratie et des droits citoyens. Mais il est clair que le président français n'a pas prévu de s'arrêter à «des détails » qu'il classerait volontiers dans le chapitre des dégâts collatéraux. Les intérêts dans la région sont trop importants pour qu'ils soient confondus ou remis en cause par le nombre de Libyens morts, aussi élevé soit-il. La tenue, jeudi dernier à Paris, de la conférence internationale «des amis de la Libye», une semaine à peine après la prise de Tripoli par l'OTAN, semble avoir été inscrite dans un agenda français bien ficelé avant même que la guerre ne soit déclenchée. Les pressions exercées par la France sur le Conseil de sécurité de l'ONU pour l'adoption de la résolution 1973 décrétant une zone d'exclusion aérienne sur la Libye ont été tellement fortes que l'on se demande si Sarkozy n'avait pas d'ores et déjà préparé minutieusement son plan d'attaques armées, ciblé ses objectifs et évalué ses intérêts. Il avait donc bien vu que le jeu en valait la chandelle. Privilèges libyens sur fond de rancœurs algériennes Les visées françaises sur la Libye ont dû prendre en compte toutes les caractéristiques de la région nord-africaine. Paris ne laisse planer aucun doute à cet effet. Il ne cache plus ses velléités de faire d'une pierre deux coups et ce, en «occupant» la Libye et en narguant en même temps l'Algérie tout en tentant de la faire plier à des exigences politiques, économiques et commerciales françaises qu'elle a toujours refusé de satisfaire. Jeudi, sur une des télévisions françaises publiques, le commentaire du journaliste en direct de l'Elysée, où se tenait la conférence «des amis de la Libye», avait bien résumé la situation. Il avait commencé par démentir l'existence de la lettre du CNT à l'émir du Qatar sur les visées de la France sur le pétrole libyen. Il a rappelé cependant « le droit » de la France de prétendre à des privilèges libyens dans ce domaine et ce, pour l'avoir aidé à se débarrasser d'El Khadafi. Le plus curieux est que le journaliste a lié cette demande de privilèges de la France à l'état de ses relations avec l'Algérie. Il a donc estimé que c'est de bonne guerre que la France veuille sa part du pétrole libyen, ce qui lui permettra de s'affranchir du pétrole et du gaz de l'Algérie «avec laquelle les relations continuent de s'envenimer». Connu des plateaux des télévisions françaises, particulièrement quand il s'agit d'expliquer les relations de la France avec les pays arabes, à leur tête l'Algérie, le commentateur de la télévision publique n'a trouvé aucune gêne à lier ce qui se passe en Libye aux rapports qu'entretient la France avec l'Algérie. La double revanche sarkozienne Il est clair que Paris ne pardonnera pas à Alger son refus de cautionner la démarche armée du CNT libyen sous les auspices de l'OTAN. A ne pas oublier qu'il lui retient, par ailleurs, son manque de flexibilité à l'égard des dossiers économiques français en Algérie. Il semble en plus que sa nomination de Jean-Pierre Raffarin comme vis-à-vis du ministre de l'Industrie, Mohamed Benmeradi, n'aurait pas eu les résultats escomptés puisqu'elle reconnaît par la voix de ses journalistes que les relations avec l'Algérie se sont encore envenimées. Les déplacements de l'ex-Premier ministre français à Alger n'auraient servi, selon certaines sources, qu'à distiller un discours que la réalité des relations politiques entre les deux pays contredit en grande partie. Il semblerait d'ailleurs que la mission de Raffarin a pris déjà fin sans pour autant que les entreprises françaises n'aient pu garder au moins le même niveau d'échanges qui existait avant que les deux gouvernements ne se soient entendus pour mettre en avant l'économique pour réussir leur partenariat. La France, nous dit-on, s'attelle à faire de 2012, où coïncident la tenue de ses élections présidentielles avec la commémoration du 50ème anniversaire de l'indépendance de l'Algérie, une année pour mener des campagnes médiatiques d'envergure sur la guerre de libération nationale et pour faire de l'émigration (particulièrement algérienne) un thème privilégié du discours électoral. Le feu vert aurait été donné à cet effet à tous les spécialistes français pour contrecarrer tout discours algérien susceptible de criminaliser la colonisation. C'est probablement une manière de Sarkozy de prendre sa revanche sur un pays qu'il peine à faire rallier à ses causes de type néocolonial avéré, l'exemple de la Libye pouvant en faire foi. |
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