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Si l'on prend comme point de départ la ville de Deraa à la mimars, la contestation en Syrie est entrée dans son deuxième mois. Depuis cette date, la liste des morts s'allonge du fait de la répression des manifestations de rue par les forces de l'ordre syriennes ou par l'intervention «d'hommes armés», dixit diverses agences de presse. Pouvait-on anticiper cette vague de revendications à caractère politique ? Juste après la chute de Hosni Moubarak, plusieurs observateurs ont esquissé la suite des évènements de ce qu'on a fini par appeler «le printemps arabe», à savoir son extension au reste du «monde arabe», Syrie, Yémen, Etats du Golfe? selon une perception caricaturale de la théorie des dominos. La rue syrienne a, grosso modo, porté les mêmes revendications qu'en Egypte, à savoir essentiellement la liberté et la justice, dont le corollaire serait la démocratie au sens universel. En tout cas, les appareils d'Etat syriens n'ont pas été en mesure de gérer la situation et d'éviter le clash. Mais peut-on être juge, arbitre et partie, surtout dans un système où la contradiction n'est même pas tolérée ? Non. Cela ne laisse la place qu'à l'expression du rapport de force dans un huis clos d'où ne filtrent que des bribes d'information et des images de violences. Aucun compromis - encore faudrait-il que la culture locale y soit prédisposée - ne semble possible. Alors, la répression se justifie officiellement par l'intervention des forces de l'ordre «avec des gaz lacrymogènes et des canons à eau seulement pour empêcher des heurts entre certains manifestants et citoyens », et « pour protéger des biens privés ». Les balles qui atteignent des cibles humaines proviennent d'on ne sait où et les «hommes armés» qui entrent en scène, aussi. La levée, jeudi dernier, par le président Bachar el-Assad de l'état d'urgence, en vigueur depuis près de 50 ans, n'a pas mis un terme à la mobilisation dans les rues de plusieurs villes. Maintenant, et cela était prévisible selon le «schéma égyptien», les contestataires appellent à la dissolution des «moukhabarate», les services renseignements, et à des poursuites contre ses membres. Voilà qui va corser le bras de fer dans ce pays où les moukhabarates sont un instrument essentiel de la gouvernance depuis feu Hafed El Assad. La contestation est-elle capable de venir à bout de cette redoutable hydre ? Rien n'est moins sûr. Dans ce huis clos, où il est difficile de savoir qui est qui, les contestataires tableraient sur l'affaiblissement du clan Assad, son manque d'homogénéité et la faiblesse de sa vision stratégique. Ils tableraient également sur les coups que porte au régime son oncle Rifaat Al-Assad, entré en dissidence fin 1983. Installé en Espagne, Rifaat Al-Assad et ses fils Sumar et Ribal multiplient, à travers leur chaîne de télévision «ANN», les attaques contre le neveu et cousin Bachar El Assad. Même si cela n'est pas nécessairement relayé localement, cela sème le trouble et la confusion. Dans cette mêlée où le peuple syrien est relégué à l'arrière-plan, voire mis hors jeu, les frères arabes - ceux de la Ligue et autres ? paraissent bien impuissants à éviter que le pays ne s'enfonce dans la tragédie. Cette fraternité factice, constatée déjà dans d'autres cas de figure, laisse le champ libre aux puissances agissantes dans la région : Israël, Etats-Unis, France? La France, via son ministère des Affaires étrangères, a appelé les autorités syriennes à «renoncer à l'usage de la violence contre leurs citoyens ». Pas un Arabe n'a osé exprimer cette demande basique publiquement. Quant au journaliste de nationalité algérienne, Khaled Sid Mohand, «disparu» à Damas depuis plus de dix jours, il faudrait espérer qu'il réapparaisse sain et sauf parce qu'il n'y a pas de raison pour qu'il s'évanouisse comme cela dans la nature et, peut-être aussi, pour montrer que la fraternité syro-algérienne n'est pas une fiction. |
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