Somalie: Cinq morts dans une fusillade, l'aide alimentaire pillée
par Mustafa Haji Abdinur De L'afp
Cinq victimes de la sécheresse et de la famine qui sévissent en Somalie
ont été tuées hier vendredi à Mogadiscio, lors d'une fusillade entre l'escorte
de sécurité d'un convoi du Programme alimentaire mondial (PAM) et des inconnus
armés venus piller l'aide alimentaire. Cet incident sécuritaire souligne les
conditions extrêmes dans lesquelles les organisations humanitaires travaillent
dans ce pays ravagé par 20 ans de guerre civile et confronté, selon l'ONU, à la
plus sévère crise humanitaire dans le monde aujourd'hui. La fusillade a éclaté
entre les assaillants et l'escorte de sécurité de l'aide alimentaire dans un
camp de déplacés du quartier de Badbado dans le sud
de Mogadiscio, une zone sous contrôle du gouvernement de transition somalien. Le
camp abrite plusieurs milliers de personnes déplacées par la sécheresse. Les
assaillants en uniforme ont pénétré dans le camp alors que les sinistrés
attendaient une distribution de nourriture fournie par le Programme alimentaire
mondial des Nations unies. «Tout le monde s'est mis à courir pour se mettre à
l'abri lorsque l'escorte de sécurité du convoi a échangé des coups de feu avec
les assaillants», a rapporté à l'AFP un des chauffeurs du convoi, Abdikadir Mohamed, selon lequel «cinq personnes ont été
tuées». «J'ai vu les cadavres de quatre personnes mais le bilan pourrait être
plus élevé», a indiqué à l'AFP un autre témoin, Mohamed Abdulahi.
«Des victimes sont à déplorer et nous nous efforçons de clarifier les
circonstances» de la fusillade, a déclaré à l'AFP une porte-parole du PAM à
Nairobi, Susannah Nicol. Ali Isa,
employé d'une ONG somalienne partenaire du PAM, a confirmé le vol d'aide, estimant
à 300 tonnes les stocks sur place au moment de l'incident. «L'aide alimentaire
a été entièrement pillée et il y a des victimes. Il s'agissait d'un convoi de 10
camions chargés de 300 tonnes d'aide que le PAM entendait distribuer dans le
camp», a-t-il affirmé. Selon plusieurs témoins, les inconnus armés sont
parvenus à quitter les lieux en volant une partie des stocks. Environ 100.000
Somaliens se sont réfugiés ces derniers mois à Mogadiscio, en dépit des combats
quasi quotidiens dans la capitale, chassés de leurs campagnes par la sécheresse
de grande ampleur qui touche la
Somalie et affecte plus généralement 12 millions de personnes
dans l'ensemble de la Corne
de l'Afrique. Trois régions du sud de la Somalie ainsi que les populations de déplacés du
corridor d'Afgoye et de Mogadiscio intra-muros ont
été déclarées en état de famine par les Nations unies. La fusillade du camp de Badbado vient rappeler les conditions extrêmes dans
lesquelles les organisations humanitaires somaliennes et internationales sont
amenées à opérer à Mogadiscio, y compris dans les districts sous contrôle du
gouvernement de transition. «Cet incident met en lumière les défis que rencontrent
les agences humanitaires en tentant d'apporter de l'aide dans cet environnement
très difficile», a ainsi souligné Mme Nicol. Les forces gouvernementales et
leurs alliés de la force de l'Union africaine (Amisom)
y affrontent, quasi quotidiennement, les insurgés islamistes radicaux shebab. Ces combats, qui peuvent éclater à tout moment, rendent
périlleux les déplacements des travailleurs humanitaires, malgré les escortes
armées et les véhicules blindés. Devant l'ampleur de la crise, l'agence de
l'ONU pour l'agriculture et l'alimentation (FAO) a réclamé vendredi une
intervention «de grande envergure». «En Somalie, 3,7 millions de personnes sont
en situation de crise, et 3,2 millions (dont 2,8 millions dans le sud du pays) ont
besoin d'une aide immédiate dont dépend leur survie», a rappelé la FAO. La Turquie a lancé
vendredi un appel à l'Organisation de la coopération islamique (OCI) pour
l'organisation d'une réunion d'urgence sur cette crise humanitaire.