A l'occasion des festivités d'accession au trône, le Roi du Maroc est une
nouvelle fois revenu à la charge pour rappeler qu'il
reste ouvert à toutes les démarches pour le règlement des différends entre
Alger et Rabat. Dans un discours marquant le 12ème anniversaire de son
accession au trône, Mohammed VI est intervenu personnellement, et pour la
première fois, pour rappeler que les frontières terrestres entre les deux pays
sont toujours fermées.
En affirmant que le Maroc tient ?' à l'amorce d'une nouvelle dynamique
ouverte sur le règlement de tous les problèmes en suspens, en prélude à une
normalisation totale des relations bilatérales entre nos deux pays frères'', le
souverain marocain n'omet pas d'intégrer à cette dynamique la réouverture des
frontières terrestres. Jusqu'à présent, le Roi laissait cette tâche à ses
ministres ou des chefs de partis, accessoirement à des intellectuels et des
hommes proches du Palais. Cette fois-ci, il a lui-même abordé directement la
réouverture des frontières comme un des éléments de cette ?'nouvelle
dynamique'' pour le règlement des différends entre les deux pays. La frontière
entre les deux pays a été fermée en 1994 à la suite de l'instauration du visa
pour les ressortissants algériens après l'attentat de l'hôtel Asni à Marrakech. Dans cette logique, le souverain a
souligné dans son discours que ?'le Maroc ne ménagera donc aucun effort pour
développer ses relations bilatérales avec les pays de la région. A cet égard, nous
prenons acte de l'évolution positive que connaissent les rencontres
ministérielles et sectorielles en cours, convenues avec l'Algérie.'' Pour lui, ?'cette
démarche exclut tout immobilisme ou ostracisme incompatible avec les liens de
bon voisinage, l'impératif d'intégration maghrébine et avec les attentes de la
communauté internationale et de notre espace régional.'' Des préalables qui
sont, par ailleurs, mis à rude épreuve un peu plus loin dans ce discours par
l'option sans équivoque du Palais Royal de sa proposition de ?'large
autonomie'' au Sahara Occidental, fermant la porte à toute autre solution pour
régler définitivement ce conflit dans le cadre des résolutions pertinentes des
Nations unies. Pour le Roi du Maroc, il n'y a pas d'autre alternative à ce
conflit, né de l'occupation par le Maroc du Sahara Occidental en 1975, que ?'
l'Initiative d'autonomie en tant que solution politique et définitive au
conflit artificiel suscité autour de notre Sahara''. Sur ce point précis, Mohammed
VI n'innove plus. Et confirme que Rabat a déjà fait de cette question ?'la
priorité des priorités dans notre politique intérieure et extérieure''. Difficile
dès lors pour les négociateurs de bonne volonté de parvenir à un rapprochement
des vues pour la mise en place d'un mécanisme fiable devant mener à court terme
vers une solution politique au Sahara Occidental. ?'Nous réitérons, par
conséquent, notre volonté de maintenir le cap et continuer à défendre notre
souveraineté et l'intégrité de notre territoire qui ne souffrent aucun
marchandage'', a-t-il dit. Sur le plan intérieur, le souverain du Maroc, qui a
réussi à faire voter avec un score surréel sa ?'nouvelle constitution'' après
des mois de manifestations de jeunes pour des réformes politiques en profondeur,
a pratiquement appelé les partis politiques à intervenir pour ?'calmer'' ces
jeunes qui maintiennent la pression en rejetant cette nouvelle constitution. Le
désarroi face à ces jeunes est maintenant patent chez le souverain, qui a
appelé ?'les partis politiques, majorité et opposition confondues (...) à
redoubler d'efforts pour favoriser la réconciliation des citoyens, surtout les
jeunes, avec l'action politique dans sa noble acception patriotique''. Il est
clair que les réformes mises en place après les manifestations de jeunes pour
plus de démocratie et moins de pouvoirs du Roi n'ont pas recueilli l'adhésion
populaire. Bien au contraire, la déception est grande chez les militants
associatifs, qui avaient notamment demandé, lors des manifestations du
printemps dernier, que le ?'Roi règne mais ne gouverne pas''. A brève échéance,
les Marocains doivent aller aux urnes dès octobre prochain pour élire de
nouveaux députés (représentants et surtout pour la désignation d'un Premier
ministre, comme prévu dans la nouvelle constitution votée le 1er juillet
dernier.