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Le patron des Douanes accuse les importateurs véreux: Alerte aux médicaments contrefaits

par Moncef Wafi

Les chiffres annoncés par le directeur général des Douanes, Mohamed Abdou Bouderbala, lors de son discours inaugural de dimanche à l'occasion des travaux de la cinquième conférence nationale des cadres de l'administration des douanes qui s'est tenu à Tlemcen, et réitérés, hier, dans une déclaration à l'APS, ne sont en réalité qu'un rappel de l'ampleur prise par la contrefaçon en Algérie. Ainsi, ce sont 60% des produits importés en Algérie destinés à la revente en l'état qui sont contrefaits. Une estimation faite sur la base du taux des saisies des articles contrefaits par rapport au volume global des produis importés pour la revente chaque année. Une simple équation à résoudre pour quantifier «les proportions énormes» prises par ce délit économique qualifié de véritable fléau. Ce chiffre, en constante progression en Algérie, interpelle tous les acteurs économiques sur les dangers de la contrefaçon qui touche, désormais, à tous les produits.

Malgré l'importance des saisies annuelles par les services douaniers chargés de la lutte contre la fraude, entre 2 et 3 millions de produits contrefaits, l'Algérie reste loin, très loin même des standards internationaux pour la lutte contre la contrefaçon, à tel point, qu'en 2009, un rapport annuel établi par les services du Représentant au Commerce international (USTR), un organisme américain qui établit, chaque année et depuis 21 ans, une liste de pays «mauvais élèves» en matière de lutte contre la contrefaçon, classait l'Algérie à la troisième place sur une liste rouge de onze pays dite «de surveillance prioritaire» de la contrefaçon. En d'autres termes, après la Chine et la Russie, l'Algérie serait le pays qui lutte le moins contre la contrefaçon dans le monde. Tout en confessant la faiblesse logistique de ses services, manque de moyens modernes d'expertise comme les laboratoires de contrôle au niveau des frontières ou l'insuffisance des agents douaniers, formés sur plusieurs marques de produits pour intercepter les articles contrefaits, ils sont 280, le DG des douanes incite toutes les parties engagées dans le combat à intensifier la lutte contre ces importateurs-fraudeurs. Il citera nommément les propriétaires de marque, les associations de protection des consommateurs, comme les services des Douanes ou du Commerce qui doivent «réagir chacun à son niveau pour mettre fin à ce trafic».

Ces insuffisances enregistrées dans la lutte contre la contrefaçon ont déjà été soulevées par le même responsable, en janvier 2007, lors d'une rencontre sur «la propriété intellectuelle» tenue à l'occasion de la célébration de la Journée internationale de la douane, lorsqu'il avait déclaré à la presse que «l'Algérie ne dispose pas de moyens pour lutter contre ce fléau qui ne cesse de prendre de l'ampleur». Un fléau tel qu'il est l'un des points faibles du dossier algérien pour son adhésion à l'Organisation mondiale du commerce. La contrefaçon reste l'un des vecteurs d'enrichissement les plus en vogue puisque nombre de pseudo-importateurs s'y engouffrent. Touchant plus particulièrement les secteurs du tabac, des cosmétiques et des pièces détachées automobiles, il déborde aujourd'hui, les appareils électroménagers, la robinetterie à gaz et plus dramatique encore aux médicaments mettant directement en danger la vie des citoyens.

Selon M. Bouderbala, le modus operandi utilisé par ces importateurs «véreux» passe par une première étape qu'on peut appeler de façade avec l'importation du vrai médicament pour obtenir l'autorisation d'importation du ministère de la Santé, utilisée par la suite pour importer des médicaments contrefaits. Ces vérités ne font que confirmer les études déjà menées par le groupe de protection des marques en Algérie, le GPM, qui place les cigarettes en hit-parade des produits contrefaits importés avec 66%, suivies par les 28% des pièces de rechange automobile, l'électroménager, avec 2%, et les produits cosmétiques, avec 1%.

Concernant ce dernier produit, le premier responsable des douanes a affirmé que «presque la totalité des cosmétiques importés sont contrefaits et que tous les appareils de téléphonie mobile qui ne sont pas agréés par l'ARPT (autorité de régulation) sont aussi de faux produits», de quoi distiller le doute dans les esprits. Quant au préjudice économique, la contrefaçon ferait perdre à l'Algérie, chaque année, plus de 20 milliards de dinars, 7 000 emplois et 14 milliards de dinars en recettes fiscales. Par ailleurs, et selon les chiffres du ministère du Commerce, 50% des pièces de rechange automobile, responsables d'au moins de 10 à 20% des accidents de la route, 30% des produits cosmétiques, 30% des vêtements et chaussures et 12% des appareils électriques circulant sur le marché national sont des produits contrefaits. Pour le DG des douanes, l'intensification de la lutte doit impérativement passer par le durcissement de l'arsenal répressif à travers la législation en matière de lutte contre la contrefaçon.