
Il
aura suffi d'une déclaration à propos du défilé militaire du 14 juillet, pour
qu'Eva Joly, la chef de file des Ecolos pour les prochaines présidentielles, ne
soit vouée aux gémonies xénophobes de la classe politique française. La juge
anti-corruption n'est plus française, elle est étrangère, venue d'ailleurs. Qu'importe
le Ailleurs, d'Afrique noire, de la terre des Arabes fusse-t-il descendant des
Vikings, les Français n'admettent pas que les binationaux, même français depuis
cinquante ans, aient une opinion sur leurs us et coutumes. Raciste primaire, le
politique français, toute couleur confondue ; la différence réside dans la
promotion publique du racisme ; s'érige en gardien du temple pour pourfendre les
envahisseurs venus de la mer, vilipendant les idées nouvelles surtout si elle
n'est pas originaire d'un descendant de Gaulois, alors que, paradoxalement, leur
actuel président possède des origines proches venues de la Hongrie alors que sa femme
est détentrice de la double nationalité. L'attaque contre Eva Joly, coupable
d'hérésie, parce qu'elle a osé toucher à l'un des symboles coloniaux de la France, a suscité tout ce
qu'il y a de plus vils dans la classe politique à commencer par le Premier
ministre Fillon qui a attaqué l'ancienne magistrate sur sa binationalité,
rejoignant, du coup, le discours lepéniste qui a mis dans sa ligne de mire ces
fameux binationaux, des Français à la nationalité douteuse, de seconde zone
lorsqu'il s'agit, essentiellement, de peaux basanées. Ainsi, M. Fillon, n'a pas
hésité à remettre en cause la nationalité, même d'Eva Joly, lui faisant payer, au
passage, ses déclarations peu amènes sur le Sarkozy de l'Elysée. D'Abidjan, il
dira : «Je pense que cette dame n'a pas une culture très ancienne de la
tradition française, de l'Histoire française et des valeurs françaises». Parce
que, pour les Français, ce défilé militaire est un message fort à ses anciennes
et nouvelles colonies les mettant en garde contre quelques éventuels mouvements
d'anticipation. Une armée qui n'a gagné, jusque-là aucune guerre si ce n'est contre
un homme esseulé, surpris au petit matin dans son palais en tricot de peau. Une
armée coloniale qui a semé derrière elle mort et désolation, humiliée à Dien Bien Phu, incapable de venir
à bout de quelques fusils de chasse en Algérie, malgré les tueries et la
torture. Une armée vassale des Américains en Irak ou en Afghanistan, tueuse
d'enfants et de femmes en Libye. Cette allusion aux Français de souche et les
importés de l'Europe, les Arabes; les Noirs ou les Asiatiques ne pourront
jamais être considérés comme français à cause de la couleur de leur peau et du
patronyme de leur Dieu; ouvre la porte à une dangereuse surenchère dont les
premières victimes sont toutes désignées.