C'est dans une salle archicomble que s'est
déroulée mercredi dernier, la séance de projection, en avant première, du
documentaire fiction «Sidi Sidi Boumediene Chouaïb El Ghaout». Outre le
réalisateur Yahia Mouzahem
et son scénariste Tayeb Touhami,
on remarquait la présence parmi le public d'un panel d'intellectuels et
d'hommes de culture, entre autres Baghli Mohammed, Dib
Omar, Hikmet Sari Ali, Abdelatif Mrah, Hami Benosman, Ghaouti Bensenouci, Fouad Ghomari, Morsli Bouayed, Abdelatif Negadi, Nordine Rahmoun? «Encore un autre
complot », nous dira tout de go Si Mohammed Baghli à la fin de la projection. La voix off de Yahia Aggab évoquant le voyage
«direct» de Fes (Maroc) à Arafat (La Mecque), effectué par
l'illustre soufi qui sera distingué de la «khirqa», à
cette occasion, par le pôle Abdelkader El Djilani, ne
manquera pas de susciter l'indignation de ce spectateur avisé. Celui-ci estime
que «la station de Sidi Abdallah Ben Ali d'El Baâl où
Abou Medien enseignait les maximes d'El Djunaïd, ainsi que le fameux épisode de la rose sur le bol
de lait qui lui avait été sournoisement offert par les notables», ont été (délibérément)
escamotés, excluant ainsi ce dernier de l'espace zianide.
L'Idrisside Sidi Slimane de Ahl
el Beït (petit-fils de Fatima Zohra
Bent Rassoul , QSSL) qui repose à Aïn el Hout fut, lui aussi, l'objet d'une tentative (d'occultation
identitaire) similaire, lorsque des chroniqueurs lui firent établir un acte de
décès sur un champ de bataille près de La Mecque dit «Ma'raket el
fekh», selon Si Baghli. L'intervenant
ne s'explique pas, par ailleurs, la séquence anachronique gratuite de la
bataille «El Bahira » qui avait opposé les Almohades
aux Almoravides, qu'il qualifiera de «fantasme cinématographique violent du
cinéaste». Il reprochera à ce dernier, dans le même sillage, la scène de la Qotibya
d'Aïn Taqbalet, réduite à
«un convoi (sous escorte) militaire, venant de Bedjaïa
pour se diriger vers Marrakech, sur convocation du sultan almohade? Ces
critiques sont un véritable cri de cœur de celui qui a initié et perpétue les
vendredis, suivant chaque Mouloud et le 13 novembre, date de la mort, en l'an 1197,
le «pèlerinage» commémoratif de la
Qotbiya vers la station mystique d'Aïn Taqbalet où rendit l'âme Abou
Medien Chouaïb, en répétant
«Allah el Haq, Allah Hay». Ni
la pittoresque qoubba, ni la vieille mosquée d'Aïn Taqbalet (alimentée en
archives par la khalwa de Cheïkh
Senouci), ne jouiront des faveurs de la caméra. Il
faut savoir que la distance à vol d'oiseau entre la station de la Qotbiya
(Aïn Taqbalet) et le
mausolée de Sidi Boumediene (El Eubbad) est de 41,99 km, soit le parcours
du marathon international (un marathon pédestre libellé Abou Medien Chouaïb, parrainé par le
PNT fut organisé en novembre 2006). En guise de plaidoirie, le réalisateur, étouffant
la voix du scénariste, avancera le facteur temps (52 mn),
un argument récurrent, en précisant que «ce n'est pas un film historique mais
un documentaire fiction». A notre question sur son passage du «hazl» («Saâd El Gatt», série TV
du ramadhan passé) au «djed» (documentaire de«Sidi
Boumediene Chouaïb El Ghaout»),
autrement dit du profane au mystique, Yahia Mouzahem nous répondra d'une manière «puérile» que c'est
comme «dans la vie de tous les jours, tantôt on travaille, tantôt on joue». Quant
à Tayeb Touhami, il
stationnera sa voiture juste en face de la petite Qoubba
de Sidi Abbed, orienté par les cris d'un «mtargui» (une scène incongrue dans un documentaire mystique
fût-il de fiction) accompagné de la chanson culte « Sidi Boumediene Djtek qaced» (jungle
radiophonique de «Tlemcen 2011») interprétée par Hami
Benosman.
Le
visiteur est l'invité de la zaouiya de Sidi
Boumediene animé par le Dr Hikmet Sari Ali (UNZA). Un «néologisme» galvaudé, au
lieu et place de «l'école d'El Eubbad». Même la khalwa (ermitage) du maître spirituel de Abou Mediene, en l'occurrence Abi Yaza, situé dans l'Atlas marocain est appelée (improprement)
zaouiya. Notons au passage que ce «monstre» du
soufisme du Rif (un non voyant) est montré jouissant de sa vue avec des
pouvoirs télékinésiques grâce aux effets spéciaux
usés dans le film? Ce documentaire de fiction produit par First Spot (CNCA 2011) est distribué par les jeunes Djaouad Zamaki et Mohammed Amine
Ben Allal qui ont interprété le rôle de Sidi
Boumediene, durant son enfance tandis que l'acteur Abdelkader Boudjadja a été choisi pour incarner le personnage, à l'âge
adulte. En matière d'extérieurs (sites mystiques), le choix s'est porté sur les
cascades d'El Ourit, les grottes de Beni Add, Dar Soltane,
la mosquée de Sidi Boumediene, le mausolée éponyme, la colline d'Aïn Taqbalet? Au titre de la
distribution et de la figuration, notons la participation de «Ouled bled» (Djil 2011, Ahbab Mansourah, Dar el Koubra?) qui prendront sur scène une photo de famille avec
le réalisateur. Quant aux témoignages, émanant de «chercheurs dans le
patrimoine soufi», citons les Dr Hikmet Sari Ali, Mohammed Amine Belghit, Saïd Djeb el Kheir, Husseïn Farsi, Cheïkh Bouamrane, Cheïkh Mohammed Cherif Qaher, Cheïkh Youcef
Salama? Rappelons que Sidi Abou Madyane
Choaïb ben Al-Ansari d'Al-Houssein est né à Cantillana
dans la région de Séville (Andalousie) en 1126 et est décédé à Aïn Taqbalet (Tlemcen) en 1197. Il
est le saint patron de la ville de Tlemcen succédant à Sidi Daoudi
Ben Nsar dont on devait célébrer le millénaire en? 2011.