Des milliers d'étudiants arrivant de différentes universités et écoles
supérieures ont bravé hier, l'interdit. Ils se sont rassemblés à la place Emir
Abdelkader et à la Grande Poste, pour entamer vers 11h, leur marche en
direction de la Présidence. Des blessés ont été enregistrés dans les deux
camps, étudiants et policiers, lors d'affrontements. Malgré la présence massive
des forces de l'ordre, les étudiants ont réussi à forcer le cordon sécuritaire.
Des échauffourées s'en sont suivies entre étudiants et éléments anti-émeutes.
Les étudiants ont, tout de même, marché en prenant le chemin du boulevard
Mohamed V, pour atteindre le Palais du gouvernement et enfin la rue Pékin, près
d'El Mouradia. Un groupe est arrivé près du lycée Descartes en se mêlant aux
médecins résidents qui étaient déjà sur place. Un autre groupe a été bloqué
près de l'Hôtel Saint Georges. Tout au long de leur parcours, les étudiants
scandaient des slogans hostiles au pouvoir. Des blessés ont été enregistrés
tant parmi les manifestants que la police qui tentait, à chaque fois, de
repousser les protestataires. Les renforts des éléments de la sécurité
continuaient à affluer, au fur et à mesure, mais c'était peine perdue, les
étudiants avaient déjà pris place en occupant la rue près du lycée Descartes.
Dès que les éléments anti ?émeutes s'approchaient d'eux, ils scandaient «on
n'est pas des voyous, on est des étudiants» et d'enchaîner «Oulach smah,
oulach». Les revendications estudiantines parfois relevaient du politique.
Certains ont répété «le peuple veut la chute du régime». La tension est montée
d'un cran, lorsque les éléments anti-émeutes ont tenté de déloger les
protestataires, vers un peu plus de14h, par la force et la matraque, en les
repoussant vers le Palais du gouvernement, et plus loin encore. Certains
étudiants brutalisés n'ont même pas pu récupérer leurs affaires laissées sur
place dans la précipitation. Des pancartes ont été abandonnées ici et la, sur
lesquelles on pouvait lire «les jeunes veulent fuir» et encore «on n'est pas
des cobayes».
Un des porte-parole des
étudiants, un jeune architecte de la faculté de Blida, Hamza El Ouzani nous a
décrit «le calvaire estudiantin». «Notre école d'architecture ne ressemble en
rien à celle de nos voisins tunisiens que j'ai moi-même visitée» a-t-il
mentionné. Et d'enchaîner: «je pose une simple question au ministre de
l'Enseignement supérieur : pourquoi nous n'avons pas, nous les jeunes étudiants
d'architecture, une école comme celles qui existent partout dans le monde,
sachant que l'argent ne manque pas ? ». Notre interlocuteur affirme que les
derniers propos du ministre n'ont convaincu personne. Les étudiants réclament,
enfin, le respect total de la table de revendication initiale et non celle
modifiée par le département du ministre. Le jeune architecte et porte-parole du
mouvement nous a signalé vers 15h, qu'une vingtaine d'étudiants blessés ont été
évacués aux urgences de l'hôpital Mustapha. Les étudiants qui devaient tenir
leur réunion le soir, étaient dans l'incapacité de nous fournir des
informations sur la suite à donner à leur mouvement de protestation, notamment
après l'intervention musclée des forces de l'ordre.