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Tlemcen: Abdelkrim Dali à l'écran

par Allal Bekkaï

« Cheïkh Abdelkrim Dali est une figure marquante de la musique traditionnelle, style andalou et hawzi dans notre pays. Il s'est abreuvé de connaissances musicales chez de grands maîtres tlemcéniens au début du siècle. Maitre lui-même ensuite dans l'exécution instrumentale et vocale, il fera le déplacement à Alger qui va lui permettre de se distinguer parmi l'élite artistique nationale?», écrit Abdelkader Bendameche, auteur du scénario du film documentaire «El Hadj Cheïkh Abdelkrim Dali» projeté mercredi au CIP, en avant-première en présence de son réalisateur Bounouar Bekkar et du producteur El Yazid Djoudi, mais en l'absence du scénariste pour cause de deuil familial. Au titre des témoignages (plateaux), on citera de Tlemcen Salah Boukli, Salim El Hassar, d'Alger Slimane Anana, Lamine Bechichi, Mourad Dali (fils), Nadjib Kateb, Nouri Koufi, Smail Hini et Hacen Benchoubane, ainsi qu'un membre de «Chabab el Andalous» de Rabat de passage à Alger, Ahmed Serri, Nasreddine Baghdadi et Amina Belouizdad (extrait d'un enregistrement vidéo), d'Oran Amine Dali Youcef et Amine Kelfat, de Mostaganem Abdelkader Bendameche (qui choisira de s'exprimer à partir du mausolée de Sidi Lakhdar Benkhlouf) et Moulay Benkrizi, de Bedjaïa Imloul Fatah et Bouyahia Djemil, de Constantine Hamdi Benani et de Annaba Dib Ayachi?Blida, la ville de Cheïkh Dahmane Benachour et El Koléa de Cheïkh Mustapha Kasdali seront allègrement enjambées tout comme Oujda de Mohammed Bensmaïne, chef d'orchestre de El Andaloussia (avec qui il joua en tant que chanteur et flûtiste)? A ce titre, l'«omission» de Yahia Ghoul, considéré comme la doublure de Dali nous semble injustifiée (ni témoignage, ni illustration musicale).

 Mourad, le seul fils encore en vie, se rappellera lorsque son père terminait à la hâte sa hrira pendant le ramadhan pour passer à la télé (à l'époque les concerts n'étaient pas enregistrés) alors que sa famille était encore à table, néanmoins «accompagnée» via le petit écran et en direct par le père. Lors du débat, à notre question sur l'absence du hawzi phare «Ya daw ayani» qu'interpréta sublimement Cheïkh Abdelkrim Dali (aux côtés de Samy el Maghribi), un poème érotico toponymique de Tlemcen où est cité entre autres derb Essedjane (la venelle de l'oiselier) où naquit le Cheïkh, le réalisateur nous avouera ne pas connaître cette chanson. Le président de l'association Tarab El Assil (laquelle avait organisé deux commémorations en 2005 et en 2008), Abdelkader Bekkaï remettra les pendules à l'heure en précisant que dans les années 30, autrement dit avant son départ de Tlemcen (1946), le jeune Dali fut contacté par un certain Azrour de la radio (1932) bien avant Boudali Safir, outre des enregistrements avec Cheïkh Tetma chez Algériaphone (1938) et des concerts andalous à Radio Alger(1941) avec un orchestre symphonique dirigé par Jacqueline Maire. Par ailleurs, l'intervenant soutiendra que certains documents d'archives utilisés dans le film ont été déjà exploités par ladite association dans le cadre des commémorations, ce qui fera curieusement dire au responsable du département cinéma Karim Ait Oumeziane que «seuls les documents inédits sont acceptés». La question de son départ de Tlemcen soulèvera une certaine polémique : son exil était-il d'ordre artistique (professionnel) ou bien économique (matériel) ? «?lorsque sa ville lui parut plus petite que ses ambitions», expliquait la voix off. Contrairement à la maison natale de Hart R'ma (16 novembre 1914), sa tombe au cimetière de Sidi Yahia (21 février 1978) aurait été sciemment «occultée» pour des raisons technico esthétiques voire éthiques : «Cheïkh Abdelkrim Dali est toujours vivant (artistiquement parlant)».

Par ailleurs, les organisateurs aurait dû penser organiser en marge de la projection une vente dédicace du livre de Abdelkader Bendameche «Cheikh El Hadj Abdelkrim Dali : une vie une œuvre» (ENAG/2009) qui a servi de base à la réalisation du film éponyme. Enfin, il faut savoir que le clap inaugural (début du tournage) de ce film documentaire produit par l'entreprise YNS PROD d'Alger dans le cadre de la manifestation «Tlemcen, capitale de la culture islamique en 2011» a eu lieu le 20 octobre 2010 au musée national des arts populaires à Alger.