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L'Armée a fini par trancher dans la situation floue qui prévalait en
Egypte au lendemain du départ de Moubarak. Dimanche, alors que la vie reprenait
doucement dans la capitale égyptienne, le gouvernement de transition se
réunissait, l'Armée préparait d'importantes décisions et, sur la désormais
mythique place Tahrir, le nettoyage se poursuivait après plus de 16 jours de
manifestations qui ont eu raison du président Moubarak.
Dans son communiqué N°5, l'Armée égyptienne a annoncé, dimanche, la dissolution du Parlement et la suspension de la Constitution ainsi que la mise en place d'une commission qui sera chargée de son amendement. Dans la foulée, l'Armée a ajouté que la période de transition politique durerait six mois. Le Conseil suprême des forces armées, dépositaire du pouvoir en Egypte, a également annoncé la dissolution de «l'Assemblée du Peuple et de la Choura», la chambre haute consultative. Il a annoncé aussi, dans ce communiqué lu par une présentatrice à la télévision d'Etat, la «suspension de la Constitution» et la création d'une commission pour l'amender et organiser un référendum sur ces changements. Formé d'une vingtaine de généraux, le Conseil suprême ajoute qu'il «prend en charge la direction des affaires du pays, provisoirement, pendant six mois ou jusqu'à la fin des élections législatives et pour la présidence de la République». Cette annonce confirme l'orientation que veulent imprimer au pays les militaires à qui Hosni Moubarak avait remis le pouvoir avant de partir. Le général Tantaoui a cependant rassuré que la volonté du peuple d'un changement démocratique des institutions du pays sera respectée, comme le demandaient les manifestants. En outre, l'institution militaire a promis, samedi, une «transition pacifique» vers «un pouvoir civil élu». Le Conseil suprême des forces armées a annoncé que le gouvernement nommé par M. Moubarak quelques jours avant son départ resterait en place pour assurer la gestion des affaires courantes. Ce dernier a tenu, dimanche, sa première réunion depuis la démission de M. Moubarak. «La sécurité est la première priorité du gouvernement égyptien», a déclaré, dimanche, le Premier ministre Ahmad Chafic. «La première priorité de ce gouvernement est de restaurer la sécurité et de faciliter la vie quotidienne de la population», a-t-il ajouté au cours d'une conférence de presse. Le cabinet de M. Chafic, un général ancien ministre de l'Aviation, a été formé le 31 janvier, quelques jours après le début de la révolte qui a abouti au départ du chef de l'Etat. Quand les policiers manifestent Par ailleurs, des policiers égyptiens, dont l'attitude lors des manifestations contre l'ex-président Hosni Moubarak a été très critiquée, ont défilé pour «leur honneur» dimanche au Caire, provoquant des incidents avec l'Armée. Ils étaient environ 400 à manifester à l'extérieur du ministère de l'Intérieur pour réclamer des hausses de salaires et l'exécution de leur ancien ministre Habib el-Adli, révoqué fin janvier sous la pression de la rue et interdit de quitter le pays. Des incidents ont eu lieu avec les soldats présents qui ont tiré des coups de semonce en l'air et un policier a eu des dents cassées dans les échauffourées. Les policiers qui manifestaient dimanche insistaient sur le fait qu'ils avaient reçu des ordres pour réprimer avec brutalité les manifestations qui ont abouti au départ de Hosni Moubarak, soulignant qu'ils étaient mal payés par un gouvernement corrompu. Ils ont conspué M. Adli, en scandant «Habib, tu dois être exécuté sur la place publique». «Nous ne sommes pas des traîtres», ont-ils aussi lancé, l'un d'eux affirmant: «Nos frères étaient dans les manifestations». Un groupe de policiers se dirigeant vers le ministère a traversé la place Tahrir, épicentre de la révolte populaire, pour montrer leur solidarité avec les manifestants encore présents, mais il a reçu un accueil très mitigé, parfois injurié ou bousculé par la foule. «La police et le peuple main dans la main», scandaient-ils, tandis que l'un d'entre eux tenait un bouquet à la main. «Personne n'est content de voir la police sur la place Tahrir. On est en colère», lance Fadi al Masri, 26 ans, en regardant le cortège passer, l'air écoeuré. Vers le gel des avoirs du clan Moubarak Comme cela a été le cas pour Ben Ali, les avoirs du clan Moubarak, estimés entre 40 et 70 milliards de dollars, placés dans plusieurs places financières internationales, pourraient être gelés, voire bloqués. Le ministre britannique du Commerce, Vince Cable, a estimé dimanche que les éventuels avoirs à l'étranger du président égyptien déchu Hosni Moubarak devaient faire l'objet d'une «action internationale concertée». «Je ne savais pas qu'il avait d'énormes avoirs ici, mais il faut sans aucun doute qu'il y ait une action internationale sur ce sujet», a-t-il déclaré à la chaîne BBC1 en réponse à une question sur la présence éventuelle de certains de ces avoirs au Royaume-Uni, évoquée par la presse locale. «Cela n'a pas de sens pour un gouvernement d'agir tout seul, mais nous devons absolument nous pencher sur la question. Cela dépend aussi de la manière dont ont été acquis ces avoirs», a ajouté le ministre. La Suisse a décidé, vendredi, de geler «avec effet immédiat», les avoirs que pourraient détenir dans la confédération l'ex-président Moubarak et son entourage. Par ailleurs, si au plan international le départ de Moubarak a été unanimement salué, même par ses partisans d'hier, dont les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, l'Etat hébreu reste pour le moment réservé, notamment sur l'avenir de son accord de paix signé par Es-Sadate en 1979 avec l'Egypte, ainsi que sur ses relations avec Le Caire, même si le ministre israélien de la Défense Ehud Brak a déclaré hier que les bouleversements en Egypte ne présentent «aucun risque» pour les relations avec Israël, écartant une évolution à l'iranienne dans le pays voisin. |
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